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Entendu - Page 5

  • Fin de partie (avant la suivante) et tentative assez mesquine de rattrapage estival...

    Parfois vous avez les yeux plus gros que le ventre et, armé des meilleures intentions, vous laissez trôner devant vous une pile de disques dont vous êtes absolument certain de rendre compte en trouvant les mots appropriés en un temps suffisamment rapproché de la publication des disques concernés. Histoire d’être un type sérieux... Voilà, ça, c’est pour la théorie. La pratique peut s’avérer très différente, surtout lorsque parallèlement à vos activités de chroniqueur estampillé Citizen Jazz et de tricoteur de phrases trop longues publiées dans un blog que vous maintenez vaille que vaille, vous avez été gagné par l’idée saugrenue d’écrire un roman dans le cadre d’une exposition menée main dans la main avec un ami photographe. Et que celui-ci (le livre, pas le photographe) fait l’objet d’une publication (on peut se le procurer ICI), une vraie avec des pages et du papier, ce qui vous a contraint à mobiliser les deux ou trois compétences que votre état de quasi-sexagénaire a bien voulu laisser subsister dans la friche que constitue votre cerveau fatigué parce que lorsque vous ne faites pas appel à un éditeur, il vous faut être capable de réaliser plein de petites choses fort utiles sans lesquelles votre tapuscrit resterait au chaud dans l’espace clos du disque dur niché sous le capot de votre ordinateur (et dûment sauvegardé en deux ou trois exemplaires).

    Ces prolégomènes sinueux à vouvoiement Butorien ne sont rien d’autre qu’une mauvaise excuse pour dire qu’on ne tient pas toujours ses promesses. Qu’on peut embarquer avec soi dans son refuge estival une somme de musique en se promettant de rattraper le temps perdu tout en émettant l’hypothèse – fort réaliste – d’une non réalisation de l’objectif qu’on s’est stupidement assigné. J’avoue, je confesse, j’implore votre pardon, j’aurais pas dû, et je ne manquerai pas, dès l’écriture du point final de cette note, de me flageller longuement dans l’espoir de redorer mon blason d’obsédé textuel un poil digressif. Car c’est vrai : en mettant le cap sur le site incomparable de la ville de Collioure, j’ai par la même occasion glissé dans mes valises une série de galettes savoureuses ainsi que pour la plupart d’entre elles le dossier de presse associé. Je m’étais persuadé que je serais capable de leur consacrer le temps nécessaire. Tu parles ! Erreur fatale, je n’ai fait que lire et marcher, entrecoupant ces nobles activités de quelques rapides séances de baignades suffisamment décalées dans le temps estival pour échapper dans les meilleures conditions à la horde des vacanciers invasifs. Mais d’écriture, point ! Et c’est injuste eu égard aux qualités de disques que je vais me permettre de citer ici, non pour rattraper le coup comme on dit, mais pour attirer votre attention sur eux tant ils le méritent vraiment. On y va ?

    ceol_mor.jpgPatrick Molard : Ceòl Mòr / Light & Shade, paru chez Innacor pour dérouler sa « grande musique des hautes terres d’Écosse » avec un line-up dans lequel on retrouve, aux côtés du joueur de cornemuse et de son violoniste de frère Jacky Molard une paire rythmique sublime, constituée d’Hélène Labbarière à la contrebasse et de Simon Goubert à la batterie. C’est envoûtant, hypnotique et celtique. Un disque d’ailleurs...

    housewarming.jpgLe très beau duo formé par Bojan Z (piano et claviers) et Nils Wogram (trombone) : Housewarming est paru chez Nwog et c’est ici tout l’art de la conversation si chère au jazz qui se joue là. Élégance et fluidité, voilà un disque dont on ressort avec l’envie irrépressible de parler à quelqu’un, parce qu’on vient de recevoir une bonne dose de chaleur (mais non caniculaire). Et puis Bojan Z, hein, c’est quand même un sacré client. Plus de 20 ans que je le suis, celui-là et je m’aperçois qu’il se refuse obstinément à me décevoir.

    octurn.jpgTiens, voilà peut-être un disque parmi les plus fascinants, pour ne pas dire mystérieux, qu’il m’ait été donné d’écouter durant ces derniers mois. Imaginez un quartet belge dénommé Octurn (avec Bo Van Der Werf au saxophone, Jozef Dumoulin aux claviers, Fabien Fiorini au piano et Dré Pallemaerts à la batterie). Déjà, ça sent fort le talent... Rien que Dumoulin et Pallemaerts, moi j’accoure ventre à terre quand je lis leurs noms. Mais si je vous dis qu’ils publient sur le passionnant label Onze Heures Onze un double CD intitulé Tantric College parce qu’ils ont été frotter leurs molécules à celles des moines tibétains de Gyuto, alors vous commencerez à comprendre ma curiosité. Au début, j’étais circonspect, j’avais peur d’un montage artificiel, d’une rencontre qui n’en aurait pas été une. Erreur ! Cette musique vous happe et vous incite à ne rien faire d’autre qu’à l’écouter. Ne me demandez pas de vous la décrire, l’exercice ne m’intéresse pas. Pour tout vous dire, c’est presque magique.

    alban_darche_pacific_cover.jpgEncore un oublié des derniers mois : le saxophoniste Alban Darche qui publie chez lui, c’est-à-dire sur le label Pépin & Plume... un 33 tours. Eh oui, ils reviennent à la mode ces beaux objets qu’on a envie de posséder parce qu’on veut extraire le vinyle de sa pochette, parce qu’on aime le petit cérémonial d’écoute, parce que certains disent que leur son est incomparable. Je n’ouvre pas ici le débat mais vous recommande très chaudement un Pacific enchanteur qui vient s’offrir comme un espace de jazz west coast en écho à son pendant east qu’avait pu être Crooked House, du même Darche dans une formation baptisée Hyprcub. Ici, pas de Cube, gros ou pas, juste un nouvel exemple de Darche en avant avec une quarte qu’on ne saurait blâmer d’être aussi inspirée : Samuel Blaser au trombone, Geoffroy Tamisier à la trompette, Josef Dumoulin, encore lui, au piano et au Rhodes et Steve Argüelles à la batterie. Voilà du jazz qui n’a pas d’âge et qui, à peine mis en musique, vous garantit une belle longévité sans oublier de verser son écot à la collaboration de Gil Evans et Miles Davis. Et vous savez quoi ? C’est le genre de disque que vous glissez dans la platine quand, à force de scruter vos rayonnages, vous ne parvenez pas à vous décider pour l’un ou l’autre. Parce qu’il est plein de l’essentiel. Un jazz durable, en quelque sorte. Souvent, on me demande : « C’est quoi pour toi, le jazz ? » Question à laquelle je suis incapable de répondre. En revanche, je peux toujours suggérer l’écoute d’un tel disque, c’est une façon de ne pas laisser mon interlocuteur dans l’expectative.

    FreeVertical.jpgJe ne compte plus les disques publiés par Henri Roger. Ni les directions dans lesquelles il dirige son inspiration. Vous trouverez ici-même de nombreux échos de mon enthousiasme pour lui. Free Vertical Compositions (chez Facing You / IMR) est un autre exemple de sa faculté à engendrer des ovnis, une sorte de condensé des heureux hasards de l’informatique et de leur confrontation avec l’imagination d’un touche-à-tout qui, jamais, ne s’éloigne de son rôle, je le cite, d’électro-libre. Henri Roger est un heureux papa musical  qui prend plaisir à nous surprendre, quitte à nous égarer pour mieux nous retrouver ! Et quand je vous aurai dit qu’on doit la restitution sonore de ces compositions verticales libres à Maïkôl Seminatore et Marwan Danoun, vous saurez que le risque est grand d’en prendre plein vos mirettes acoustiques.

    tous_dehors.jpgJe ne sais pas comment Régis Huby s’y prend pour offrir un si beau catalogue sur son label Abalone... Toujours est-il que Les sons de la vie, nouvelle œuvre de l’ensemble Tous Dehors mis en musique par le saxophoniste clarinettiste Laurent Dehors n’échappe pas à la règle d’or instaurée par le violoniste depuis de longues années : sortir du cadre et vivre sa passion à fond. Encore un disque choc et presque un concept album, au sens où Les sons de la vie racontent... l’histoire d’une vie, du début à la fin, en commençant par la rencontre amoureuse, la conception, l’enfance, l’adolescence et tout ce qui suit jusqu’à la mort. Surtout, ce grand ensemble de neuf musiciens (et deux invités de marque : le guitariste Marc Ducret et le pianiste Matthew Bourne) est la source d’une véritable explosion de sons. Ah la la... ça fourmille là-dedans, ça grouille, ça joue et ça déjoue, c’est entêtant, romantique parfois, on s’y aime, on s’y amuse et il arrive qu’on en meure. Un exercice de haute-voltige qu’on écoute en état de suspension, en retenant son souffle. Celui qui s’y ennuiera sera immédiatement excommunié de mon blog.

    flash-pig-couv-585.jpgDu côté de chez Nome, on ne se mouche pas du catalogue non plus. Les frères SanchezMaxime au piano, Adrien au saxophone ténor – forment avec Florent Nisse à la contrebasse et Gautier Garrigue à la batterie une quarte qu’ils ont décidé d’appeler Flash Pig. Je ne sais pas trop pourquoi mais ça n’a guère d’importance. C’est le contenu qui prime et pour ce qui est de la musique, je peux vous garantir que leur cochon éclair avance de beaux arguments mélodiques et rythmiques qu’ils ont choisi de valoriser en faisant appel à trois invités qui à eux-seuls ont des milliards d’histoires de jazz à raconter : Émile Parisien (saxophone soprano), Pierre de Bethmann (Wurlitzer) et Manu Codjia (guitare). Le disque n’a pas d’autre titre que le nom du groupe et, croyez-moi, ça suffit amplement à notre bonheur. C’est un jazz vivace et virevoltant comme avait pu l’être celui d’Ornette Coleman (auquel un hommage est rendu par une reprise de « The Vell »), où l’inspiration est guidée par un principe de liberté collective. Et quand tout ce petit monde est réuni le temps d’un « Enèf » en conclusion du disque, vous pouvez me croire, voilà du jazz qui remue bien dans les brancards. Oh que ça fait du bien !

    mienniel-tilt.jpgNe me demandez pas pourquoi j’ai zappé Tilt, le plus très récent disque du flûtiste Joce Mienniel, entouré de Guillaume Magne (guitare), Vincent Lafont (Rhodes) et Sébastien Brun (batterie), publié chez Drugstore Malone. Une très grossière erreur de ma part puisque cet enregistrement est disponible depuis un bon bout de temps et qu’il est rien moins que splendide. Une musique urbaine et sombre, un peu oppressante parfois et de la part de Mienniel une capacité assez fascinante à instaurer un climat. On pense parfois à la bande originale d’un film et à des scènes de rue dans lesquelles vous vous sentez comme happé par une urgence dont la cause vous échappera peut-être. Tilt est un peu comme un disque piège, mais un piège, bien sûr, auquel vous vous abandonnez sans la moindre réserve. Un des indispensables de l’année.

    lubat_luc.jpgChez Cristal Records, on a décidé d’octroyer une place de choix au fantasque Bernard Lubat, pianiste batteur acrobate des mots. Déjà en 2015, il nous avait convié en solo à des Improvisions, mot qui à lui-seul donne une idée assez précise de sa volonté de nous associer à son imaginaire plutôt débridé. Mais avec Intranquille, c’est un duo qui nous attend et, il faut bien l’admettre, une association qui peut étonner puisqu’on le retrouve live chez lui, à Uzeste, en compagnie du guitariste Sylvain Luc. Les deux musiciens multiplient les couleurs : la guitare est tour à tour acoustique ou électrique, tandis que Lubat passe d’un instrument à l’autre. C’est une confrontation, une proposition de mise en danger très pacifique qui nous rend impatients des prochains duos annoncés : avec Louis Sclavis d’une part, puis Michel Portal d’autre part. C’est quand vous voulez messieurs, continuez sur ces chemins escarpés dont on ressort en état de quasi ébriété. Nous serons là pour vous écouter...

    NicolasParentTrio-TORI.jpgMon camarade Olivier Acosta a, je crois, vanté non sans raison dans sa chronique de Citizen Jazz les qualités du trio formé par le guitariste Nicolas Parent avec Guillaume Arbonville (percussions) et Kentaro Susuki (contrebasse) lors de la sortie de l’album Tori chez L’Intemporel. Je ne peux que plussoyer et souligner à mon tour les beautés voyageuses de cette musique, d’une grande délicatesse mélodique, qui semble décidée coûte que coûte à nous emporter avec elle vers des sommets où l’air qu’on respire est source de sérénité. C’est une façon pour moi de constater qu’en ces temps où plus que jamais règne la violence des actes et des mots, un peu d’intelligence ne saurait nuire à l’exercice de notre quotidien. Je marche donc dans les pas de Nicolas Parent avec la plus grande joie. C’est presque de la béatitude...

    toux_gauthier.jpgJusqu’à une époque très récente, j’ignorais complètement l’existence du pianiste Gauthier Toux et de son trio. Oh je vous voir venir avec vos airs moqueurs... Gardez toutefois vos remarques pour vous, parce que je suis certain qu’en cherchant bien, je pourrais trouver de mon côté des musiciens dont vous n’avez jamais entendu parler. Mais il est bien vrai que quand j’ai reçu l’album Unexpected Things, qui est son deuxième disque, j’ai compris l’étendue de mon erreur. Associé à Kenneth Dahl Knudsen (contrebasse) et Maxence Sibille (batterie), Gauthier Toux délivre une musique d’une étonnante intensité – cousine parfois de celle qui traversait un autre trio, celui du regretté Esbjörn Svensson – dont l’effet de séduction est immédiat. Le pianiste présente ce disque comme une photographie d’instants forts : qu’il soit rassuré, on perçoit sans la moindre difficulté toute l’énergie qui circule au sein du trio. Voilà une formation qu’on a envie de découvrir sur scène tant on pressent qu’elle est en mesure de faire parler la poudre. Et puis disons les choses simplement : Unexpected Things est un disque assez majestueux qui en impose...

    Ubik-petit.jpgIl est un quasi big band – ils sont quinze, tout de même – qui ne se refuse rien et a sorti simultanément deux disques chez Neuklang. Le groupe s’appelle Ping Machine et on peut dire pour simplifier qu’il est animé par la créativité du guitariste Frédéric Maurin. Mais il y a plein de beau monde dans cette formation (dont le saxophoniste Jean-Michel Couchet, le tromboniste Bastien Ballaz, le guitariste Paul Lay, le trompettiste Quentin Ghomari) et tout le quartet Big Four...) exploratrice qui offre d’une part une longue suite intitulée U-bi__K et d’autre part un Easy Listening qu’on pourra peut-être écouter en premier. Encore que ça n’a pas beaucoup d’importance, finalement, je n’en suis même pas certain... L’essentiel est dans la beauté formelle de cette musique, très mouvante et de grande ampleur, qui n’exclut pas un certain minimalisme à certains moments. Votre attention sera requise parce qu’il ne s’agit pas là d’un jazz confortable mais au contraire assez ambitieux, qui donne accès à un univers dont il faut pousser les portes avec curiosité. Une fois ouvertes, elles vous en feront entendre de toutes les couleurs.

    borghi.jpgEnfin, et c’est bien malheureux, je n’ai pas le droit d’évoquer ici un enregistrement signé d’un remarquable trio... parce que le disque n’existe pas encore ! Incroyable que l’addition des talents d’Emmanuel Borghi (piano), Jean-Philippe Viret (contrebasse) et Philippe Soirat (batterie) n’ait pas encore trouvé preneur. Non mais vous avez vu le pédigrée des trois lascars ? J’ai la chance de me régaler de ce jazz très solaire et mélodique depuis plusieurs mois et je suis d’ores et déjà dans les starting blocks pour lui donner un petit coup de main si nécessaire le jour venu. Mais tout de même... Vraiment personne ? Vous n’êtes pas sérieux...

    Pour conclure, j’aimerais dire ici que mon enthousiasme scriptural n’est en rien émoussé : je mobilise le maximum de forces au service de mon magazine préféré, j’ai sous le coude une poignée de liner notes à écrire à la demande de quelques musiciens qui me font confiance, chaque mois je programme et co-anime une émission de radio consacrée au jazz, j’engage de surcroît un travail régulier au sein d’un atelier d’écriture (et peut-être aussi dans le cadre d’un duo que j’aurai sans nul doute l’occasion d’évoquer), sans oublier le fait qu’un nouveau projet d’exposition alliant texte et photographie pointe le bout de son nez pour 2018. Et, bien sûr, je veux continuer à faire vivre cet espace dans les meilleures conditions, au service de la musique et des musiciens. Mais bon... je n’ai plus 20 ans, hein, alors soyez indulgents, je ferai au mieux !

  • Forever Young

    neil young, earth, promise of the realInutile de me chercher, vous risqueriez de ne pas me trouver. Je suis quelque part, pas très loin mais ailleurs... Occupé avec le nouveau disque de Neil Young, un double live qui s’appelle Earth. Je vous vois venir : encore ce type ? depuis tout ce temps ? Eh bien oui, encore lui, qu’on surnomme le loner parce qu’il a des allures de vieux loup solitaire un peu efflanqué (c’était aussi le titre d’une des compositions de son premier disque, ce qui a pu contribuer à faire naître ce surnom). Le gars du genre bougon, un peu obsessionnel aussi, qui a accumulé des paquets de disques depuis les années 60, quand il était l’un des membres de Buffalo Springfield. Et qui vous raconte, dans un récent et remarquable Very Good Trip, une émission de Michka Assayas sur France Inter, qu’il a fini par se remettre à la fumette après avoir arrêté. Avec ou sans, il s’est rendu compte qu’il restait créatif alors pourquoi se priver, je vous le demande ? C’est bien simple : si je fais une exception pour les années 80 qu’il a traversées non sans mal (comme bien d’autres d’ailleurs), j’ai une indulgence absolue pour sa musique. Et pour lui, de façon plus générale. J’ai même lu son bouquin du début à la fin. La plupart du temps, au moment où j’achète un nouveau disque de lui, je sais ce que je vais entendre, ce n’est pas la surprise qui aiguise mon appétit, mais plutôt le plaisir de retrouver un son et une voix qui, loin de satisfaire aux critères de la perfection façon télé-crochet avec jury has been, me font souvent dresser les poils des bras. C’est comme ça, je ne maîtrise pas la chose. Neil Young, c’est un musicien de chevet, si vous me passez l’expression. Présent chez moi depuis ma primo-adolescence et en particulier grâce à l’album, son deuxième en solo, Everybody Knows This Is Nowhere (sûrement mon préféré, soit dit en passant). Il durera jusqu’à ma propre fin, c’est certain.

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  • Citizen Jazz, le livre des 15 ans !

    Participez à l’édition d’un ouvrage unique et à tirage limité, disponible uniquement sur souscription : la revue des 15 ans de Citizen Jazz.

    Citizen JazzDepuis 2001, une équipe d’observateurs s’est constituée, puis soudée, étoffée, renouvelée.
    2001-2016, 15 ans à suivre en France, en Europe et dans le monde ceux qui jouent, créent, recréent, programment, partagent ces musiques vivantes.
    Chaque semaine, Citizen Jazz présente les nouveautés, de quoi lire, de quoi sortir.
    Le magazine illustre en images les concerts, met en valeur les musicien.nes et musiques et les défend.

    Plus qu’un simple média rendant compte de la vitalité du jazz, Citizen Jazz a, au fil des années, constitué un réseau, fédéré une communauté de passionnés, d’amateurs et de professionnels, tous militants. Une équipe de personnalités très différentes qui réalisent bénévolement, en plus de leurs journées de travail, un magazine hebdomadaire devenu une référence de la presse jazz francophone, avec plus de 25000 lecteurs par mois, un record en la matière.

    Pour marquer cet anniversaire, les photographes, rédacteurs, dessinateurs, vidéastes et collaborateurs réguliers de Citizen Jazz, en association avec Denis Esnault (directeur de la publication et cofondateur de la revue Irreverent) vont éditer un ouvrage unique et à tirage limité, disponible uniquement sur souscription : la revue 15 ans de Citizen Jazz.

    Il s’agit d’une revue au contenu entièrement inédit, qui revient sur les quinze années passées à rencontrer des musicien.nes, à assister à des concerts, à écouter des disques.

    De nombreuses personnalités du jazz ont participé, musicien.nes, journalistes, programmateurs, diffuseurs et plusieurs graphistes participent à l’ensemble en prenant des cartes blanches dans la revue.

    La souscription, c'est ICI : www.citizenjazz.com/Passage-en-Revue-15-ans-de-jazz.html

  • Cercles vertueux

    anne paceo, circles, tony paeleman, emile parisien, leila martialPetit retour en arrière. Lorsque Circles est sorti au mois de janvier chez Laborie Jazz, il ne faisait aucun doute qu’Anne Paceo, plus que jamais, célébrait le chant qui résonne en elle depuis sa plus tendre enfance en Côte d’Ivoire. Ce qu’a d’ailleurs expliqué cette musicienne voyageuse : « Quand j’écris un nouveau morceau, la première chose qui vient c’est toujours la mélodie. J’écris beaucoup en chantant. Ma musique est souvent reliée à des expériences, des rencontres, des mouvements intérieurs, des endroits qui m’ont marquée. Je raconte des histoires, mes histoires, sans forcement mettre des mots dessus. Pour moi la musique doit avant tout parler aux sens ». Enfant de la batterie qui a appris de son mentor Dré Pallemaerts – dont je vous recommande en passant le nouveau disque appelé Coutances, où brille de mille feux une triplette magique composée de Bill Carrothers, Jozef Dumoulin et Mark Turner – à quel point il est vital d’incarner chaque note jouée, Anne Paceo a côtoyé la fine fleur du jazz, aligné une poignée de disques gorgés de lumière, avec son trio Triphase (Triphase en 2009 et Empreintes en 2010) ou son quintet Yôkaï, sans oublier une collaboration avec la chanteuse Jeanne Added qu’elle a accompagnée sur scène jusqu’à une époque récente. Et la voici qui revient, entourée d’une nouvelle équipe dont la composition ne doit absolument rien au hasard. Car pour créer une musique qui se révèle un tant soit peu ensorcelée, encore faut-il trouver les magiciens pour la servir.

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  • « Free as a bird »

    boffo_vol_doiseaux.jpgDans les deux romans qu’il m’est arrivé de commettre (Ladies First! en 2013 et La part des anches, à paraître en septembre prochain), on peut croiser un personnage nommé Jean-Pascal Argentini. C’est un guitariste qui a enregistré une bonne dizaine d’albums et façonne un univers très poétique au deuxième étage d’une grande maison, quelque part dans une petite ville de Moselle, là où est installé son studio d’enregistrement. Parce que cet artiste-là, il faut le savoir, n’est pas seulement musicien, il est aussi ce qu’on pourrait appeler un « ingénieur amoureux du son », dont la « patte » particulière, toute en finesse et notes cristallines, est recherchée par les deux musiciennes, une chanteuse puis une saxophoniste, qui sont les personnages principaux de mes deux fictions. Je ne m’en suis jamais vraiment caché : ce Jean-Pascal Argentini est le double d’un autre Jean-Pascal, bien réel celui-là. Ce dernier exerce la plupart du temps ses talents à Clouange, dans le studio Amper (Association Musicale Pour l’Expansion du Rock) sur lequel il veille avec la plus grande attention depuis bien longtemps maintenant. Ah, j’oublie l’essentiel : notre homme s’appelle Jean-Pascal Boffo. Je suis son activité de près, mettant un point d’honneur à me procurer ses disques dès leur sortie, en règle générale directement auprès de leur concepteur. Boffo, c’est quelqu’un qui suscite la fidélité la plus absolue, lui dont le progressive folk (j’ose espérer qu’il acceptera cette définition), façonné jour après jour après une première immersion dans le rock progressif, parfois pétri d’influences Zeuhl, de groupes comme Larsen, Déjà Vu, Mandragore, Geheb-Rê ou Troll (je me permets de vous renvoyer à sa biographie si vous souhaitez en savoir plus), est habité d’une lumière dont les scintillements viennent en droite ligne des cordes de sa guitare. Cette dernière est non seulement l’instrument le plus cher à son cœur mais sans nul doute pour lui une compagne de chaque instant.

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  • Un grand voyage

    madeleine_salomon.jpgJe ferai preuve d'honnêteté en vous confiant que je me suis bien fait cueillir par ce disque. À froid, et en quelques secondes. La flèche en plein cœur ! Je m’y attendais d’autant moins que j’ignorais jusqu’à l’existence même du duo de musiciens qui lui a donné naissance. L’objet est arrivé chez moi discrètement, dans son digipack sobre à l’intérieur rouge uni. Au recto, un homme et une femme assis devant les rayonnages d’une bibliothèque croulant sous des centaines de livres. Puis j’ai entendu la voix de Clotilde Rullaud chantant a cappella « Image », une chanson de Nina Simone. Premier choc… Une voix grave, chaude, dont les intonations vespérales sont chargées d’une tension peu commune, puissamment vibratoire. C’est au niveau des tripes que ça se passe, tout de suite et du début jusqu’à la fin, pour celle qui chante comme pour celui qui écoute. Il va falloir retenir son souffle à quinze reprises pour mieux se laisser (em)porter par un duo que la chanteuse flûtiste forme avec le pianiste Alexandre Saada, dont le jeu tout en retenue, aux accents méditatifs, est le contrepoint parfait de son chant habité. Tous deux ont choisi de s’appeler Madeleine & Salomon et de tisser en mode mineur une toile de l’envoûtement, celle d’un univers de l’intime qui se définit comme une célébration fervente de grandes voix féminines. Leur premier album s’appelle très justement A Woman’s Journey, qu’on pourra traduire par « le voyage d’une femme » ou, plus largement, « un voyage au pays des femmes ». Nina Simone, Joan Baez, Billy Holiday, Janis Joplin, Minnie Riperton, Janis Ian, Elaine Brown, Joséphine Baker, ...  Artistes majeures, voix puissantes. Autant dire qu’on se situe ici à des années-lumière de toute mièvrerie, aux antipodes d’une tentation « variétés » insipide bêtement chantée comme il en coule encore tant dans les veines fatiguées de notre petit monde médiatique et mercantile.

    Je me sens par exemple incapable de résister à la beauté formelle et hypnotique de « Swallow Song », quand le motif tournoyant du piano d’Alexandre Saada enlace de ses circonvolutions la voix de Clotilde Rullaud que le pianiste double lui-même de la sienne. Et sans vous accorder le moindre répit, « All The Pretty Horses » s’élève du plus profond d’une nuit magnétique qui pourrait être la dernière. On me pardonnera un propos qui pourrait sembler excessif, mais ce A Woman’s Journey ressemble à s’y méprendre à un rêve éveillé, une déambulation mystérieuse au pays de la beauté. Parce que tout ce qui va suivre est de la même intensité, sans qu’il soit possible de se livrer à un quelconque et vain classement entre toutes ces chansons si belles, au milieu desquelles se glissent deux brefs intermèdes instrumentaux. Pas de temps mort, jamais. Ces deux-là sont en état de lévitation, pour ne pas dire en état de grâce. Leurs versions de « At Seventeen » ou « Strange Fruit » sont d’autres exemples flagrants de cette perfection dans l’émotion. Voix et piano comme un acte d’amour d’une infinie pudeur. Celle-ci s’exprime aussi dans l’entre-notes, ces silences que le duo sait ménager pour mieux élever sa musique et parler au cœur en ligne directe, comme sur le nocturne « Four Women ».

    Je n’irai pas par quatre chemins : je suis sorti bouleversé de chacune des écoutes de A Woman’s Journey, conscient que deux âmes étaient entrées en communion avec les engagements de ces femmes majeures – ces grandes voix – et qu’elles avaient en outre réussi à se connecter à la nôtre. En anglais, « âme » se dit « soul ». Clotilde Rullaud et Alexandre Saada ont déjoué tous les pièges d’un simple album de « reprises » pour accomplir un émouvant voyage intérieur et réussir par là-même à définir à leur manière une soul music de toute beauté.

    Allez-y, entrez dans le monde de Madeleine & Salomon, vous allez aimer.

  • Grande traversée

    equal_crossing.jpgJe crois pouvoir dire que j’attendais ce disque depuis un petit bout de temps maintenant. J’entends par là qu’après l’avoir écouté une première fois – pour ne pas dire au bout de quelques minutes seulement – j’ai eu la certitude d’une rencontre comme j’en rêve souvent, mais dont la réalisation est plus ou moins probable. Car vous le savez aussi bien que moi, il y a parfois une petite différence entre rêve et réalité, malheureusement. La dernière fois qu’il m’est arrivé de faire coïncider à ce point les deux, c’était l’année dernière, lors de la publication d’Europa Berlin par l’ONJ, sous la direction d’Olivier Benoit. Ou la sensation inexplicable de me trouver face à un objet artistique qui va me nourrir pendant un très long moment. C’est une question de synchronisme, d’alignement presque parfait entre le niveau de mes questionnements et les réponses qu’un musicien peut leur apporter. C’est toute l’histoire d’un disque qui se présente comme le marqueur de l’adéquation entre un émetteur et un récepteur. Comprenez bien : je ne prétends pas ici que le nouveau disque en quartet du violoniste Régis Huby provoquera chez vous une réaction identique à la mienne. Je n’en sais absolument rien, même si je vous le souhaite, alors qu’à l’évidence vous êtes forcément différents de moi. Mais une chose est certaine : Equal Crossing, publié sur le label Abalone, à la destinée duquel veille ce musicien multidimensionnel, vient à notre rencontre à la façon d’un miroir. Lorsque je l’écoute et que je ferme les yeux, j’ai la conviction d’avoir été percé à jour et qu’on a voulu me faire un beau cadeau. Rien qu’à moi. C’est à moi qu’il parle. Et je sais que je ne suis pas seul à le vivre ainsi.

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  • Traces profondes

    Traces.jpgIl faut quelques secondes à peine pour se sentir happé par cette musique et ses « Poussières d’Anatolie ». C’est une conjonction de forces terriennes, comme une secousse qui fait trembler le sol sous vos pieds, qui vous prend aux tripes, par surprise, sans vous accorder le temps d’accepter ou de refuser d’en être. D’emblée, c’est une une contrebasse sous tension qui creuse un sillon profond, un saxophone baryton entêtant et l’obsession rythmique d’une guitare qui vous captent. Et comme paraissant voler au-dessus d’eux, un saxophone soprano virevolte à vous donner le tournis. Pas moyen de se défaire de l’idée que le chemin sera étourdissant même s’il promet d’être escarpé. Et voilà, surgie de nulle part, une voix de femme qui exhorte hommes, femmes et enfants – « Allez ! Ouste ! » – à avancer sur un chemin poussiéreux où le répit accordé sera rare. Où sommes-nous ? Où allons-nous ? C’est toute la question que semble poser un disque décidément habité de mille histoires de vie...

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  • On Air... elle !

    airelle_besson_radio_one.jpgJe me demande si je ne vais pas oser glisser dans les premières lignes de cette notule un soupçon de vulgarité, certes fugitif mais... je dois bien vous confier que [Radio One], le nouveau disque de la trompettiste Airelle Besson, qui va très vite voir le jour sur le label Naïve, m’a, comme on dit, mis sur le cul ! Oui oui, vous avez bien lu le gros mot : sur le cul... Bluffé. Emballé. Émoustillé. Conquis. Il doit exister d’autres adjectifs pour qualifier l’état de ma satisfaction, je vous laisse les chercher parce que je vous sais curieux de la synonymie... Non que jusque-là je fusse ignorant du talent de cette musicienne qu’on a pu écouter aux côtés de différentes personnalités passionnantes telles que Bruno Reignier, Alban Darche, Laurent Cugny, Édouard Ferlet ou encore Didier Levallet ; ou être l’actrice de dispositifs tels que son duo avec le guitariste Nelson Veras ou le quintet Rocking Chair dans lequel évoluait, entre autres, un certain Sylvain Rifflet. Tout cela, je le savais bien. À titre plus personnel cette fois, je peux même vous confier que son chemin a croisé celui de mon propre rejeton de saxophoniste puisque tous deux jouaient, le temps d’un « Amazing Grace » sur Twelve Secrets Of A Lady, de la chanteuse Sophie Darly. Donc j’étais bien conscient des nombreuses qualités d’une artiste ayant vécu à Oxford durant les premières années de sa vie. Mais là, il se passe un petit quelque chose qui tape dans le mille avec une précision d’horlogerie. La petite flèche en plein cœur... Ce qu'a par ailleurs fort bien expliqué Matthieu Jouan dans les colonnes de Citizen Jazz.

    Les symptômes de cette douce maladie sont assez aisés à identifier, en voici quelques-uns. À peine avez-vous terminé l’écoute des cinquante-trois minutes de [Radio One] qu’il vous tarde de remettre la musique en marche. Ça ne peut pas attendre. Et hop, le disque tourne à nouveau, en boucle. Nécessité oblige. En deux temps trois mouvements, cette même galette fait par ailleurs l’objet d’un clonage dans votre téléphone intelligent et devient le compagnon privilégié de votre marche urbaine et néanmoins quotidienne. Finie la grisaille citadine et la laideur des visages automobilistiques, oublié l’air vicié de la cuvette locale, snobées les trottinettes assassines, contournées les crottes de chien, vous êtes en possession de la parade absolue. Ça coule délicieusement dans vos oreilles. Un peu de douceur dans ce monde de brutes... Une sortie en voiture, une poignée de kilomètres à parcourir ? Comme par hasard, en ouvrant la console centrale qui sépare les deux sièges avant, votre main innocente attrape le CD pour le glisser avec autorité dans le lecteur. Allez savoir pourquoi c’était celui-là qui phagocytait le sommet de la pile, mystère...

    C’est un peu comme s’il y avait eu chez Airelle Besson une sorte d’alignement des planètes. Un moment rare. On frise la perfection instrumentale, l’équilibre des forces en présence impose le respect, les couleurs sonores sont rien moins que lumineuses. Tout est en place. Airelle Besson le dit elle-même : « Dès les premières répétitions en janvier 2014, un son a émergé ». Et cette fois, c’est un quatuor qui est en action pour livrer neuf compositions qu’on pourrait – mais ce n’est pas une obligation, faites comme bon vous semble – ranger en deux catégories principales. Il y a d’un côté une série de thèmes plutôt joyeux, presque sautillants dont la première des vertus est de vous entraîner, presque malgré vous, à les fredonner très vite : « Radio One », « The Painter And The Boxer », « Candy Parties », « No Time To Think ». Confiez-moi les clés des ondes et je vous fais de la première un hit single en deux temps trois mouvements. On peut rêver, non ? Et puis les autres (« All I Want », « La galactée », « Around The World », « People’s Thoughts », « Titi »), beaucoup plus éthérées, un brin féériques pour ne pas dire planantes à certains moments. Tout au long du disque, on passe d’un climat à l’autre dans un seul souffle heureux et on se laisse embarquer par quatre musiciens en état d’apesanteur. [Radio One] a de faux airs d’un rêve éveillé, attrapé au vol avec la maestria qu’on lui connaît par Gérard de Haro au Studio La Buissonne.

    Parlons des musiciens, aussi. Airelle Besson forcément, qui a composé tout le disque, paroles en anglais incluses. Trompettiste fluide, jamais invasive mais toujours habitée, dont le lyrisme de velours trouve en Isabel Sörling une complice qu’on aurait envie de qualifier de naturelle. Cette chanteuse suédoise (dont on a déjà pu apprécier toute la saveur vocale dans le récent Moondog, hommage au Clochard Céleste par Cabaret Contemporain paru à la fin de l’année dernière chez Subrosa) est l’autre source enchantée de [Radio One]. C’est incroyable comme ces deux-là se trouvent sans se chercher, qu’elles chantent d’une même voix ou qu’elles se répondent l’une l’autre. Elles dansent sur la musique, elles semblent sur un petit nuage. Il faut dire aussi qu’elles peuvent compter sur les talents conjugués de Fabrice Moreau et Benjamin Moussay. On connaît les vertus coloristes du premier, batteur souple tout aussi apte à suggérer des motifs qu’à veiller sur la bonne tenue du tempo. Quant au second, il faut admirer sa capacité à se démultiplier et à agencer l’environnement harmonique. Son omniprésence aux claviers (parmi lesquels un synthétiseur basse) force le respect. Lui aussi est un peintre, doublé d’un architecte imaginatif et d’un inventeur de textures sonores. Magistral Moussay !

    Airelle Besson et son quartet seront les prochains invités du Manu Jazz Club au Théâtre de la Manufacture à Nancy. Et les derniers de la saison, de surcroît. Ils feront suite aux Shakespeare Songs de Guillaume de Chassy, Andy Sheppard et Christophe Marguet, qui ont su subjuguer un public venu nombreux une fois encore. Vous imaginez quelle chance cela peut être pour les amoureux de la musique vivante ? Mieux que le disque, la scène et ses vibrations irremplaçables. Tiens, c’est bien simple, j’en frémis déjà d’aise et je me réjouis par avance d’une soirée qui ne pourra qu’être réussie... et trop courte, ça ne fait aucun doute ! Fort heureusement, la fête durera encore longtemps grâce à ce disque habité par une grâce mélodique des plus séduisantes.

    Ah, et puis, j'ai oublié de vous dire... [Radio One] est peut-être un disque de jazz. Ou peut-être pas. Je vous laisse juges. On s'en moque après tout, parce que c'est d'abord un disque qui chante de la première à la dernière minute.

  • Marche ou rêve

    sebastien_texier_dreamers.jpgJe ne sais pas si Sébastien Texier sera d’accord avec moi, mais à l’écoute de Dreamers, son nouveau disque en quartet publié sur le label Cristal Records, j’ai ressenti illico un petit je-ne-sais-quoi qui avait de faux airs d’une épiphanie. Au sens le plus littéraire du terme, qu’on pourra expliquer comme « une prise de conscience de la nature profonde d’un événement ». Rien de religieux donc dans ma perception, mais plutôt le sentiment de me retrouver face à un musicien s’exposant au plus près de ce qu’il est vraiment, en toute sérénité. Dreamers est, je crois, le quatrième disque en leader de ce saxophoniste clarinettiste qui, pour fils du grand Henri Texier qu’il puisse être, n’en est pas moins avant tout un artiste dont la personnalité paraît grandir et s'affirmer au fil des années. Le voici qui avance avec une maturité qui le place définitivement comme un des musiciens importants de la scène jazz française. Il m’est d’ailleurs arrivé d’évoquer le sujet de la relation familiale avec son père et je peux témoigner ici que ce dernier n’a jamais manifesté une indulgence particulière à l’égard de son fils, tant il est vrai qu’il apprécie avant tout chez celui-ci le musicien, qui est de toutes ses aventures depuis plus de vingt ans. Si ma mémoire ne me trahit pas, il faut remonter à l’album Mad Nomad(s) enregistré en 1995 par le Sonjal Septet pour trouver la première trace discographique de l’association Texier père et fils. Pour Sébastien le leader, il y eut donc Chimères en 2004, Don’T Forget You’re An Animal en 2009 et enfin Toxic Parasites en 2011. Je vous ferai grâce des innombrables collaborations qui ont émaillé son parcours pour attirer sans plus attendre votre attention sur ce disque dont la grande fraîcheur m’enchante depuis plusieurs semaines maintenant.

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  • Matricule AYLCD-149

    sarah murcia,never mind the future,sex pistols,never mind the bollocks,ayler recordsCette petite chronique pourrait vite ressembler à un foutoir si je n’y prenais garde. Parce que j’aimerais aujourd’hui dire deux ou trois mots au sujet de Never Mind The Future, disque enregistré par la contrebassiste Sarah Murcia, dûment entourée de son groupe Caroline augmenté de deux unités pour l’occasion, soit une belle brochette de musiciens iconoclastes pour une relecture assez inattendue de Never Mind The Bollocks, l’unique album des Sex Pistols dont la parution en 1977 avait quelque peu fait chavirer certaines âmes sensibles du côté de la perfide Albion.

    Mais parler d’un tel disque, c’est aussi rappeler l’existence de ce valeureux label qu’est Ayler Records, dont j’ai déjà souligné tant la qualité du travail fourni par Stéphane Berland qui veille sur sa destinée avec un soin amoureux, que la diversité des couleurs d’une écurie qui peut, en quelques mois et trois références successives portant les numéros 147, 148 et 149, vous entraîner dans la nuit un peu glacée de l’Abbaye de Noirlac avec le Quatuor Machaut, histoire de vous donner à entendre une version pour quatre saxophones de la Messe de Notre Dame, chef d’œuvre du XIVe siècle signé Guillaume de Machaut, avant de vous entraîner du côté du Triton, aux Lilas, pour affronter la brûlure du guitariste Marc Ducret, dont le trio formé avec Bruno Chevillon et Eric Echampard se voit renforcé de trois soufflants ébouriffants que sont Fabrice Martinez (trompette), Christophe Monniot (saxophones) et Samuel Blaser (trombone) à l’occasion d’un Metatonal chauffé à blanc sur la pochette duquel les exégètes de la cause du rock progressif n’auront pas manqué de repérer un drôle de renard immortel à neuf queues déguisé en femme leur rappelant la pochette d’un vieux disque de Genesis, pendant que les amoureux de Bob Dylan comprendront vite qu’avec « 64 », composition célébrant l’année où Marc Ducret à découvert les titres de Mister Zimmerman, ils pourront retrouver, joyeusement intriqués dans un corps à corps sensuel, deux thèmes de leur héros, « The Times They Are A Changin’ » et « Wigwam ». Mine de rien, soit dit en passant, vous venez de lire une phrase comptant à elle-seule 1502 signes. Je vous en félicite...

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  • Accélérations amoureuses

    in_love_with_axel_erotic.jpgJ’ai l’impression très nette que Sylvain Darrifourcq est en train de devenir l’un des pensionnaires les plus marquants de l’auberge des Musiques Buissonnières... Il a désormais son rond de serviette à cette table. Je ne vais pas vous réécrire toute son histoire – aujourd’hui, quand on veut savoir, on peut – mais seulement vous rappeler qu’il m’est arrivé à quatre reprises au moins de saluer le talent de ce musicien singulier. Ce qui ne constitue qu’un modeste échantillon du bouillonnement créatif d’un personnage très attachant, sachez-le... Je me souviens par exemple d’Apoptose, son duo avec le saxophoniste Akosh S. ; mais aussi de Spezial Snack, quatrième petite folie du quartet d’un autre saxophoniste, et pas des moindres, j’ai nommé le génial Émile Parisien ; sans oublier un étourdissant trio formé avec le pianiste Xavier Camarasa et le violoncelliste Valentin Ceccaldi dont le nom, MILESDAVISQUINTET! en forme de trompe l’œil (mais aussi de trompe la trompe, si vous me passez cette expression assez auriculaire quoique manifestement éléphantesque) en étonnera plus d’un ; et puis, tout récemment, encore un trio, sobrement intitulé Hermia / Ceccaldi / Darrifourcq celui-là, et qu’il nous a fallu suivre sur la piste incertaine d’un God At The Casino...

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  • Protojazz

    stantchev-martin-gottschalk.jpgOn ne va pas se mentir... Voilà bientôt onze ans que je consacre une part non négligeable de mon temps à gribouiller sur mon blog de trop longues phrases très souvent consacrées à la musique ou à ses protagonistes. Jusqu’à une période récente (pour être précis le 2 janvier dernier, soit le jour où j’ai reçu le disque dont il est question aujourd’hui), je n’avais jamais entendu parler d’un certain Louis Moreau Gottschalk, pianiste compositeur ayant traversé le XIXème siècle à la vitesse de l’éclair. Je préfère jouer la carte de l’honnêteté en affichant mon ignorance plutôt que celle du cuistre auprès de mes lecteurs, qui ne m’en voudront pas d’exposer ainsi une lacune coupable. Je ne suis pas omniscient, juste un récepteur imparfait... Deux musiciens on ne peut plus contemporains, Mario Stantchev et Lionel Martin, ont décidé de se réapproprier, près de cent cinquante ans après sa mort, le répertoire de celui qui me fut (trop) longtemps inconnu. Publié sur le label Cristal Records, leur disque porte le titre évocateur de Jazz Before Jazz : une façon de nous faire comprendre que, sans être précisément un « grand-père du jazz », Gottschalk est à considérer selon eux comme « le chaînon manquant reliant la musique savante occidentale et ce qui deviendra le jazz quelques décennies après sa mort ».

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  • Corps à cordes...

    helene labarriere, hasse poulsen, hasse poulsen, innacorJ’aime beaucoup le portrait d’Hélène Labarrière que brosse le tromboniste Yves Robert : « Contrebassiste rousse aux collaborations musicales aventureuses. Une grande musicienne créative à l’affût de vocabulaires nouveaux ». On ne saurait mieux résumer la personnalité d’une artiste tout autant amoureuse des mélodies de toutes époques que des territoires musicaux restant à explorer, seule ou bien accompagnée. Qu’elle joue en solo, l’occasion pour elle de revisiter entre autres le répertoire de la chanson française ; en duo avec Violaine Schwartz (actrice, romancière et chanteuse) pour célébrer ce qu’on appelle la chanson réaliste du début du XXe siècle ; qu’elle scrute dans l’ensemble Dédales de Dominique Pifarély la belle géographie du temps du violoniste (je fais ici allusion au disque Time Geography, qui est une spendeur) ; qu’elle se produise en trio avec François Corneloup au saxophone baryton et Simon Goubert à la batterie, ou dans son propre Désordre avec, outre Corneloup, Christophe Marguet à la batterie et Hasse Poulsen à la guitare... Hélène Labarrière est un chant à elle-seule. Alors nul ne sera surpris de la retrouver en duo avec le même Hasse Poulsen pour Busking, un disque parmi les plus attachants de ce début d’année 2016 et qui voit le jour sur le label breton Innacor.

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  • L’éthique de l’orchestique

    orchestique, possible(s) quartet, remi gaudillat, fred roudet, loic bachevillier, laurent vichard, instant music recordsC’était il y a un peu moins de trois ans. Le trompettiste Rémi Gaudillat – pensionnaire régulier des Musiques Buissonnières, en raison notamment de sa collaboration fructueuse avec Bruno Tocanne, un autre habitué de ma petite auberge scripturale – publiait sur le label Instant Musics Records un disque en quartet intitulé Le chant des possibles. Il emmenait avec lui une formation atypique puisque composée exclusivement d’instruments à vent, dont les officiants ressemblaient à s’y méprendre à une bande d’amis (ce qu’ils sont, à n’en pas douter) : Fred Roudet (trompette, bugle), autre fidèle de la maison Tocanne, récemment au générique de l’enthousiasmant (et unanimement salué) Over The Hills ; Loïc Bachevillier (trombone) lui qui, non content d’être de l’aventure de The Amazing Keystone Big Band depuis plus de cinq ans, est aussi le complice de Gaudillat dans une célébration de Lester Bowie judicieusement nommée Docteur Lester ; Laurent Vichard (clarinettes), enfin, musicien aguerri formé à l’école classique mais adepte du jazz et des musiques improvisées et par ailleurs l’un des compagnons du théâtre Turak (qui présente depuis quelque temps une Carmen en Turakie d’après l’œuvre de Georges Bizet).

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  • MédoO’s brew

    médéric collignon, jus de bocse, moovies, jazz, funkNe me demandez pas pourquoi je n’ai pas consacré la moindre ligne à Médéric Collignon au cours des années passées. Je serais bien incapable de fourbir une explication raisonnée. Je n’en sais fichtre rien. Pourtant, y a de la matière à phrase avec ce lascar, on pourrait laisser filer le stylo ou le clavier pendant des heures pour tenter de cerner un musicien décidément pas comme les autres. Une sorte de planète à lui tout seul... Surtout que cet adepte, que dis-je, ce prosélyte du cornet n’a jamais eu besoin du moindre piston pour se hisser au sommet du jazz funk électronique survolté et atypique qui est sa marque de fabrique. Un silence que je vous autorise à qualifier d’injustice. Il faut dire que le personnage est – comment dire ? – du genre pas facile à ranger dans une case, qu’il appartient à la catégorie des grandes gueules qui n’hésitent pas à la ramener quand bon leur semble. Au risque, parfois, de se fabriquer subséquemment des inimitiés tenaces dont il se bat probablement l’œil avec une queue de sardine, comme aurait dit autrefois un de mes inutiles enseignants universitaires en marketing. Je soupçonne même certains écriveurs jazzifiants d’avoir dans la tête une petite réserve de chroniques acerbes visant à exécuter par avance des disques dont l’idée n’a même pas encore germé dans la tête de celui qu’on surnomme Médo. Médéric Collignon, un type pas comme les autres, un agité du cornet, un tricoteur de cordes vocales, un trafiquant de bidouilleries sonores et autres beatboxes dont il a le secret et qu'il aime par dessus tout, car tel est son bon plaisir, inoculer à ses créations ou celles des musiciens qu’il a côtoyés sans jamais engendrer autre chose qu’une électrisation instantanée de leurs univers musicaux. Il est entier, ne cherchez pas à en faire le tour, vous n’y parviendrez pas. Vous l’aurez à peine approché qu’il vous aura déjà filé entre les oreilles, à la vitesse du Road Runner de Tex Avery.

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  • Danseurs célestes

    texier_henri_sky_dancers.jpgSi mes comptes sont exacts, Sky Dancers est le dix-huitième disque qu’Henri Texier publie en tant que leader chez Label Bleu. Une longue et belle série qui retrace un large pan de l’histoire du contrebassiste – dont l’origine remonte aux années 60 – depuis La Compañera en 1989. À tous ces enregistrements, il faut bien sûr ajouter les quatre productions du trio Romano-Sclavis-Texier, qui couvrent la période 1995-2011, ainsi que le troisième et ultime album d’un autre trio formé avec François Jeanneau et Daniel Humair, Update 3.3 en 1990. Voilà donc un musicien fidèle qui élabore, année après année, une œuvre d’une grande cohérence dont l’homogénéité et la constance forcent l’admiration. Cette fidélité a d’ailleurs été récompensée en 2008 par une compilation sous la forme d’un double CD intitulé Blue Wind Story qu’on peut recommander à celles et ceux qui souhaiteraient pousser la porte de son domaine. Et pour peu qu’on s’accorde le temps d’un retour en arrière et d’une écoute attentive de toutes ces pages de musique écrites avec une passion inaltérable, qui se nourrit autant d’une révolte devant la violence des hommes que d’une admiration sans bornes pour les beautés que notre monde peut offrir, alors la conclusion s’imposera vite : Henri Texier est un artiste essentiel, qui vient de fêter son soixante-et-onzième anniversaire et qu’il s’agit de célébrer de son vivant. On a trop souvent l’occasion de louer, à grand renfort de « RIP », le talent des grands au moment où ils nous quittent qu’il serait absurde de ne pas rendre hommage dès à présent à celui qui est bien vivant. Surtout que son nouveau disque, Sky Dancers, est très certainement l’un de ses plus beaux.

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  • « Songs » d’une nuit d’été…

    shakespeare songs, guillaume de chassy, christophe marguet, andy sheppard, kristin scott-thomas, Voilà encore une réussite – et pas des moindres – à mettre au crédit d’Abalone Productions, label sur la destinée duquel veille l’éminent Régis Huby. Le violoniste n’est toutefois pas à la manœuvre musicale des Shakespeare Songs dont la paternité revient à un duo formé par le pianiste Guillaume De Chassy et le batteur Christophe Marguet. Ces deux-là travaillent ensemble depuis quelques années déjà et prennent un plaisir non dissimulé à explorer des territoires musicaux variés, qui unissent dans un même élan compositions originales, chansons françaises des années 30 ou encore musiques improvisées. Piano et batterie, autant dire une formule sonore qui les pousse à investir quand il le faut le champ des possibles de l’autre : si le premier instrument est naturellement harmonique, il peut et doit s’emparer du rythme et de la pulsation pour faire bonne mesure dans un contexte où chacun s'efforce d'occuper au mieux l’espace rendu disponible par le nombre restreint des protagonistes. On peut compter sur la main gauche de Guillaume De Chassy pour prendre une telle mission à son compte, ce qu’elle fera avec d’autant plus d’aisance que la batterie de Christophe Marguet – on le sait depuis un petit bout de temps maintenant – est elle-même une source mélodique au même titre qu’une force de frappe. A ce niveau d’interaction, un duo est, quand on s’y songe, bien plus qu’un duo. C'est un orchestre.

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  • Black Starman ou le voyage d'hiver de David Bowie

    bowie_black_star.jpgJe suis très ennuyé. Et bien triste aussi... Dimanche après-midi, j’avais écrit quelques pages au sujet de Black Star, le nouveau disque de David Bowie, publié le jour-même de son soixante-neuvième anniversaire. Et ce faisant, j’en profitais pour rapprocher quelques temps forts de sa discographie (je n’ai jamais eu l’occasion de le voir sur scène) de ma petite histoire personnelle. Et voilà que David Jones nous quitte. J’ai appris cette nouvelle brutale lundi matin, dans la Matinale Culturelle de France Musique. Les hommages n’ont pas manqué de déferler... Les exégètes de tout poil (y compris ceux qui le brocardaient autrefois, j’ai des noms) dissèquent sa foisonnante et longue carrière (un demi-siècle, tout de même), en égrènent les hauts faits pour mieux surligner la dimension iconique d’un personnage protéiforme et presque surnaturel. Soixante-neuf, pas un âge pour mourir, bordel ! Après mure réflexion pendant deux jours, j’ai choisi de vous proposer la lecture de mon texte, qui ne vous apprendra rien d’important et ne changera absolument rien à la vie de ce monde, pas plus qu’il ne fera revenir Bowie à la vie (même si comme quelques autres, j'attends son imminente résurrection au quatrième jour), j’en conviens, mais sera une manière pour moi de rendre hommage à un chanteur qui m’aura accompagné durant toute la période commençant à mon adolescence, jusqu’à mon entrée dans le monde des adultes. Ce n’est pas rien, dans une vie.

    Voici donc ce que j’écrivais dimanche. Notez que si parfois je m’exprime au passé, ce n’est pas en raison de je ne sais quel talent prémonitoire, mais tout simplement parce que la musique de David Bowie me renvoie à une époque bien lointaine maintenant... donc à mon passé ! C’est un peu foutraque, je pensais y revenir pour faire une petite toilette à mon texte, mais non. Je le laisse en l’état, avec ses paragraphes qui pourraient être présentés dans un ordre différent, ses phrases certainement bancales et ses idées mal ordonnées. J’ai mis en évidence la partie de texte écrite en premier. Pour le reste, c’est trop tard.

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  • Panem et Circum-Disc

    toc_qeqert.jpgCes trois-là sont quand même de sacrés phénomènes, déjà cités au « tableau d’honneur » de mes écrits aléatoires. C’était au mois de mars dernier, quand le trio TOC a publié un troisième disque assez redoutable, dont le caractère obsessionnel, la démesure et la radicalité avaient quelque chose de décoiffant. C’est d’ailleurs le titre que j’avais choisi pour illustrer ma note. Normal après tout, puisque cette production atypique s’intitulait Haircut. J’avais résumé cet objet sonore non identifié de la façon suivante : « Cette musique dépasse le temps, elle vise au paroxysme, parce qu’il est plus risqué, semble-t-il, de s’arrêter en chemin que de poursuivre une route, certes dangereuse, mais promesse d’un ailleurs à découvrir, quelles qu’en soient les irradiations collatérales ». C’est vrai qu’on pouvait ne pas sortir indemne d’un disque électrochoc et trouver dans cette masse sonore animée d’un mouvement frénétique et implacable de quoi frémir pour un petit bout de temps. Janvier 2016 : voilà que Jérémie Ternoy (piano), Peter Orins (batterie) et Ivann Cruz (guitare) remettent le couvert : et s’ils laissent tomber un acronyme laissant penser que leurs santés mentales étaient susceptibles de connaître des défaillances, c’est pour mieux assumer leurs incartades et se présenter en leurs noms propres. Ils choisissent en outre – je vois là une manière de taquinerie – de compliquer notre tâche oratoire en optant pour un titre plutôt imprononçable : Qeqertarsuatsiaat ! régnant sur un album publié chez Circum-Disc, un label basé du côté de Lille et qu’on connaît pour être habitué des séances d’ébouriffage musical, pour notre plus grand bien. C’est vrai, non ? Entre une vieille pièce qui sent le renfermé et une séance au grand air, vous choisiriez quoi ?

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