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Musiques buissonnières - Page 38

  • Floral

     

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    Je travaille actuellement, durant mes heures libres, au développement d’un petit site Internet que le conseil municipal d’un village lorrain m’a demandé de créer. Étonnamment, et après de longues semaines de maturation cérébrale pendant lesquelles j’étais dans l’incapacité absolue de visualiser en moi le début d’un commencement de réalisation, la maquette que j’ai finalement réussi à faire naître de mes ruminations me plaît. Parce qu’en règle générale, je ne suis jamais satisfait de mon travail, quel qu’il soit, et c’est toujours après que je pense à tout que j’aurais pu ou dû faire. Mais pour l’heure, il me semble avoir respecté l’esthétique très florale qui fait l’identité de ce village. Reste à savoir si mon projet conviendra à ses commanditaires : quelle importance après tout ? De toutes façons, je n’en imagine pas d’autre pour l’instant !
  • Notice

    Je ne suis pas très à l’aise avec les notices, en général. Ou plutôt, je devrais dire que j’ai tendance à ne pas les lire avant d’utiliser un produit ou de procéder au montage d’un objet lâchement parvenu en pièces détachées. Il y a chez moi quelques souvenirs cuisants, comme celui de l’installation d’un vélo d’appartement (c’était il y a plus de deux ans et même que personne n'avait pigé le jeu de mot musical dans le titre de la note…). Tout récemment, j’ai entrepris une lutte acharnée contre l’inhalateur d’un produit supposé éradiquer une toux persistante mutant perversement en bronchite un tantinet asthmatiforme. Tu parles… Il est où le truc où on appuie pour vaporiser ? Je démonte le biniou, comme je peux, y a bien une cartouche sous pression qui expulse un petit nuage quand on appuie dessus mais dès que je referme l’engin, je ne vois pas comment on vaporise. Il est où le bouton pressoir ? OK, faut secouer… Je secoue. Et ensuite ? Rien. Ce machin ne veut pas délivrer son remède miracle. Pas moyen de déchiffrer quoi que ce soit sur le bout de papier plié dans la boîte, illisible parchemin. Y a que des traits gris, tout petits. Et pris d’une inspiration subite, je chausse mes lunettes de vieux et je vois ces lignes obscures se transformer en phrases. Ah ouais, là ils expliquent tout : tu secoues bien l’inhalateur, tu expires à fond comme un malade et ensuite, tu te le mets dans la bouche et tu inspires encore plus à fond et t’arrêtes de respirer pendant dix secondes (m’en fous, je peux tenir deux minutes à ce petit jeu, sans entraînement, et toc !). OK OK, mais on appuie où ? Doit bien y avoir un endroit où on pousse en même temps qu’on inspire, non ? Ben non, on n’appuie pas, justement : la puissance de ton inspiration déclenche automatiquement le largage du produit au fond de tes poumons. Même que ça s’appelle Easi-breathe cette technique ! Et que sur le carton, il est écrit : lire attentivement la notice avant utilisation. Z’ont juste oublié de dire qu’il fallait mettre ses lunettes… et que je serais contrôlé positif si jamais je participe à nouveau au Tour de France.

  • Evocation

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    Je viens de recevoir le coffret Zünd Studio qui propose l’ensemble des enregistrements en studio de Magma, auquel s’ajoute un double CD d’archives inédites. Douze disques au total, pour une belle rétrospective agrémentée de livrets très bien documentés s’appuyant pour l’essentiel sur une longue série d’entretiens donnés voici quelques années par Christian Vander à son ami Jad Ayache. En extrayant ce bel objet de son emballage, j’ai immédiatement effectué un rapprochement visuel avec le rayon de ma discothèque consacré à John Coltrane. Quoi de plus normal, me dira-t-on, quand on sait le culte que l’inspirateur de Magma voue au saxophoniste ? Il y a en effet, on peut le vérifier, un vrai petit clin d’œil esthétique lancé par Seventh Records et Le Chant du Monde au label Impulse, pour le compte duquel John Coltrane enregistra de 1961 à 1967, c’est-à-dire jusqu’à la fin.

  • Convergences

    Dans son numéro de décembre, le magazine Jazzman interroge l’animateur Frédéric Taddeï sur sa relation au jazz. Je relève dans ses propos bien des observations que je pourrais reprendre à mon compte. Quelques citations :
    « Il est important de savoir par quelle porte entrer dans une œuvre aussi foisonnante et contrastée que celle de Miles. Et c’est mieux si on a un guide… ». J’ai eu besoin quant à moi d’un tel guide pour comprendre le cheminement de Coltrane.
    « Je ne conçois le jazz en concert que dans un club… ». Idem pour moi, sauf que Taddeï veut ce club enfumé alors que l’éviction de la tabagie passive est pour moi comme beaucoup d’autres une aubaine.
    « Lorsque j’ai découvert le jazz (…), il a fallu que je me refasse l’histoire, comme je le fais toujours quand j’aime quelque chose ». Ce n’est pas le passionné de musique, fouineur d’intégrales, qui dira le contraire.
    « Je viens du rock, le jazz est arrivé ensuite ; j’ai des références binaires, un peu bébêtes. Et depuis que je connais le second, je trouve le premier un peu limité ». Là, je suis moins d’accord, il y a énormément de richesses dans le monde du rock, dont le cadre formel peut parfois paraître plus simpliste, mais cette musique véhicule une énergie essentielle lorsqu’elle est portée par des musiciens habités.
    « Je suis toujours heureux d’entendre des traces de soul, de rock, ou même de variété. Le jazz a cela de formidable qu’il peut transcender n’importe quelle mélodie » : tu l’as dit, Taddeï !

  • Chaleureux

    sixun_palabre.jpgUne grisaille dominicale couvre d’un épais matelas  tristounet le ciel lorrain… Voilà donc une excellente occasion de fourbir cette belle arme ensoleillée qu’est Palabre, le nouveau disque du sextet français Sixun. Dix ans après Nouvelle Vague, on n’espérait plus que ces héritiers de Weather Report vinssent nous délivrer un disque aussi réussi. Il y avait bien eu ce concert à la Cigale en 2005, mais depuis, on ignorait si cette aventure fusionnelle de plus de vingt ans tournerait une nouvelle page. C’est fait et bien fait, alors soleil !

    Alain Debiossat (saxophones), Louis Winsberg (guitare), Jean-Pierre Como (claviers, piano), Michel Alibo (basse), Paco Sery (batterie), Stéphane Edouard (percussions) + invités, dont Pierre Bertrand aux arrangements.

  • Prêts

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    Photo Vander / Top © Jacky Joannès

    Un ami photographe, spécialiste des instantanés pris sur le vif des concerts, est venu m’apporter l’autre jour quelques unes de ses dernières prises. Parmi celles-ci, j’ai retenu ce moment, capté lors d’une répétition d’un concert de Magma à Nancy, le 9 octobre 2007. Les deux frères jumeaux en musique – Christian Vander à la batterie, Jannick Top à la basse – semblent prêts à livrer un nouveau combat. Le regard du premier est déjà tourné vers l’ailleurs, celui de la planète Kobaïa probablement, pendant que le second paraît comme illuminé par un astre lointain avant d’aller frotter ses cordes à la musique des sphères. L’intensité des retrouvailles, la complicité un temps perdue – une petite trentaine d’années seulement – avant un retour gagnant (comme ces minutes d’anthologie sur Infernal Machina, disque de référence récemment publié par Top) et de nouvelles aventures.

  • Fontaine

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    Madame Maître Chronique – mon premier supporter en écriture – m’a offert un stylo à plume. Un beau stylo. Très beau même, élégant et discret, loin de ses cousins un peu boursouflés et patauds qu’il est de bon ton d’exhiber avec ostentation dans la bling-blingosphère. Non, ce stylo est autrement plus raffiné et je m’en tiendrai là pour les présentations. Plus intéressant à souligner, il me semble surtout qu’il influence très directement l’apparence graphique de mon écriture (que vous ignorez, forcément) : alors qu’un simple stylo bille va rétrécir les lettres que je dessine, les assécher en quelque sorte et qu’il aura tendance à les isoler les unes des autres, leur conférer un style presque hésitant, tremblant et maladroit ; alors qu’un stylo feutre sera chez moi le support propice à plus de boursouflure des graphies, qu’il s’affranchira des lignes et aura tendance à les épandre un peu anarchiquement sur la page, le stylo plume fait revenir au galop le naturel paisible de mon écriture. Lettres et mots s’alignent sans effort, les liens entre les premières se dessinent spontanément : il règne alors sous mes doigts une fluidité encrée qui m’apaise et fait couler les phrases comme autant de petits ruisseaux. Ou d’une petite fontaine, devrais-je dire, tant il est vrai qu’en anglais on parle de «fountain pen» pour désigner un stylo à encre. Et surgit aussitôt en moi le désir du petit carnet que l’on glisse dans sa poche et sur lequel on griffonnera goulûment les petites idées qui vous passent par la tête.

  • Mobilisation

    J’aime bien les hommes politiques, parce que souvent, ils vous servent des phrases automatiques qui en disent long sur l’estime dans laquelle ils tiennent leur électorat. Tenez, l’autre jour par exemple, il y avait une élection législative partielle. Ne me demandez pas où, je ne m’en souviens plus. Et puis on s’en fout, ça ne change rien à l’histoire. En lice au deuxième tour, deux candidats et comme d’habitude en ce genre d’occasion, une participation plutôt faible. Manque de chance pour le candidat sortant qui appartient à l’actuelle majorité présidentielle, le résultat a donné vainqueur son adversaire (ce qui n’est pas un mince exploit compte tenu des luttes stupides qui ridiculisent son parti en haut lieu). J’entends alors une interview du perdant qui nous explique que s’il s’est fait sortir, roulez tambours sonnez trompettes, «c’est parce que le gagnant a mieux mobilisé ses électeurs». Tu parles Charles… Autrement dit, il ne remet pas un seul instant en cause la qualité du travail de son propre camp (pas plus que le sien localement) et botte en touche pour expliquer pourquoi il s’est mal tiré d’affaire. En fait, il faut le comprendre, il a perdu parce que ses électeurs sont des idiots…

  • Humain

    Je n’ai pas le moindre doute quant au fait que la sortie du nouveau disque d’Alain Souchon s’accompagne d’un plan médias savamment organisé, avec son cortège d’interviews dans la presse et à la radio, sans parler d’un long (et beau) documentaire diffusé en début de semaine à la télévision. Et que tout ce battage est forcément injuste pour tous les autres, ceux dont on parle peu, voire pas du tout. C’est vrai et de ce fait, je ne devrais pas en parler, partant de l’idée que les autres en ont déjà assez dit. Mais je ne peux m’empêcher de penser que j’adore ce type ! Voilà un ciseleur de mots, capable d’exprimer avec un rien ce que nous, humains lambda, ne parvenons même pas à dire en de longues phrases alambiquées. Son génie très particulier réside certainement dans une expression poétique parfaitement identifiable qui fait de lui un inventeur, humble et lucide. Les petites fulgurances littéraires d’Alain Souchon sont toujours un régal.
    Et je suis certain qu’on pourra, plus tard, étudier ses textes avec attention et y découvrir une observation fine et pertinente de notre monde. Souchon s’apparente, d’une certaine façon, à un socio-philosophe contemporain dont les idées, les questionnements, les inquiétudes, les admirations et les révoltes sont souvent les nôtres. Les hommes, de plus, ont trouvé chez lui un écho à leurs propres doutes et se sont sentis moins seuls lorsqu’ils ont entendu cette fragilité qu’il n’a jamais chercher à masquer sous une attitude arrogante ou virile.
    J’avais envie de le dire…

  • Stupide

    J'ai entendu ce matin deux informations étonnantes qui nous démontrent que si l'intelligence a des limites, la connerie, elle, n'en a point. Il y a tout d'abord le futur ex-président des Etats-Unis qui reconnaît qu'il n'était pas prêt à faire la guerre et qui espère aujourd'hui qu'on se souviendra de lui comme d'un dirigeant ayant contribué à la paix. Faut oser, tout de même ! Alors je crois que c'est raté, dobeuliou, j'ai plutôt l'impression que l'histoire te rangera dans la case des calamités mondiales, j'en suis désolé pour toi.
    Dans la foulée de cette confession ridicule, j'apprends que nos voisins d'Outre-Manche remettent à l'ordre du jour ce fameux "name and shame" qui était si cher à Tony Blair. Il s'agit de faire porter un blouson de couleur fluo orange aux délinquants condamnés à des travaux d'intérêt général (on montre et on fait honte, donc). Mais pourquoi se fendre d'un blouson alors qu'une petite étoile suffirait pour marquer ces gens ? Et puis, on pourrait peut-être aussi les lyncher en place publique pendant qu'on y est, histoire de mettre un peu d'animation dans ce monde grisâtre.

  • Toqué

    J’ai entendu à la radio le témoignage d’un drôle de type qui expliquait comment, depuis vingt ans, il ne se contentait pas de se brosser les dents réglementairement pendant trois à quatre minutes, mais s’échinait à conserver à chaque fois le dentifrice dans sa bouche durant… quarante-cinq minutes, sans parler. Promis, juré, craché, pas une seule carie depuis le jour où cette étrange idée lui a traversé l'esprit. Je ne voudrais pas vous apparaître comme un maniaque de la chose chiffrée, mais si je considère que ce drôle de bipède s’est adonné deux fois par jour à cette folie hygiénique depuis l’année 1988, j’en déduis qu’il a passé plus de quinze mois à attendre, bouche fermée, que le fluor protège ses dents. Je sais que la santé bucco-dentaire est essentielle, mais je me demande si tout cela ne ressemble pas à un trouble obsessionnel compulsif.

  • Physique

    sonate_de_guerre.jpgJ’ai consacré une bonne partie de mon après-midi de vendredi à un entretien avec le pianiste Jean-Michel Albertucci (dont il a déjà été question ici à l’occasion de la sortie de son premier disque en solo). Pour conclure cette conversation destinée à l’écriture d’un prochain article pour le compte du magazine Citizen Jazz, je lui ai proposé de réagir à quelques écoutes musicales, émanant exclusivement d’enregistrements de pianistes. Quel ne fut pas mon bonheur de voir ce musicien, attachant et sensible, vibrer de manière très intense dès les premières notes de la Toccata, extraite de la Sonate de Guerre du regretté Olivier Greif, ici interprétée par Pascal Amoyel. Il a perçu instantanément toute la profondeur de cette composition et, surtout, s’est senti comme en résonance corporelle, physique avec une œuvre douloureuse inspirée par l’horreur absolue que furent les camps de concentration. Dans notre conversation, j’ai pu lui dire combien de mon côté je me sentais privilégié d’avoir eu le bonheur d’écouter Olivier Greif lui-même interpréter cette sonate, dans le cadre du Festival des Arcs, il y a une dizaine d’années. Je crois que c’était en 1998, mais un petit doute subsiste, ayant pu l’écouter plusieurs années consécutives (je me rappelle ses interprétations de «Veni Creator» et de «La Bataille d’Agincourt»). Ce compositeur exceptionnel, totalement habité par sa musique, nous a quittés bien trop tôt en l’an 2000, à l’âge de 50 ans, devant son piano. Il aura laissé, j’en fais le pari, une œuvre durable qui continuera de hanter longtemps les âmes éprises de beauté.

  • Liaison

    Y a un truc qui m’horripile au plus haut point (voyez comme mes préoccupations sont essentielles, voire vitales), ce sont tous ces gens qui disent «Cent z’euros». Ah ce que ça m’énerve ! C’est tellement difficile de faire la bonne liaison ? D’accord quand il s’agit de deux cents euros, là je veux bien parce qu’on doit mettre effectivement la lettre «s» au bout de cent mais pas de son «z» quand il n’a rien à faire là, par pitié… On écrit cent avec un «t» au bout, nom d’un billet ! Phénomène bizarre, les mêmes personnes en oublient toute logique d’enchaînement sonore avec le chiffre vingt ? Faites-leur prononcer «Vingt euros» et vous verrez que la plupart du temps, la liaison en t a disparu, ils disent «Vin euros» alors qu’elle reviendra comme par magie s’ils disent «Vingt heures» ou «Vingt ans». Je ne sais pas ce qu’ils ont avec les euros... peut-être qu’à force de se faire rouler dans la farine par des commerçants trop malins, ils ont fini par la prendre en grippe notre monnaie européenne…
    Allez, on répète après moi : cenTeuros, cenTeuros, cenTeuros, cenTeuros, cenTeuros, cenTeuros, cenTeuros, cenTeuros, cenTeuros, cenTeuros.

  • Conserve

    bonpapa.jpgJ’ai fait un rêve complètement stupide l’autre nuit. Ou un cauchemar plutôt. J’étais en avion (ce qui m’arrivera pour la première fois l’année prochaine, je l’ai appris voici peu de temps) et tout allait bien. Mais probablement perturbé par ce voyage, mon organisme, qui trouve son équilibre depuis trente ans en absorbant de fortes doses d’anti-coagulant, décida alors d’imploser perfidement et de faire de moi une gigantesque marmelade humaine et rougeâtre. Je me liquéfiais de l’intérieur en quelque sorte et mes voisins du moment, soucieux de ne pas me perdre définitivement, ne trouvèrent pas mieux que de me transvaser dans un gros pot de confiture au couvercle à carreaux rouges et blancs (Bon Papa ?). Quelque temps plus tard, on pouvait me retrouver installé quelque part sur un meuble ou une cheminée, je ne sais plus, mais j'étais dans un salon et mes deux yeux encore vivants regardaient fixement les personnes qui passaient devant moi. Je ne me rappelle rien d'autre...
    Etonnant, non ?

  • Inquiet

    Je viens de lire une interview d’Alain Souchon dont un passage a retenu mon attention. Voici ce qu’il dit : «Je suis sur Terre en me demandant ce que j’y fais, si ça n’est pas un peu ridicule de s’exposer comme je le fais, je me pose plein de questions, je suis inquiet (…). J’ai une espèce d’inquiétude sourde, semblable à la mélancolie qui se dégage des romans de Françoise Sagan (…). Quelque chose de sourd qui me gâche la vie.»
    Je peux très facilement comprendre ce qu’il veut nous dire, car voilà qui exprime assez nettement ce que je ressens moi-même depuis très longtemps, si longtemps. Cette incapacité à ignorer le monde qui nous entoure, brutal, violent, où l’injustice règne. Cette conscience douloureuse qui vous interdit de vous déclarer heureux – même lorsque, comme moi, vous savez que vous êtes un privilégié par comparaison avec tant d’autres qui souffrent – et vous invite à rester extrêmement humble dans vos élans, au risque parfois de passer pour indifférent ou superficiel.

  • Récolement

    L’actualité est propice à l’enrichissement de notre français ! On apprend (dans le pire des cas) ou on redécouvre (pour les meilleurs d’entre nous) ses subtilités à intervalles réguliers. Souvenons-nous en effet : l’an passé, au mois de décembre, tout un débat s’était engagé au sujet d’un mot que beaucoup d’entre nous pensaient erroné et qui avait resurgi du fin fond du XVIIIe siècle lorsque les six membres de l’Arche de Zoé, condamnés à huit ans de travaux forcés, avaient quitté le Tchad : leur transfèrement était alors en cours. Transfèrement, et pourquoi pas transfert, simplement ? Tout bêtement parce que ce vieux mot, à connotation juridique, signifie «transférer une personne d’un lieu de détention à un autre» en observant certaines formalités. De quoi, en tous cas, agiter fugacement le landernau médiatique.
    Et voici que moins d’un an plus tard, nos dictionnaires sont soumis à une nouvelle interrogation grâce aux aventures un peu ridicules de Martine et Ségolène, pas fichues de compter correctement leurs bulletins de vote (George W., tu es battu à plates coutures…). Cette fois, c’est le récolement qui fait la une de tous les journaux. Selon le dictionnaire du droit privé de Serge Braudo, le récolement est un «contrôle opéré par un huissier ou par un greffier fait après inventaire, après saisie ou après apposition de scellés afin de vérifier que les biens mis sous main de justice n'ont pas été déplacés ou détournés».
    Très bien, je le note…

  • Naturel

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    La nature fait bien les choses. Alors que de nombreux outils professionnels vous permettent, moyennant un certain savoir-faire, de retoucher des photographies et de produire des effets graphiques et visuels multiples, il arrive que votre œil contemple, pour de vrai, de magnifiques instantanés presque irréels. J’ai appris voici peu comment faire apparaître en noir en blanc certaines zones d’une photographie en couleurs. Ou l’inverse. Et voilà qu’un hiver précoce en Lorraine, sans le moindre artifice numérique, vous offre le même résultat. Chapeau Dame Nature !

  • Subjonctif

    Je lis actuellement un très gros bouquin traduit de l’anglais. 1300 pages. Pas mal d’ailleurs, même s’il sent un peu le réchauffé après celui que son auteur avait écrit voici quelques années et qu’on lui préférera sans nul doute. Cette note n’a pas pour but, par ailleurs, de vous expliquer comment je dois me débrouiller pour supporter le poids excessif du livre le soir dans mon lit (une autre fois peut-être), mais pour m’insurger en constatant une amère disparition. En effet, obéissant probablement aux consignes d’un éditeur persuadé de savoir ce qui est bon pour nous, lecteurs paresseux et certainement incultes, les traducteurs ont purement et simplement éradiqué l’imparfait du subjonctif, lui préférant le présent y compris lorsque la proposition principale est conjuguée au passé. Qu’on fasse passer à la trappe cette conjugaison dans notre français parlé quotidien, soit. Mais pourquoi lui refuser de vivre encore un peu à l’écrit et de nous distiller ses savoureux accents circonflexes et ses terminaisons exotiques ? J’ai l’impression qu’un français utilitaire, grisâtre, contamine petit à petit le français tout court et qu’on ampute celui-ci de toute sa poésie originelle. Pas assez rentable. Et j’aurai la délicatesse de ne citer ni le nom du livre ni celui de son éditeur parce qu’en outre, il me faut déplorer des fautes majeures et répétées, tel l’emploi du double relatif dans des formulations comme : «C’est de lui dont il s’agit». Allez, en cherchant un peu, je vais m’apercevoir que les personnages de cette histoire ancienne «tirent les conséquences» de leurs actes…

  • Brûlant

    simon_goubert.jpgUn nouvel opus - le septième en tant que leader - pour le batteur Simon Goubert. Avec Background, ce musicien sensible et habité, compagnon de route de Christian Vander au sein de Magma, Offering et Welcome, réunit une belle équipe dont la musique est brûlante de ce feu nourri à la braise coltranienne : Pierrick Pedron et Boris Blanchet aux saxophones, Emmanuel Codjia à la guitare, Sophia Domancich au piano et Michel Zenino à la contrebasse. Il y a finalement peu à dire quand on écoute un tel disque. On écoute, tout simplement, par exemple un extrait "Mister Dean", titre hommage au saxophoniste Elton Dean, ancien membre de Soft Machine avec lequel Simon Goubert eut le bonheur de travailler.

    Background - Le Chant du Monde - 2741691

  • Distant

    Abattu la semaine dernière par une vilaine trachéite, j’ai dû rester chez moi pour travailler durant deux jours, préférant limiter la confrontation de mon organisme avec la fraîcheur humide de l’automne lorrain. Le constat est simple : peu dérangé dans la journée par tel ou tel collègue ayant une question essentielle à me poser et nécessitant une réponse instantanée de ma part – comme c’est le cas une bonne vingtaine de fois par jour – le rendement de ces heures à domicile m’a paru infiniment supérieur à celui qui est le mien d’habitude. Mon travail s’y prête car une part importante de mon activité nécessite silence et réflexion. Faut-il en conclure qu’à l’exception de quelques heures hebdomadaires passées dans le cadre collectif du bureau, il serait bon de réfléchir à une autre organisation du travail ? Peut-on élargir ce questionnement à une plus grande partie de la population dans certains secteurs d’activité ? Y a-t-il matière à imaginer que des conséquences sur les déplacements domicile travail pourraient se faire jour ? Faut-il voir là une possible source d’économies d’énergie et de limitation de la pollution urbaine liée aux déplacements individuels ? J’en étais à me poser toutes ces questions lorsque j’en suis venu à penser que, très probablement, des tas de gens beaucoup plus intelligents que moi avaient dû se pencher depuis belle lurette sur ce sujet. Et je suis reparti au boulot. En me disant aussi que ce blog manquait de fantaisie…