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Vécu - Page 13

  • Ecrin

    Ah, le retour du vieux con qui sommeille en moi... Il s’est réveillé, tout à l’heure, en pleine rue, alors que je venais de croiser quelques adolescents dont les téléphones portables crachouillaient bruyamment un vague ersatz d’une musique ronronnante et insipide, répondant ainsi parfaitement aux besoins du marketing contemporain. Aussitôt m’est revenue en mémoire cette époque – pas si lointaine – où, au même âge, comptant les pièces de monnaie une par une, j’investissais la totalité de mon argent de poche et autres subsides calendaires dans l’achat d’un électrophone stéréo qui constituait un progrès gigantesque dans la reproduction du son de mes quelques disques vinyles. Des galettes sélectionnées avec soin après la lecture attentive de deux ou trois revues spécialisées nous ouvrant les portes d’univers musicaux différents des mouvements en vogue. Pour parfaire la panoplie, il y avait aussi ces casques futuristes qui nous propulsaient encore plus loin, au cœur même de la musique, lui offrant ainsi le plus bel écrin possible. Chers objets, objets chers. Si belle musique que j’étais fier de débusquer par mes propres investigations, je m’en sentais un peu comme le dépositaire, elle était un trésor à préserver à tout prix. «The times, they are a changin’…». Allez, zou, le vieux con repart dans sa tanière.

  • Synchronicité

    Pas de panique, je ne vais pas me lancer dans une note à fort dosage jungien… C’est juste que j’aime observer des phénomènes dont l’apparition semble comme organisée, selon un calendrier mystérieux et parfois malicieux. Tenez par exemple : il y a à peine plus d’un an, 368 jours exactement, mon entourage proche complotait pour fêter mon cinquantième anniversaire et demandait à quelques amis de choisir un thème musical mais aussi d’écrire un petit texte à mon intention, histoire de fêter l'événement. Parmi ces complices figurait Henri Texier dont le choix s’était porté sur «In A Sentimental Mood», dans la version qu’en avaient donnée Duke Ellington et John Coltrane en 1962. Un an après, et très exactement au jour de mon anniversaire, arrivait dans ma boîte aux lettres (merci Hélène…) le nouveau disque d’Henri Texier, Love Songs Reflexions (que j’évoquerai ici prochainement). Un enregistrement dans lequel le contrebassiste et ses musiciens revisitent quelques standards du jazz, des «love songs», parmi lesquels figure en bonne place «In A Sentimental Mood»… A écouter cette nouvelle version, épurée et d’une sérénité émouvante, je me dis que le choix fait par Henri Texier un an plus tôt était de sa part un témoignage auquel je suis particulièrement sensible.

  • Réincarnation

    Je le sais, désormais : l’humain que je suis était une couette dans une vie antérieure. Mais attention, pas n’importe quel type de couette ! Un modèle avec une face hiver, qui vous tient bien chaud, et une face été, qui vous épargne les sudations nocturnes au plus fort des canicules dévastatrices. J’ai eu cette révélation en classant quelques photos récentes sur mon petit ordinateur blanc orné d’une pomme croquée. Lorsque j’observe les quelques portraits de moi que, par mégarde, je n’ai pas réussi à esquiver, je m’aperçois que j’ai moi aussi mon côté hiver et mon côté été. Le premier est celui des valises sous les yeux, du teint gris, des cheveux ternes qui grisonnent et d’une mine maladive : je ressemble comme un jumeau à celui que j’étais après chacun de mes séjours en milieu hospitalier. Voilà un faciès que je construis méthodiquement à compter du mois d’octobre avec, pour le parfaire, presque dix mois devant mois. Le second, mon côté été donc, est celui qu’il faut savoir capter parce que rare dans le temps ; c’est celui d’un changement radical qui s’opère dès lors que vient la période de la trêve estivale : mine réjouie, hâle flatteur, cheveux fous et œil vif. Une vraie couette, vous dis-je…

  • Questions

    Je veux bien, en plein sommeil, être soumis à la nécessité d’aller rechercher de toute urgence dans un ancien appartement (vendu depuis belle lurette) un lit d’enfant. Prochainement grand-père, le début de cette histoire se tient… Passe encore que pour atteindre mon ancien quartier je doive emprunter de bien étroites ruelles où je croise des vététistes imprudents et des joggers en tenue inappropriée. Il peut m’arriver en effet de fréquenter ce genre de veinules et je croise régulièrement des sportifs (ou assimilés) dans un état plus ou moins piteux sur mon chemin. Mais pourquoi cette rue, où j’habitais autrefois, est-elle en état de siège, ses habitants complètement paniqués à l’idée de savoir qu’un psychopathe évadé d’un asile rôde par là ? Pourquoi ces mêmes personnes, quelques instants plus tard, sont-elles affairées à plaquer énergiquement au sol, sur la voie ferrée toute proche, ce dangereux criminel recherché par la police ? Pourquoi, en attendant l’arrivée de cette dernière, une étrange procession menée par un évêque en habits sacerdotaux, parvient-elle à calmer l’assassin bizarrement réduit à une taille microscopique et devenu un mini pèlerin obéissant ? Pourquoi suis-je donc assis là, sur le rebord d’une fenêtre au premier étage d’une grande salle, guettant la course folle de policiers qui tous, les uns après les autres, s’étalent de tout leur long dans les flaques d’eau boueuses du terre-plein séparant leur véhicule du bâtiment où nous les attendons tous ? Promis, juré, je ne fume pas et je ne bois guère plus. Je ne comprends rien à ce rêve, c’est tout.

  • Punition

    Y a une dingue qui rôde dans mon quartier. Je ne sais pas quel est le pervers qui a réussi à lui faire avaler des bobards du genre : «Le sport, c’est bon pour la santé» ou bien «Il faut souffrir pour expier ses fautes ou se faire pardonner ses péchés», mais quand je la vois terminer, à bout de forces, son jogging matinal pluri-hebdomadaire, y compris lorsque règne ici un froid polaire qui vous brûle les poumons, au moment où, tout juste sorti de ma douche, je me dirige tranquillement vers mon bureau, je me dis que la croyance en une forme contemporaine de rédemption a fait son œuvre ou que l’identification aux courses Ray Bano-présidentielles est à zon zénith. Faut la voir, la pélerine en souffrance : à peine capable de soulever les genoux et de mettre un pied devant l’autre, l’œil hagard et le teint vitreux, ruisselante sous un bandeau défraîchi, c’est sûr, un jour elle va s’écrouler devant moi et j’aurai alors la mauvaise conscience de ne pas l’avoir prévenue des dangers qu’elle encourait à force de courses déraisonnables. Faudrait que je pense à lui dire. Pas sûr qu’elle soit en état d’entendre quoi que ce soit, cependant.

  • Copernique

    Mesdames et messieurs les scientifiques de tout poil, remballez vos arguments imparables et vos preuves irréfutables. Voilà des siècles maintenant que vous m’expliquez que je vis sur une boule qui non seulement tourne sur elle-même mais aurait, selon vos dires, une certaine tendance à tourner autour d’un unique soleil. Jusqu'à présent, je n'ai rien dit, mais aujourd'hui, il m'est difficile de garder le silence... Soleil mon œil ! J’ai pu démontrer par une expérience très simple que cette théorie ne tient pas debout : voici deux jours, je bavardais tranquillement au téléphone avec une amie qui habite du côté de Grasse lorsque celle-ci m’expliqua que, tout en me parlant, elle se prélassait au soleil de sa terrasse sur laquelle la température ambiante avoisinait les 18°C. Soudain, j’eus la présence d’esprit de lui demander si elle parvenait à voir le soleil dont elle me parlait. M’ayant répondu par l’affirmative, j’ai ouvert ma fenêtre et vérifié que j’avais moi-même un soleil dans mon champ de vision. A ce détail près que mon thermomètre, lui, affichait obstinément un stupide -4° C. Et la communauté des scientifiques voudrait me faire croire qu’il s’agit du même astre ? À d’autres… allez donc discuter avec vos collègues économistes qui on cru voir une «main invisible» (sic) s’occuper de la bonne régulation de nos marchés… vous verrez bien que les choses ne sont pas aussi simples !

  • Passager

    Elle monte dans le TGV qui va de Nancy à Paris et s’assied juste en face de moi. Elle pose son sac de voyage sur le siège passager qui la sépare de la fenêtre et prend un bouquin qu’elle commence à lire. Pas un mot. Puis elle ferme son livre et éclate en sanglots, durant de longues minutes, avant de reprendre la lecture de ce bouquin dont elle ne tourne jamais les pages. A côté d’elle, le sac semble un personnage absent. J’imagine une histoire, celle d’un homme ou d’une femme qui aurait dû être à ses côtés en ce dernier jour de l’année 2008 et qui, pour une raison que j’ignore, n’est pas là…

  • Spéculatif

    J'ai reçu récemment ma facture de gaz pour l'année 2008. 1180 €, à quelques centimes près. Cette somme traduit notre souci de gérer au mieux notre consommation, puisque voilà une dépense qui est stable par comparaison avec celle de l'année 2007, dont les tarifs étaient pourtant sensiblement moins élevés (A ce sujet, et par un mystérieux raisonnement énarchique, le prix du gaz est indexé sur celui du baril de pétrole. Soit, faudra qu'on m'explique pourquoi, mais admettons le principe. C'est la raison pour laquelle il a effectué en deux temps un bond d'environ 20 % au cours de l'année écoulée. Mais depuis quatre mois, le prix de ce satané baril a été quasiment divisé par quatre et je n'entends parler d'aucune révision à la baisse côté gaz... Les princes qui nous gouvernent nous ont simplement fait comprendre qu'aucune hausse n'était envisagée actuellement. Etonnant, non ? Et merci à vous, grands argentiers...).
    Mensualisé depuis des décennies, je m'attendais par conséquent à découvrir un échéancier 2009 simplement calculé, comme d'habitude, en divisant la facture de l'année précédente par 10, avec correctif éventuel en fin d'année. Un prélèvement mensuel de 118 € de janvier à octobre, donc. Ben non !!! Perdu mon gars ! Cette année, le grand gazier se fait un peu d'argent de poche en prélevant plus que nécessaire et me retirera chaque mois... 133 € ! Soit, sans me demander mon avis, une avance de 150 € pour l'année qui, multipliée par le nombre de cochons de payants que nous sommes, lui autorisera quelques facéties budgétaires dont on n'espère qu'il n'ira pas les brûler dans je ne sais quel fonds spéculatif mirobolant. Les petits coqs* du libéralisme ont beau m'expliquer que leur système chéri est le meilleur à l'exception de tous les autres, personne ne m'ôtera de l'idée qu'on me prend pour une truffe... Dommage que mon propre prix ne soit pas indexé sur cette dernière.

    * On sait que le coq est ce drôle d'animal qui présente la particularité d'être le seul à chanter quand il est dans la m...

  • Diagonale

    Je suis victime d’un complot, j’en ai déjà parlé ici (ou ailleurs) à plusieurs reprises. L’une des manifestations les plus explicites de cette conspiration contre moi est le syndrome de la diagonale. Qu’est-ce donc ? Rien de plus simple ni de plus pernicieux. Etant à ranger dans la catégorie des marcheurs (la chaussure est mon premier véhicule), et à force de déambulations urbaines, campagnardes ou alpestres, j’ai la chance de marcher plutôt vite et par conséquent d’être régulièrement amené à dépasser des congénères mollassons évoluant quant à eux à un rythme beaucoup moins soutenu. Je dois donc les doubler. Vaste programme ! Car c’est là que le complot se met en branle : à peine ai-je esquissé le début d’une modification de ma trajectoire, à gauche ou à droite c’est sans importance, que ce piéton poussif se met à dévier de la sienne et vient couper mon élan, me contraignant à opérer une manœuvre consistant à tenter de le dépasser par l’autre côté, non sans avoir dû freiner violemment. Et pan, vous pouvez être certain qu’il va revenir sur sa première idée et repartir de l’autre côté. Ce type-là avançait droit depuis des centaines de mètres : il suffit que je m’en approche pour qu’il tente une vilaine obstruction, sans même porter sur moi le moindre regard. Je dois être transparent. Et je ne parle même pas de la fumée de sa cigarette, qui vise malicieusement mes narines alors qu’elle pourrait aisément se dissiper tout autour…

  • Téléphone

    Ce monde est sinistre. Et ça ne date pas d’hier, même si nous, occidentaux (encore) gâtés, feignons de découvrir ses turpitudes avec le surgissement d’une crise d’un système pris à son propre piège spéculatif. Alors il est bon, parfois, d’attraper au vol une situation de notre quotidien et d’en faire un sujet d’amusement.
    Tenez par exemple : ayant dû rester quelques jours au chaud chez moi pour éradiquer une trachéite ayant mal tourné, je me suis rendu compte que mon téléphone n’arrêtait pas de sonner. Pas mon portable, non, ma ligne fixe, celle que je n’utilise jamais et qui est devenue la proie des centres d’appel, ces temples de la consommation  distante qui masquent leur numéro et vous mettent en contact avec une charmante personne à l’accent africain ou asiatique. Rien qu’hier, mon téléphone a dû sonner une bonne quinzaine de fois ; je ne sais pas si c’est l’approche des fêtes de fin d’année, mais il semble qu’une frénésie s’empare des marchands de tout poil au point que notre réponse semble leur être devenue indispensable. Au début, je les snobais, je laisser sonner, sonner, sonner, jusqu’à ce que silence s’ensuive. Et puis, je me suis dit qu’il fallait bien jouer un peu et j’ai initié un petit jeu que je vous invite à pratiquer de votre côté : répondre, mais pas de manière ordinaire. Vous verrez, on rigole bien…
    Par exemple :
    - décrocher le téléphone et ne rien dire : en général, ça raccroche au bout de quelques secondes, sans même un « Allô ». Mais il y a les tenaces qui, à force de mutisme, tentent des allô désespérés. Et moi, j’attends, sans rien dire. Et je ne raccroche jamais le premier.
    - décrocher et parler d’une voix sinistre, façon serial killer prêt à commettre un crime. Un gros allô bien râpeux qui fait peur. Effet garanti, la communication est coupée instantanément. Il y a toute une série de variantes que vous pouvez imaginer de votre côté…
    - décrocher et répondre dans une langue étrangère ou avec un fort accent. J’aime bien par exemple me faire passer pour une employée portugaise dont le français est totalement incompréhensible. A l’autre bout, on n’insiste guère, c’est sûrement une erreur de numéro.
    - décrocher et placer le téléphone devant les haut-parleurs de ma chaîne, avec le souci d’une qualité affirmée dans la programmation musicale. Hier par exemple, mes correspondants ont pu découvrir la musique de Stefano Di Battista, mais je ne sais pas ce qu’ils en ont pensé. Là encore, les salopards, ils ont raccroché…
    On s’amuse comme on peut, hein ?

  • Floral

     

    gelaucourt.jpg

    Je travaille actuellement, durant mes heures libres, au développement d’un petit site Internet que le conseil municipal d’un village lorrain m’a demandé de créer. Étonnamment, et après de longues semaines de maturation cérébrale pendant lesquelles j’étais dans l’incapacité absolue de visualiser en moi le début d’un commencement de réalisation, la maquette que j’ai finalement réussi à faire naître de mes ruminations me plaît. Parce qu’en règle générale, je ne suis jamais satisfait de mon travail, quel qu’il soit, et c’est toujours après que je pense à tout que j’aurais pu ou dû faire. Mais pour l’heure, il me semble avoir respecté l’esthétique très florale qui fait l’identité de ce village. Reste à savoir si mon projet conviendra à ses commanditaires : quelle importance après tout ? De toutes façons, je n’en imagine pas d’autre pour l’instant !
  • Notice

    Je ne suis pas très à l’aise avec les notices, en général. Ou plutôt, je devrais dire que j’ai tendance à ne pas les lire avant d’utiliser un produit ou de procéder au montage d’un objet lâchement parvenu en pièces détachées. Il y a chez moi quelques souvenirs cuisants, comme celui de l’installation d’un vélo d’appartement (c’était il y a plus de deux ans et même que personne n'avait pigé le jeu de mot musical dans le titre de la note…). Tout récemment, j’ai entrepris une lutte acharnée contre l’inhalateur d’un produit supposé éradiquer une toux persistante mutant perversement en bronchite un tantinet asthmatiforme. Tu parles… Il est où le truc où on appuie pour vaporiser ? Je démonte le biniou, comme je peux, y a bien une cartouche sous pression qui expulse un petit nuage quand on appuie dessus mais dès que je referme l’engin, je ne vois pas comment on vaporise. Il est où le bouton pressoir ? OK, faut secouer… Je secoue. Et ensuite ? Rien. Ce machin ne veut pas délivrer son remède miracle. Pas moyen de déchiffrer quoi que ce soit sur le bout de papier plié dans la boîte, illisible parchemin. Y a que des traits gris, tout petits. Et pris d’une inspiration subite, je chausse mes lunettes de vieux et je vois ces lignes obscures se transformer en phrases. Ah ouais, là ils expliquent tout : tu secoues bien l’inhalateur, tu expires à fond comme un malade et ensuite, tu te le mets dans la bouche et tu inspires encore plus à fond et t’arrêtes de respirer pendant dix secondes (m’en fous, je peux tenir deux minutes à ce petit jeu, sans entraînement, et toc !). OK OK, mais on appuie où ? Doit bien y avoir un endroit où on pousse en même temps qu’on inspire, non ? Ben non, on n’appuie pas, justement : la puissance de ton inspiration déclenche automatiquement le largage du produit au fond de tes poumons. Même que ça s’appelle Easi-breathe cette technique ! Et que sur le carton, il est écrit : lire attentivement la notice avant utilisation. Z’ont juste oublié de dire qu’il fallait mettre ses lunettes… et que je serais contrôlé positif si jamais je participe à nouveau au Tour de France.

  • Fontaine

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    Madame Maître Chronique – mon premier supporter en écriture – m’a offert un stylo à plume. Un beau stylo. Très beau même, élégant et discret, loin de ses cousins un peu boursouflés et patauds qu’il est de bon ton d’exhiber avec ostentation dans la bling-blingosphère. Non, ce stylo est autrement plus raffiné et je m’en tiendrai là pour les présentations. Plus intéressant à souligner, il me semble surtout qu’il influence très directement l’apparence graphique de mon écriture (que vous ignorez, forcément) : alors qu’un simple stylo bille va rétrécir les lettres que je dessine, les assécher en quelque sorte et qu’il aura tendance à les isoler les unes des autres, leur conférer un style presque hésitant, tremblant et maladroit ; alors qu’un stylo feutre sera chez moi le support propice à plus de boursouflure des graphies, qu’il s’affranchira des lignes et aura tendance à les épandre un peu anarchiquement sur la page, le stylo plume fait revenir au galop le naturel paisible de mon écriture. Lettres et mots s’alignent sans effort, les liens entre les premières se dessinent spontanément : il règne alors sous mes doigts une fluidité encrée qui m’apaise et fait couler les phrases comme autant de petits ruisseaux. Ou d’une petite fontaine, devrais-je dire, tant il est vrai qu’en anglais on parle de «fountain pen» pour désigner un stylo à encre. Et surgit aussitôt en moi le désir du petit carnet que l’on glisse dans sa poche et sur lequel on griffonnera goulûment les petites idées qui vous passent par la tête.

  • Conserve

    bonpapa.jpgJ’ai fait un rêve complètement stupide l’autre nuit. Ou un cauchemar plutôt. J’étais en avion (ce qui m’arrivera pour la première fois l’année prochaine, je l’ai appris voici peu de temps) et tout allait bien. Mais probablement perturbé par ce voyage, mon organisme, qui trouve son équilibre depuis trente ans en absorbant de fortes doses d’anti-coagulant, décida alors d’imploser perfidement et de faire de moi une gigantesque marmelade humaine et rougeâtre. Je me liquéfiais de l’intérieur en quelque sorte et mes voisins du moment, soucieux de ne pas me perdre définitivement, ne trouvèrent pas mieux que de me transvaser dans un gros pot de confiture au couvercle à carreaux rouges et blancs (Bon Papa ?). Quelque temps plus tard, on pouvait me retrouver installé quelque part sur un meuble ou une cheminée, je ne sais plus, mais j'étais dans un salon et mes deux yeux encore vivants regardaient fixement les personnes qui passaient devant moi. Je ne me rappelle rien d'autre...
    Etonnant, non ?

  • Distant

    Abattu la semaine dernière par une vilaine trachéite, j’ai dû rester chez moi pour travailler durant deux jours, préférant limiter la confrontation de mon organisme avec la fraîcheur humide de l’automne lorrain. Le constat est simple : peu dérangé dans la journée par tel ou tel collègue ayant une question essentielle à me poser et nécessitant une réponse instantanée de ma part – comme c’est le cas une bonne vingtaine de fois par jour – le rendement de ces heures à domicile m’a paru infiniment supérieur à celui qui est le mien d’habitude. Mon travail s’y prête car une part importante de mon activité nécessite silence et réflexion. Faut-il en conclure qu’à l’exception de quelques heures hebdomadaires passées dans le cadre collectif du bureau, il serait bon de réfléchir à une autre organisation du travail ? Peut-on élargir ce questionnement à une plus grande partie de la population dans certains secteurs d’activité ? Y a-t-il matière à imaginer que des conséquences sur les déplacements domicile travail pourraient se faire jour ? Faut-il voir là une possible source d’économies d’énergie et de limitation de la pollution urbaine liée aux déplacements individuels ? J’en étais à me poser toutes ces questions lorsque j’en suis venu à penser que, très probablement, des tas de gens beaucoup plus intelligents que moi avaient dû se pencher depuis belle lurette sur ce sujet. Et je suis reparti au boulot. En me disant aussi que ce blog manquait de fantaisie…

  • Ouvrier

    Grâce à mon voisin trop catholique dont j’ai déjà parlé ici voici quelque temps, je commence à en savoir plus sur ces étranges personnages que sont les ouvriers. Je suis lui reconnaissant de m’avoir appris récemment qu’il suffit de leur «donner une bouteille de vin» pour obtenir d’eux le petit coup de main que l’on souhaite. Mais voilà qu’aujourd’hui, j’approfondis mes connaissances… Parce que mon voisin abrite depuis quelques semaines plusieurs ouvriers chez lui, le week-end exclusivement et de préférence tôt le matin, et je crois qu’ils sont nichés au sous-sol de sa maison. Alors je sais qu’un ouvrier, dès potron minet le samedi ou le dimanche, se met à percer, frapper violemment le mur mitoyen de ma chambre avec un marteau et un burin, pour me faire savoir sa présence, tout près. Il est joueur aussi l’ouvrier, car dès l’instant où vous avez un peu tambouriné sur ce mur, mais de votre côté, il s’arrête. Farceur ! On l’entend alors qui frotte, ponce, s’adonne à d’autres jeux moins bruyants avant de reprendre son martelage, un peu plus tard dans la matinée. Quand je pense que de mauvaises langues me suggèrent que mon voisin les ferait travailler de façon un peu illicite, alors là je m’insurge. Impensable...

  • Pediblogus

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    La tenue d’un blog, quotidien ou non, est un exercice passionnant, même si parfois ingrat par le doute qu’il peut faire naître chez celui qui en est l’auteur. Vous êtes là, installé devant votre ordinateur (en l’occurrence, le plus mimi de tous les ordinateurs, tout beau tout blanc et qui ne plante jamais), écrivant pour un public invisible qui vous fait quelquefois l’honneur d’alimenter la rubrique des commentaires et de vous laisser croire que vos textes sont lus. Alors, quand la chance vous est donnée de rencontrer flesh and bones deux blogueurs que vous n’avez jamais vus mais avec lesquels vous entretenez de courtoises relations virtuelles depuis quelque temps déjà, vous vous précipitez pour vérifier leur réalité. Chose fut faite ce week-end dans le Nord Meusien, du côté du très beau Val Dunois, où Madame Maître Chronique et moi-même avons fait la connaissance des sympathiques Bertaga et Casy. J’avais prévu de vous les présenter… Mais malheureusement ébloui par un franc soleil, celui qui règne quotidiennement en Lorraine, notre photographe a glissé juste au moment où il photographiait ce couple de néo-verdunois, ne réussissant à immortaliser que leurs pieds. C’est déjà ça !

     

     

  • Rencontre

    fraises.jpg
    Tiens, si on jouait aux devinettes durant le week-end ? Voici une photographie, légèrement modifiée j'en conviens. On y voit deux curieux personnages qui font leur apparition comme sur un pochoir... Qui sont-ils donc ? Ah... et puis quand je vous dis qu'ils sont deux, finalement, je vous induis en erreur parce qu'ils sont un peu plus nombreux, pour ne rien vous cacher ! Quant aux plus cultivés parmi vous, ils reconnaîtront peut-être le lieu ! On ne souffle pas !!!

  • Etoiles

    us_flag.jpgJ’imagine que, pour moi comme pour beaucoup d’autres, la journée d’hier fut celle d’une certaine fébrilité… Ce sentiment mêlé de vivre un jour hors du commun, un peu euphorique parce qu’étant celui d’une page qui se tournait après d'interminables années d’obscurantisme économico-militaro-religieux, et d’être gagné simultanément par un état de confusion quant à la compréhension de l’avenir tant le chantier qui s’annonce paraît gigantesque. Quels sont ceux qui, un peu partout de par le monde, s’ils ont eu l’occasion d’échanger quelques propos avec leurs voisins, leurs collègues de bureau, leurs amis, leur famille… n’ont pas évoqué, ne serait-ce que fugitivement, la victoire de Barack Obama à l’élection présidentielle américaine et sa signification sociopolitique historique majeure ?
    Alors, en attendant de comprendre jour après jour la nouvelle donne de ce monde fou, je renvoie à l’Amérique un clin d’œil musical presque quadragénaire sous la forme de son hymne national, Star Spangled Banner, ici joyeusement déstructuré en studio par ce génie qu'était Jimi Hendrix.

  • Courant

    feuille_canal.jpg
    Quelques jours de repos, avant une période plutôt dense, beaucoup plus dense. Le plaisir d'une certaine nonchalance, de vaquer à quelques occupations domestiques, sans regarder sa montre. Se laisser porter par le courant, comme cette feuille d’automne tombée d’un arbre et dérivant sur les eaux du canal. C’est bon aussi, de temps en temps, de ne rien faire. Ou presque…