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Vécu - Page 11

  • Trentenaire

    Incroyable cette sensation du temps qui passe, que dis-je, qui file à la vitesse de l’éclair. C’est en regardant mon calendrier hier, au moment de reprendre le boulot après quelques jours de pause, que je me suis souvenu qu’il y a trente ans, quasiment jour pour jour, j’entrais dans un interminable tunnel, celui de la maladie qui vous fauche perfidement et ne vous lâchera plus jusqu’à votre dernier souffle. Me reviennent en mémoire les semaines de souffrance, la fièvre, les douleurs insupportables, les pronostics pessimistes, le décompte incertain des jours qui restent à vivre, les soins à l’hôpital, toutes ces perfusions, phlébographies, ponctions lombaires, biopsies en tous genres, les piqûres qu’on s’administre soi-même durant des mois, l’inquiétude de mon entourage, le drôle de regard des médecins qui me contemplent pour ce que je suis, un cas médical unique. Et puis, la renaissance, l’énergie qui revient, la joie de comprendre qu’on n’est que malade et pas condamné, la vie qui semble vous sourire à nouveau, l’idée qu’on peut à nouveau échafauder quelques projets. C’était il y a trente ans, j’ai parfois l’impression que c’était hier.

  • Cassea

    cassea.jpg
    Allez, c'est la reprise pour moi... Mais je vous épargnerai (rayez les mentions inutiles) : mes phrases longues, mes radotages, mes circonvolutions, mes prises de position façon vieux con, mes coups de coeur pour des artistes qui méritent un détour et un coup de main parce que snobés par la médiocratie médiatique la plupart du temps. Mais pour l'heure, un peu de calme s'impose, celui de ces jours de repos qui sont d'ores et déjà rangés au rayon des souvenirs. Avec pour le magnifier cette photo d'une plage un peu sauvage dans la Baie de Cassis et un enregistrement du bruit des vagues.

    podcast

    NB : depuis hier, vous avez la possibilité de vous inscrire à la newsletter de ce blog. Il n'y a là aucune obligation, juste pour vous la possibilité de recevoir de temps en temps un petit message vous informant des dernières notes publiées. C'est vous qui voyez !

  • Toiles

    rediffusion.jpgJe ne sais pas si vous fréquentez les salles obscures, mais pour ce qui me concerne, voilà un loisir qui me plaît particulièrement. Dommage qu'il faille souvent composer avec le comportement effarant de certains bipèdes qui osent penser qu'ils font partie des êtres humains...

    Lire « Cinéma m'était conté », publié le 31 mars 2007.

  • Enseignement

    rediffusion.jpgBien que très entouré d'enseignants qui sont des êtres humains adorables, je n'en garde pas moins quelques souvenirs drôlatiques de mes années de collège et de lycée. J'aurais pu multiplier les exemples, mais ceux que je propose ici sont déjà plutôt cocasses. C'est aussi une façon pour moi de rendre hommage à cette

    Lire « J'adore les profs, mais... », publié le 7 février 2006.

  • Règne

    rediffusion.jpgAh, le bon vieux temps où je régnais sur un peloton de coureurs et leur dictais ma loi, préférant voir gagner des toquards plutôt que de respecter la réalité d'un cyclisme dont les excès n'étaient pas la règle comme aujourd'hui, même si d'évidence, tout ce petit monde ne roulait pas à l'eau claire. Créateur du jeu, mon frère relèvera une fois encore le défi d'une écriture parallèle.

    Lire « Quand j'étais dictateur », publié le 31 mars 2006.

  • Carbonique

    rediffusion.jpgLà, c'est encore un drôle de truc qui m'arrive... Un chauffe-eau défectueux essaie de m'envoyer vers l'au-delà, mais fort heureusement, je suis bien entouré. Ceci remonte à l'époque de mes treize ans. Mon frère a raconté la même histoire, vu de son côté de secouriste.

    Lire « COgitations », publié le 31 janvier 2007.

  • Stimulé

    rediffusion.jpgPresque 15 ans plus tard, mon premier compagnon électronique lâche prise, il faut donc le changer. Ecrit dès le lendemain de la pose de mon second stimulateur cardiaque, ce texte repose sur des notes rapidement griffonnées sur un calepin qui m'accompagnait à la clinique. Histoire de fixer des sensations parfois étranges.

    Lire « Stimulo 2, unis pour la vie », publié le 15 février 2006.

  • Stimulation

    rediffusion.jpgRetour sur un carnet de bord écrit presque en direct au printemps 1991, lorsque quelques drôles de symptômes me firent comprendre que j'allais avoir besoin d'une assistance électronique, histoire de soutenir un muscle cardiaque un tantinet mou du genou, si vous me permettez l'expression.

    Lire « Stimulo », écrit en 1991, révisé et publié le 5 mars 2005

  • Lourd

    Pourquoi faut-il que nous ayons à subir l'humour, léger comme un enclume, d'un pauvre animateur d'une prétendue radio pour jeunes à chaque fois que nous nous retrouvons au beau milieu du public assistant à l'avant-première d'un film ? Oh bien sûr, je n'évoque pas notre cinéma d'art et d'essai local et ses bénévoles, qui s'efforce de proposer aux spectateurs un peu plus que ce pénible bavardage commercial dont le vide sidéral n'a d'égal que le dilettantisme de celui qui empoigne rapidement un micro pendant la rapide pause séparant les bandes annonces du film lui-même.
    "Alors il sont là, les invités de la mutuelle Machin chouette" ? Trois bras se lèvent timidement... Quelle ambiance !
    "Et puis, ceux qui ont eu une invitation par la radio Trucmuche, vous êtes là aussi ?" Allez, ne soyons pas chiches, au moins quinze mains se dressent, nous montrant que la radio en question a quasiment fait le plein de ses auditeurs, dont la tranche d'âge se situe grosso modo entre 15 et 20 ans.
    "Y en a qui ont payé leur place, aussi ?" Ben oui, ducon, nous ! Rires narquois des invités, tout heureux de croire qu'ils font partie de l'élite du moment et que les autres se sont fait avoir.
    "Bon, et puis, hein, alors merci à Bidule, merci à je ne sais qui... et puis, c'est promis : si vous avez aimé le film, vous en parlez autour de vous et si vous n'avez pas aimé... vous n'en parlez pas !".
    Pfff... conclusion du type qui nous donne rendez-vous pour une prochaine avant-première d'un film dont il se rappelle le titre mais qu'il est incapable de nous présenter un peu plus précisément... Un vrai pro, celui-là, on devine chez lui un sens du travail bien fait... Et c'est comme ça à chaque fois !

  • Fientes

    fientes.jpg

    Avis de recherche ! La première personne qui m'aidera à mettre la main sur l'espèce de crétin d'oiseau qui, méthodiquement, sournoisement, lâchement, profite de notre absence pour se vider les tripes sur le mélèze de notre terrasse, se verra offrir un café (nous pousserons le luxe jusqu'à ajouter un petit gâteau pas très bon, un spéculoos ou quelque chose de ce genre, comme ceux qu'on vous refourgue dans les bars où l'on n'a même pas l'élégance de disposer un petit carré de chocolat près de votre soucoupe) au soleil de la dite terrasse (qui, entre temps et avant une nouvelle offensive de la bestiole, aura été dûment nettoyée, rude tâche au vu de la couleur et de la consistance des déjections). Pourtant, cet abruti de volatile a le choix des branches aux environs, notre aire de repos urbaine étant parfaitement, presque scientifiquement, encadrée d'une végétation qui devrait suffire à son bonheur intestinal et lui servir de nichoir à évacuation : une rangée de charmilles, un érable, un arbre de Judée, un acacia, un savonnier, un Mahonia, etc. Un peu plus loin, dans les jardins voisins, toute une végétation luxuriante l'attend feuilles grandes ouvertes. Non, le foireux animal s'est entiché de la seule branche, celle d'un cerisier fleur, qui surplombe notre discrète esplanade et semble s'amuser à la décorer perfidement. Retenez-moi ou je vais faire un malheur...

  • Karting

    mario_kart.jpgJ'ai subi hier une épreuve assez terrible : un aller-retour en voiture sur l'A31, soit 160 kilomètres, entre Nancy et Thionville, tout près de la frontière d'un paradis fiscal (c'est très vilain les paradis fiscaux, ils viennent de le dire à la radio, alors c'est vrai). Cet axe routier est infernal (il est le troisième au classement national de la saturation automobile, si j'en crois mes sources) et totalement pollué de camions dont les plaques minéralogiques m'en apprennent beaucoup sur des pays dont j'ignorais l'existence jusqu'à présent. Le grand jeu de leurs chauffeurs - on comprend volontiers qu'ils s'ennuient, à force - c'est de se doubler (sans tenir le moindre compte de la présence d'autres véhicules autour d'eux, notons le) en faisant la course : un camion déboîte pour commencer le dépassement (pendant que vous, pauvre crétin, n'avez plus qu'à freiner comme un damné si vous ne voulez pas terminer concassé comme une compression de César) du collègue qui le précède. Et là, le manège commence : le dépassé ne voulant pas l'être appuie à fond sur le champignon ; le dépasseur, c'est sa nature, veut absolument passer devant et s'accroche comme un malade pour devenir le premier. Et ça peut durer pendant des kilomètres. Pendant ce temps-là, ça bouchonne derrière (parce qu'en plus, ces gros bras au crâne rasé qui regardent la télé en conduisant ne sont même pas fichus de rouler au-delà de 90 km/h dès que l'un d'entre eux vient squatter la file de gauche). Et moi, je pense à Mario Kart : je m'imagine au volant d'un engin doté de tas de trucs bizarroïdes, comme ce projectile qui réduit mes objectifs à une taille lilliputienne, je vois les camionneurs tout riquiquis, incapables d'obstruer la voie. Et comme il est de bon ton présidentiel d'avoir la banane, je jette des peaux en veux-tu en voilà, histoire de mesurer ma capacité à dominer le monde.

  • Editions

    stimulochronique.jpgHistoire n° 1 : On ne peut pas vivre seulement bercé par la mélopée des mauvaises nouvelles telles que les récitants quotidiens nous les psalmodient matin midi et soir. Ce serait trop terrible. Car voilà enfin une vraie bonne nouvelle (pour moi au moins) sous la forme d'une réponse positive donnée à l'une de mes vieilles requêtes. Depuis quelques années en effet, je rassemble des textes sur le thème de ma drôle de santé et son assistance cardiaque électronique, je plonge dans le maquis de mes souvenirs thrombosés, je dédramatise mes défaillances physiques. Et voilà qu'un éditeur accepte mon manuscrit. Sympa, non ?

    Histoire n° 2 : Aujourd'hui, le Président de la République convoque un ami d'une radio périphérique à l'Elysée pour une interview où la pugnacité du journaliste met à rude épreuve la patience de l'élu suprême, à force de questions incisives et parfois impertinentes. Une édition spéciale en quelque sorte. Enfin !

    L'une de ces histoires est fausse. Saurez-vous deviner laquelle ?

  • Plagiat

    petit_diable.jpgJe n'écris jamais un texte, quel qu'il soit, sans une certaine appréhension. C'est idiot parce que j'ai identifié depuis longtemps la cause de cette inquiétude. Il me faut remonter à l'époque où j'étais en classe de troisième, au début des années 70, j'avais treize ou quatorze ans. Mon professeur de français était un type un peu particulier qui se pointait régulièrement en classe avec un taux d'alcoolémie légèrement supérieur aux normes en vigueur à ce moment-là. Lorsqu'il était à jeun, parfois, il lui arrivait de se comporter normalement et de tenter de nous faire travailler. Il y eut par exemple ce jour où nous eûmes à plancher sur une rédaction où il était question de raconter des souvenirs personnels d'une journée que nous aurions vécue à la campagne. Je me rappelle vaguement mon travail, j'avais été très appliqué, inventant complètement mon histoire, mais surtout soucieux de bien faire... sauf qu'à la remise des notes, ce fut la déconfiture totale : 5 sur 20 ! J'étais accusé d'avoir plagié la Comtesse de Ségur... J'ai tenté de me justifier, en vain, fourbissant quelques explications sincères, notamment celle par laquelle je tenais à préciser que - honte sur moi, m'sieur, je l'avoue ! - je n'avais jamais lu la moindre ligne de cette brave personne. Rien n'y fit. La gamelle ! Et l'humiliation lorsque le dit professeur commença à lire mon texte à voix haute en minaudant pour me ridiculiser. Mes camarades de classe, un peu gênés par le procédé, trouvaient mon histoire plutôt chouette et pas mal écrite, ce qui me fut d'un réconfort réel mais insuffisant, je l'avoue. Depuis, dès que je suis devant une page blanche (ou un écran d'ordinateur) avec un travail d'écriture à effectuer, je me retrouve durant quelques secondes dans ma salle de classe, face à ce type insupportable à l'haleine fétide qui cherche à me rabaisser devant les autres. Et, en bon petit diable que je suis resté, jamais je n'ai essayé de lire quoi que ce soit de cette Comtesse de Ségur.

  • Mains

    mains.jpg

    Faut-il vraiment ajouter un commentaire à cette photo qui montre la main de ma petite-fille Lucie posée sur la mienne ? Elle me semble symbolique à bien des égards : on y voit la protection de l'adulte, mais aussi la lumière qui pourrait être celle de la connaissance et de la transmission de nos propres vies. A nous grandes personnes de préserver l'âme des enfants et de leur laisser le temps de grandir en harmonie.
  • Giboulorage

    [zibuloraz] n. m. Phénomène climatique se caractérisant par une étrange accumulation de précipitations, dont la consistance est variable, celles-ci variant de la pluie glaçante à la neige à peine fondue en passant par la grêle, portées par des vents violents et accompagnées d'orage. Lorsqu'il survient en journée, le giboulorage plonge en outre les paysages dans une nuit noire, évoquant par ses jeux de lumière une éclipse totale du soleil. Parfaitement connu des lorrains qui maîtrisent la partition de tous les désagréments météorologiques, le giboulorage est ressenti chez eux comme la forme la plus aboutie des punitions post-hivernales : croyant à l'arrivée du printemps, ces habitants du nord est de la France s'aperçoivent qu'il n'en est rien mais s'aperçoivent qu'ils goûtent à l'avance aux plaisirs de la dégradation du temps telle qu'ils la vivront après les longues périodes - d'une demi-journée en moyenne - de temps chaud et ensoleillé en été.

  • Mini

    Le complot cosmique fomenté contre ma personne - je l'évoque à chaque fois qu'une de ses manifestations tangibles peut vous être rapportée - continue et cette fois, je sais que le diable s'habille en Mini. Ou plutôt qu'il roule en Mini. Laissez-moi vous raconter : la semaine dernière, alors que je rentrais chez moi à pied (ma Navette Spatiale japonaise étant au repos dans son hangar intergalactique au rez-de-chaussée de la Maison Rose la plupart du temps), j'ai dû brutalement effectuer un grand bond en arrière (geste qu'on pourra qualifier d'anti-maoïste) au moment où je traversais la rue sur un passage piéton, parce qu'une voiture - une Mini - énergiquement pilotée par une femme du style bobo - friquée - branchée - lunettes de soleil même par temps gris - je conduis façon sport parce que la carrosserie de ma bagnole est ornée de deux bandes blanches façon R8 Gordini - a bien failli m'écraser... Je dois être invisible : la dame est passée sans me voir, sans même faire un petit signe pour s'excuser. Après tout, rien d'étrange jusque là, c'est la vie quotidienne des urbains piétons. Mais là où mon affaire se corse, bien que vécue en Lorraine, c'est que moins de cinq minutes plus tard, une autre voiture s'est échinée à m'écraser. Je suis moins qu'invisible, je ne dois pas exister. Mais là n'est pas la source de mon angoisse... Non, le problème, c'est qu'il s'agissait d'une autre Mini énergiquement pilotée par une femme du style bobo - friquée - branchée - lunettes de soleil même par temps gris - je conduis façon sport parce que la carrosserie de ma bagnole est ornée de deux bandes blanches façon R8 Gordini. Pas la même que l'autre, hein, non non... une deuxième tueuse à quatre roues, bien décidée à me faire passer de vie à trépas. Il va de soi que je ne suis pas dupe : ils sont là, ils me guettent, ils veulent m'éliminer...

  • Light

    Je vous dois une explication. Lorsqu'au mois d'août, notre fille nous apprit qu'elle attendait un bébé, j'ai aussitôt pris la décision de tenir quotidiennement un petit carnet de bord - où je m'autoriserais à parler de tout et n'importe quoi - un espace d'écriture dont la marque de fabrique serait celle d'une certaine concision par comparaison avec le blog que j'ai initié voici quatre ans maintenant. Histoire de semer sur mon chemin quelques petits cailloux qui permettraient, plus tard, à mes petits-enfants, de savoir un peu mieux qui était leur grand-père. Ce jour-là donc, le 8 août 2008, ayant déjà couché sur le papier d'un petit carnet quelques notes depuis cinq jours, fut celui de la naissance de ce « Maître Chronique Light ». Cette appellation est un jeu de mots, bien sûr : parce qu'en anglais, light signifie léger mais aussi lumière. En latin, la lumière se dit lux et parmi ses déclinaisons en français, il y a le prénom Lucie. Allez savoir pourquoi j'ai été convaincu depuis ce jour du mois d'août que je serais grand-père d'une petite-fille ? Je n'ai jamais eu le moindre doute à ce sujet...
    Lucie est née dimanche après-midi, ce fut pour elle et sa maman un moment un peu pénible mais toutes deux ont pu hier soir profiter - enfin ! - d'un vrai moment de tendresse et de douceur auquel nous avons pu assister derrière une vitre. Ces instants magiques, ces sourires chargés de larmes, ressemblaient à s'y méprendre à une (re)naissance. J'attendais que le bébé se porte bien pour vous annoncer sa venue. Voilà qui est fait ! Et pour répondre à la question qu'on m'a déjà posée : je continue ce blog, même après la naissance de ce petit trésor.
    Welcome Lucie, j'attends le moment de pouvoir te faire un très très gros bisou, un vrai. Et tu sais que je compte sur toi pour ramasser avec moi les feuilles sur la terrasse en bois, nous en avons parlé toi et moi depuis quelque temps déjà.

  • John Remembered

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    Je me suis plongé voici quelque temps, c'était au cours de l'automne dernier, dans la discographie très fournie d’un grand monsieur : John McLaughlin, dont la carte de visite, qui s'apparenterait plutôt à un who's who de la musique jouée depuis plus de quarante ans de par le monde, parle d’elle-même. Connu d’abord pour sa participation à l’aventure de Miles Davis - en particulier sur ces albums majeurs que sont In a Silent Way et Bitches Bew - à la fin des années 60, mais aussi à celle du Lifetime du batteur Tony Williams, ce guitariste virtuose a mis sur pieds une formation aujourd’hui presque mythique (en fait, ce qualificatif est idiot, je m'en rends compte, je veux dire par là que ce groupe, en particulier sa première mouture, celles des années 1970 à 1973, continue de me fasciner et que le quintette que McLaughlin avait formé avec Jan Hammer aux claviers, Jerry Goodman au violon, Rick Laird à la basse et Billy Cobham à la batterie semble toujours autant illuminé par la grâce), le Mahavishnu Orchestra, dont l’irradiation maximale (et la nôtre surtout) s’est produite entre les années 1971 et 1976, avant que son fondateur choisisse de s'éloigner d'un gourou un peu envahissant pour se tourner vers d'autres horizons, tout aussi propices à la méditation. Sa grande période créative suivante fut celle de l’ouverture vers la musique indienne : la naissance de Shakti au cours de la seconde moitié des années 70 en est un témoignage vibrant et unique, revivifié bien plus tard sous le nom de Remember Shakti. Une expérience unique que je vous invite très vivement à découvrir. Apprenez à plonger dans ces heures de musique qui semblent jouées en un continuum féerique, dans un étirement rythmique et hypnotique qui en dit long sur les trésors de vie intérieure qui l'habitent, pour mieux nous les offrir, aux antipodes de nos habitudes occidentales qui, elles, semblent courir après un temps frappé au sceau de l'urgence. Avec Shakti, la musique s'installe, elle s'expose en circonvolutions magiques et la confrontation de John McLaughlin avec ses pairs indiens est la source de vrais moments de grâce, où l'âme semble guider les doigts des musiciens. Il faudrait aussi parler de ce guitar trio parfois houleux mais extrêmement lumineux – une virtuosité à six mains qui fut l'objet de pas mal de critiques pas vraiment justifiées et qui nous laissa un disque splendide : Friday Night In San Francisco – avec Al Di Meola et Paco De Lucia, sans oublier l’hommage à John Coltrane que John McLaughlin rendit en 1973 en compagnie d'un Carlos Santana (Love Devotion Surrender) qui venait de publier ce qui reste peut-être son meilleur disque, Caravanserai, puis beaucoup plus tard en 1995 avec After the Rain, ni la belle collection d’albums en compagnie des plus grands (Trilok Gurtu, Elvin Jones, Dennis Chambers, Joey De Francesco, ...). Âgé aujourd’hui de 67 ans, John McLaughlin le Capricorne (voilà ce qui nous relie, en fait, lui et moi) est toujours sur la brèche : en témoigne 4th Dimension, sa formation actuelle où officie Hadrien Féraud, un jeune bassiste français qui fêtera cette année ses 25 ans et Floating Point, le dernier disque du groupe. Homme d’une élégance toute britannique, John McLaughlin m’a en outre fait un jour un très beau cadeau. Remontons un peu le cours du temps et arrêtons le calendrier des souvenirs au lundi 6 juillet 1992… Nous sommes dans les Vosges, plus précisément en la jolie petite ville de Vittel qui organisait en ces temps reculés, chaque été, un festival de guitare (aujourd’hui disparu, faute d’argent, de public et de soutien des collectivités locales... ce qui, à l'heure de la récession mondiale que nous connaissons, paraît nous renvoyer à une époque proche de l'Antiquité, il n'est que de voir les municipalités qui se pressent aujourd'hui pour fermer les robinets à toute dépense risquant de se voir apposer le label culturel, débarrassons-nous vite de tous ces saltimbanques si nous ne voulons pas creuser la dette, creuser la dette, creuser la dette... mais au fait, l'abime ne se trouverait-il pas au tréfonds du cerveau de certains de nos élus ?) où se côtoyaient quelques têtes d’affiches internationales et d’autres, moins en tête et plus locales. On y a vu Carlos Santana, Larry Corryel, Mike Stern… et beaucoup d’autres au rang desquels John McLaughlin et son trio de l’époque (Trilok Gurtu aux percussions, Dominique Di Piazza à la basse). En cette fin d’après-midi, j'arpentais les deux ou trois rues qui forment le centre de la ville (allez vous y promener un jour et promettez-moi de vous livrer à un exercice très instructif : comptez le nombre de salons de coiffure... Vous verrez, vous serez étonnés) et c’est en m'approchant du Palais des Congrès, lieu du Festival, que j’aperçus une silhouette qui m’était très familière : Mister John McLaughlin himself, tout juste sorti de l’exercice obligé de la balance des instruments. Ni une ni deux, je pris mon courage à deux mains – parce que je suis un faux extraverti et un vrai timide – et entrepris de l’aborder pour lui dire, en toute simplicité, combien sa musique avait été importante pour moi. Je me mis à lui parler avec une fièvre enfantine de ce Mahavishnu Orchestra en compagnie duquel j’avais passé beaucoup d’heures de musique. Ah, ce beau groupe sur lequel John McLaughlin régnait, tout habillé de blanc et qui jouait un drôle de rock mâtiné de jazz, urgent, virtuose, cérébral, voire mystique. On lui reprochait de jouer trop vite, de manquer d'âme, de vouloir gagner chaque année la course des 24 Heures du Manche (en particulier dans un magazine spécialisé aujourd'hui dirigé par le comique de service d'une émission de télé-crochet où défilent des créatures très souvent pathétiques, preuve que la roue tourne impitoyablement pour tout le monde, y compris pour ceux qui tentaient de nous faire croire à l'époque qu'ils étaient des êtres révoltés et combatifs). Balivernes, balivernes, on ne critique pas le Mahavishnu par ici : ce groupe brûlait sur scène comme sur disque, on retenait son souffle en écoutant sa musique. Tiens, j’ai même un souvenir très précis : le samedi 6 octobre 1973 (allez savoir pourquoi j’ai retenu cette date, peut-être parce que le même jour, un héros du sport français, le jeune automobiliste François Cevert, venait de se tuer pendant les essais d’un grand prix de Formule 1 de Watkins Glen à l’âge de 29 ans), la télévision (qui comptait trois chaînes exclusivement de service public – certes un peu contrôlé façon Voix de la France – à cette époque, ne l’oublions pas en notre ère de prolifération hertzienne, en voie de mise au pas toutefois) diffusait comme chaque semaine, pendant l’après-midi, un concert de rock dans le cadre d’une émission dont j’ai oublié le nom (Pop 2, peut-être. Oui, c'est ça : même que le présentateur commençait toujours par : « Salut, c'est Pop 2 ! » et vous savez quoi ? Eh bien ce type, c'est l'oncle d'un chanteur qui, lui aussi est membre du jury de cette émission dont je parle un peu plus haut. Notre monde médiatique est bien plus que petit, il est rétréci. Qu'on me rende mes idoles et qu'on expulse ces imposteurs ! Besson, au boulot !). Ce jour-là, j’ai fait connaissance avec le Mahavishnu Orchestra : autour de John McLaughlin, armé d'une somptueuse guitare à double manche et tout de blanc vêtu, officiaient des musiciens dont je ne tardai pas à apprendre qu’ils étaient de grands messieurs de la musique et qui avaient pour nom, je le rappelle au risque de me répéter parce que tel est mon plaisir, Jan Hammer, Billy Cobham, Rick Laird et Jerry Goodman : jazz électrique, musique complexe, d’une intensité stupéfiante. Je découvrais un nouvel univers, moi qui venait de gravir la paisible montagne du Grateful Dead (grâce au concours très particulier de mon gentil Arbre à Disques) et qui m’initiais depuis quelques mois à ce mouvement qu’on appelle le rock progressif (Pink Floyd, Yes, King Crimson, Genesis) ou la musique dite de l’École de Canterbury (Soft Machine, Matching Mole, Caravan, Hatfield & The North, ...). Une heure de concert à tomber de joie, suivie d’une virée en ville, à grands pas comme d'habitude, pour dénicher l’album chez mon disquaire favori. Patatras ! Rien dans les bacs ! Birds of Fire ? Connais pas mon bon monsieur… Impatience et rage, il me le fallait, en plus, pour une fois, j'avais mis de côté assez de sous pour me payer un disque (eh oui, les jeunes : je parle d'un temps où l'on achetait les disques, étonnant, non ?)… ce qui fut fait quelques jours plus tard (le 19, restons précis, je ne me rappelle plus l'heure exacte, vous m'en voyez désolé), à mon grand soulagement… Il est vrai qu’à cette époque, dans une petite ville de la Meuse, si jolie soit-elle et traversée par le fleuve, il fallait beaucoup plus qu’un clic (légal bien sûr) pour se procurer certains trésors… On attendait, parce qu’on ne pouvait pas faire autrement, on questionnait son commerçant, on lui montrait un article paru dans Best ou Rock’n’Folk, parfois notre vendeuse favorite notait la référence sur son cahier et nous promettait d’en parler au représentant lors de sa prochaine visite. Aujourd’hui… clic, clic et clic… et deux jours plus tard, l’objet est glissé dans votre boîte aux lettres (enfin, ça dépend du facteur tout de même : y a les méthodiques qui passent le carton sans dégât, d'autres qui massacrent un peu l'emballage en prenant un air dégagé, d'autres enfin qui renoncent et vous laissent un petit mot vous expliquant qu'ils reviendront demain, toujours en votre absence puisqu'à la même heure. Charge à vous d'aller, le lendemain, récupérer votre bien au bureau de Poste le plus proche. Conclusion : le disque est resté plus longtemps dans les entrepôts de La Poste qu'il n'a mis de temps à voyager, nous vivons une époque moderne). Tant qu’il y aura des objets, bien sûr…

    Nostalgique, moi ? Tu parles… Bon, j’en étais où… Ah oui, ma rencontre avec John McLaughlin, ces petites choses que j’avais envie de lui dire, ma seule façon de le remercier, de lui expliquer combien sa musique avait pu m’aider et continuait d’être présente dans mon quotidien. « Je voulais vous dire que Mahavishnu, c’est un groupe que j’ai écouté pendant tout le reste de mon adolescence, j’ai même révisé mon baccalauréat en écoutant Visions of the Emerald Beyond en 1975, ce disque avec Jean-Luc Ponty au violon qui engage des duels somptueux avec vous avant que les chœurs ne chantent « Let me fulfill life ! ». Je voulais vous dire merci, tout simplement, pour tout ce que vous avez fait ». Tout sourire, d’une simplicité désarmante et dans un français impeccable (on n'est pas marié à une pianiste hexagonale pour rien), John McLaughlin eut alors cette réplique que je n’ai pas oublié : « Mais vous avez toujours l’air d’un adolescent ! ». Venant de lui, svelte et d'allure juvénile, j’ai cru deviner qu’il s’agissait d’une gentillesse, j’avais 34 ans à l’époque (c'est bizarre de me dire ça, encore un peu et j'aurais eu l'âge d'être mon propre fils... C'est idiot ce que je dis ? Oui ? Tant pis), alors j’ai savouré mon plaisir et quelques heures plus tard, pendant le concert de son trio, je n’ai pas pu éviter de repenser à ces quelques mots, avec beaucoup d'émotion. Une légende vivante m’avait adressé la parole sans être entouré de dix gardes du corps, il n’avait même pas paru incommodé par mon intrusion…

    Dès le lendemain, gagné par la même urgence qu’en ce soir du 6 octobre 1973 où je m’étais mis en quête de Birds of Fire, je filai chez mon disquaire pour me procurer Qué Alegria, deuxième disque que le trio venait d’enregistrer. Sans imaginer forcément que de longues années plus tard, je l’aurais toujours en mains, avec le même plaisir et que je penserais à ces instants comme s’ils s’étaient déroulés quelques jours plus tôt.

    Le temps ne compte pas, de toutes façons, et les souvenirs sont souvent nos meilleurs amis.

  • Simplicité

    Cette semaine, j'ai passé mal de temps à parler avec des musiciens : soit au téléphone, mercredi soir et hier matin avec le saxophoniste Pierrick Pédron, pour les besoins d'une chronique (celle de son nouveau disque, Omry ; faites-moi penser à vous en parler plus longuement demain, car je pense pouvoir vous donner envie de l'écouter), soit de vive voix hier après-midi dans le cadre de l'interview de Franck Agulhon, batteur implanté depuis près de vingt ans à quelques kilomètres de Nancy. Voilà deux artistes de premier plan, très en vue sur la scène jazz européenne, qui sont d'une simplicité désarmante et qui acceptent de consacrer un peu de leur temps à parler de leur musique. Ils ne le font pas parce qu'il s'agit pour eux d'entrer dans une logique de promotion commerciale, non... ils échangent, vibrent et sont de formidables émetteurs. Quant au travail qui est le mien, c'est celui d'un récepteur, qui devra à son tour, modestement, retransmettre - c'est donc là mon propre rôle d'émetteur - le plus fidèlement à ses lecteurs cet émerveillement permanent que suscite la musique.