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Musiques buissonnières - Page 28

  • Pureté

    alain_rey.jpgJ'éprouve la plus grande méfiance à l'égard de tous ces « penseurs » ou prétendus tels qui invoquent l'idée de pureté, et encore plus lorsqu'ils sont habités d'une nostalgie pour un passé fantasmé et qu'ils invoquent les mânes d'êtres imaginaires des temps anciens, des êtres purs et intacts. L'histoire montre d'ailleurs qu'à force de manipuler de tels concepts, certains ont entraîné leur pays (et d'autres par la même occasion) vers l'abîme.

    Je trouve dans « L'Amour du Français », le très chouette bouquin d'Alain Rey (Points Poche, collection Le Goût des mots), quelques phrases qui viennent mettre en forme mon propre ressenti mieux que je ne saurais le faire.

    « La pureté relève d'un ordre mythique et négatif : elle consiste à se préserver de tout ce qui est autre, toute différence étant souillure, à s'inscrire dans une bulle, à se barricader » (page 29).

    Plus loin, on peut lire aussi : « Cette idée, lorsqu'il s'agit de religion, peut être dangereuse - de la rigueur calviniste aux intégrismes. Elle devient détestable quand on l'applique aux règles de vie, au langage et, plus encore, comme l'Histoire l'a montré, au mythe racial ».

    Voilà une saine lecture pour l'été qui commence...

  • Duo

    Parce qu'on ne peut pas toujours écrire sur un blog... et qu'on s'efforce, à la façon d'un tâcheron, de mettre sa plume au service d'un magazine - Citizen Jazz - qui défend l'idée d'une musique comme on l'aime par ici. Je vous invite par conséquent à suivre un lien qui vous emmènera vers la lecture d'un article du type « deux en un », dont le personnage central est Robert Wyatt.

    onjyvinec.jpg
    Cliquez sur la photo pour accéder à l'article
  • Gourmand

    gourmand.jpgJe ne sais pas comment va votre moral, mais le mien est soumis à rude épreuve... Je crois que je vais fermer durant quelques jours tous les robinets qui déversent sur nous un flot de mauvaises nouvelles. Pas pour faire l'autruche, hein, juste pour respirer. Histoire de reprendre des forces...

    Tenez, ce matin, j'allume mon poste de radio et qu'est-ce que j'apprends ? Que le Front National rameute quatre votants sur dix dans le Nord de la France (ouais, c'est ça, bienvenue chez les ch'tis...) et qu'un peu plus bas, une histoire de chaussette puante assure la réélection haut la main d'un maire.

    M'en fous, j'ai trouvé une parade à deux balles, euh non, environ trois euros. C'est facile à faire et ce truc fait un bien fou là où il passe. Je vous donne la recette : ZE home made café gourmand. Vous prenez un expresso auquel vous ajoutez (petite précision : à côté, sur une assiette, pas dans le café) une poignée de cerises fraîches en provenance de l'arbre du maraîcher, deux petits macarons (ici, chocolat et amande), un morceau de nougat, une part de Gâteau de Savoie et le tour est joué.

    Non mais !

  • Aquatique

    hot_tuna_burgers.jpgAllez savoir pourquoi, par je ne sais quelle mystérieuse divagation intérieure, j'ai pensé ce matin à ce beau disque de Hot Tuna intitulé Burgers. Paru en 1972, il était le troisième album né de la volonté de deux musiciens exceptionnels et complices, Jorma Kaukonen (guitare) et Jack Casady (basse), d'explorer plus avant certaines contrées qu'ils visitaient de temps en temps au sein du Jefferson Airplane, groupe mythique de la scène californienne des années 60. Proche de la perfection, cette galette toute noire (pochette et disque) fusionnait rock et blues en un mélange harmonieux de musique acoustique et électrique (« Water Song » d'un côté, « Sea Child » de l'autre) qui pourrait tout aussi bien avoir été enregistré hier, comme préservé des méfaits du temps qui passe. C'est là probablement un disque essentiel qu'on peut sans craindre se procurer, tant il paraît se bonifier avec les années.

    En écoute : « Water Song »

    Jorma Kaukonen : guitare, Jack Casady : basse, Papa John Creach (violon), Sammy Piazza (batterie).

    Acheter Burgers

  • Bad

    mjackson.jpgQu'on aime ou pas sa musique et quelles que soient les extravagances et les zones d'ombre du personnage, nul ne pourra contester que Michael Jackson aura marqué l'histoire de la musique du vingtième siècle. N'en déplaise à Alain Finkielkraut qui développait hier matin sur France Inter un sentiment, je le cite, « d'inappartenance » face au déferlement médiatique planétaire qui a immédiatement suivi l'annonce de la mort du créateur de Thriller*, cet artiste aura inventé à lui tout seul un univers singulier et inimité, dont énormément d'artistes de tous horizons revendiquent l'influence, à des degrés divers. Parfaitement identifiable, sa musique aura connu un sommet entre 1979 et 1987, avec la succession des trois albums que sont Off The Wall, Thriller et Bad. Et même s'il y a fort à parier qu'il n'avait plus rien de nouveau à nous offrir, cette trilogie justifie à elle seule un engouement qui dépasse les limites du raisonnable. Et j'imagine que sa disparition doit susciter un drôle de sentiment chez mes enfants, aujourd'hui adultes, eux qui avaient beaucoup vibré à sa musique, comme tant d'autres.

    * Ce qui est d'autant plus dommage que Finkielkraut venait de tenir de magnifiques propos après qu'un auditeur lui ait demandé son sentiment sur le débat autour du port de la burka. Il y avait tout de même bien des choses à dire sur le thème de la musique... Mais dès qu'on évoque celle-ci, il semble que le temps se soit arrêté pour lui voici plusieurs siècles.

  • Disjoncté

    fourmi.jpgDécidément, les bêtes sont mes ennemies, ou peut-être les bras armés du complot qui se trame contre moi. Je ne vais pas revenir sur cette théorie que je développe depuis des mois, mais je dois constater, jour après jour, que les faits viennent l'étayer. Vous vous rappelez peut-être ces saloperies d'oiseaux qui viennent lâcher leurs fientes sur ma terrasse en bois ? Eh bien, je crois que ce sont des amateurs à côté des fourmis. Ces saloperies de bestioles se sont attaquées à l'un de mes luminaires extérieurs et ont décidé, rien que ça, de le bourrer de terre jusqu'à l'ampoule. Un cylindre de 80 centimètres de haut et d'un diamètre de plus de 10 centimètres. Non mais, vous imaginez le boulot de titan que ça représente pour des fourmis ? Et comme si ça ne leur suffisait pas, ces connes se sont prises d'amour pour mes douilles (cherchez pas la contrepèterie, y en a pas...) et ont massacré tous les fils. Résultat des courses : un beau soir, tu veux éclairer ton jardin et c'est toute la maison qui disjoncte... Si ça, c'est pas un complot, je ne m'y connais pas.

    PS : cette histoire est véridique, comme vous vous en doutez...

  • Juste

    jaffa.jpgHabité par la grâce, le film « Jaffa » nous plonge au cœur d'une famille israélienne et du drame qu'elle va connaître. La réalisation, au plus près des personnages - Reuven, le père garagiste, sa femme Osnat qui, tant bien que mal, s'accommode du comportement de leur fils Meir, querelleur et fainéant. Et puis il y a la fille, Mali, qui vit une histoire d'amour avec Toufik, l'employé arabe de son père - nous immerge dans leur quotidien austère mais jamais ennuyeux. « Jaffa », c'est un moment de cinéma juste et émouvant comme on aime en débusquer de temps à autre au détour d'une salle où les rongeurs de pop corn experts en SMS nocturnes sont proscrits. Il est aussi l'occasion de voir ou revoir cette formidable actrice qu'est Ronit Elkabetz (qui joue ici le rôle de la mère), dont on avait déjà pu apprécier le talent dans un autre film particulièrement attachant, « La visite de la fanfare ». Voilà une très bonne surprise, un film cinq étoiles, assurément !

  • Evolution

    Certains prennent de bonnes résolutions à la rentrée, d'autres font le bilan d'une année qui s'écoule pour préparer la suivante. Je fais partie de la deuxième catégorie et je me rends compte que je vais devoir réorganiser mon travail d'écriture dès cet été. Si la satisfaction d'un blog quotidien est réelle - et même si mes textes ne sont pas tous impérissables, loin s'en faut - je suis plutôt mécontent de la qualité de ma participation au magazine Citizen Jazz, parce que la défense de la musique mérite mieux que les quelques textes que j'aurai réussi à écrire alors qu'il y a place pour beaucoup plus ! Il faut que je densifie de ce côté-là, voilà qui ne fait aucun doute. Surtout qu'un autre projet est en cours, celui d'une exposition, un projet que j'ai soumis à un ami au mois de février et que nous mettrons sur pieds au mois d'octobre 2010 dans une médiathèque. Lui, photographe professionnel ayant traîné ses objectifs sur les scènes du Nancy Jazz Pulsations depuis des décennies, et moi, écriveur dilettante et digressif, allons unir nos efforts. Il va nous falloir sélectionner les portraits d'une quarantaine de musiciens sur lesquels viendront se poser des textes de mon crû et commencer très vite ce beau boulot. Et déjà, dans ma tête, les premières phrases qui commencent à tournicoter...

    Pour mener à bien ces missions (auxquelles je peux ajouter la participation à un collectif de blogueurs à production trimestrielle), je dois prendre un nouveau rythme, qui devrait être hebdomadaire. Chaque semaine : un texte pour mon blog, un texte pour Citizen Jazz, un portrait de musicien pour l'exposition. Mes élucubrations vont s'espacer un peu dans le temps, mais resteront inscrites dans mes priorités. Ça devrait le faire, comme disent les djeunzs...

  • Sources

    La fusion de Jazzman et de Jazz Magazine à la prochaine rentrée n'est pas une bonne nouvelle. Quelles qu'en soient les raisons et quoiqu'on pense de leurs lignes éditoriales, il s'agit d'une source de connaissance, une de plus, qui est victime d'un tarissement. Une au lieu de deux. Et même de trois, car dans le même temps, un autre mensuel, Muziq, rattaché à Jazz Magazine, disparaît définitivement des kiosques. La concurrence avec d'autres supports, comme Internet, ne peut à elle seule expliquer la désaffection des lecteurs. Celle-ci trouve probablement aussi son origine dans un désintérêt progressif pour toutes ces lectures qui donnent à écouter (on me pardonnera cette expression) autre chose que le conformisme sonorisé dont la représentation médiatique atteint un niveau maximal. Ces disparitions m'interpellent et m'incitent à repenser la gestion de mon temps rédactionnel dans les mois à venir. J'en reparlerai prochainement.

  • Nancynistre

    Malgré la promesse que je m'étais faite, j'ai tout de même traversé hier soir quelques unes des rues principales de Nancy en sortant du cinéma et j'ai pu me confronter à l'épreuve de cette Fête de la Musique que j'évoquais hier. Je passe sous silence ce que j'ai vu - que de mines grises, que de regards perdus ! - et j'ai fini par me demander s'il était obligatoire de se balader avec une bouteille d'alcool à la main. Je refuse d'endosser l'habit du vieux con grincheux. Parce que c'est un certain conformisme conservateur que je réfute, et que j'aimerais parfois que la jeunesse soit un peu plus exigeante, un peu plus à la recherche d'autre chose, qui regarde plus haut, plus loin. Quelque chose qui soit différent, novateur et vivant et pas seulement un produit de consommation courante qui s'autodétruira aussi vite qu'il est apparu. Je ne suis pas très fier de notre monde d'adultes qui les a rendus ainsi, nous avons raté quelque chose...

    Quant à ce que j'ai entendu, c'est tout aussi difficile à comprendre. N'ayant pénétré dans aucun bar (où peut-être des expériences plus variées étaient proposées au public, mais je crains fort qu'elles aient été trop rares), je ne peux émettre une opinion que sur ce qui était livré en extérieur, donc à la foule... Un sentiment de tristesse m'a gagné, impossible de le cacher... Une tristesse où se mêlait un peu de rage aussi, parce qu'il m'arrive de penser, dans ces moments-là, que le combat est peut-être perdu. J'ai pensé au cancer, c'est bizarre, tant la prolifération de stands de "techno" m'évoquaient des métastases, envahissantes, épargnant bien peu d'organes finalement. Ici ou là, quelques musiciens tout de même, qui parviennent à se faire écouter avec bien des difficultés tandis que leurs voisins, réfugiés sous leur casque et jouant avec leur téléphone en attendant la fin des boucles programmées sur leur ordinateur, crachent nonchalamment les décibels dans leur propre indifférence pendant que deux ou trois types déjà loin de nous se collent les tympans aux membranes des haut-parleurs.

    Mais peut-être tout ceci n'est-il propre (si j'ose dire parce que l'état des trottoirs inciterait à employer un autre mot) à ma ville. Oui, peut-être que partout ailleurs, il était donné au public l'occasion d'une balade vers des univers variés, établissant des passerelles entre les cultures et les générations. Une fête de la musique, en quelque sorte.

  • Musique

    Je ne vais pas vous faire croire que je suis particulièrement sensible à cette célébration qu'on appelle la Fête de la Musique... J'imagine que nul ne contestera le fait que je déploie quelques efforts, tout au long de l'année, pour la célébrer, sans qu'il me soit nécessaire d'arpenter un soir par an les rues de la ville et tenter de me frayer un chemin au beau milieu de hordes alcoolisées dès que la nuit tombe (et même avant d'ailleurs). Dommage que ces foules ne manifestent pas dans leurs choix quotidiens un intérêt aussi marqué pour la musique durant tout le reste de l'année. Néanmoins, je ne veux pas faire le grincheux et j'adopte une méthode qui constituera ma contribution à cet événement. Il s'agit d'une rédaction (trimestrielle) pour le compte d'un collectif de passionnés de musique en général et de jazz en particulier. Allez, venez, c'est par ICI !

  • Mur

    mur_nu.jpg

    Au mois de janvier 2007, j'avais évoqué sur mon blog un drôle de mur, devant lequel je passe quotidiennement en me rendant au boulot. Graffitis et tags étaient pour moi la source de lectures sans cesse renouvelées. Petit à petit, jour après jour, on pouvait observer la germination des graphies, prendre note de tous les ordres donnés par d'invisibles écrivains autoritaires, se réjouir de temps à autre d'un dessin imaginatif et bariolé, autrement plus séduisant que toutes ces fientes projetées à grands coups de bombes de peintures qu'on appelle tags et qu'une certaine complaisance gauche caviar tente de nous faire passer pour de l'art urbain. Les graphes oui ; les tags, faudrait voir tout de même à ne pas exagérer...

    telecran.jpgImmanquablement, arrivait le jour où mon mur était plein. Plus un seul centimètre carré pour y inscrire une vérité socio-philosophique. Et zou, les services de la ville y déposaient une bonne couche de laque fraîche et c'était reparti pour un tour. J'avais comparé le mur au Télécran de mon enfance, qu'on secouait en le retournant pour faire disparaître les petits dessins qu'on avait péniblement réussi à produire en tournant deux molettes dont le maniement était particulièrement difficile à contrôler.

    Deux ans plus tard, on dirait que les choses ont un peu changé : voici quelques jours seulement, mon mur était remis à blanc (ou plutôt à vert). Comme d'habitude. Mais au lieu des énigmatiques slogans anarcho-libertaires qui faisaient mon plaisir du matin, d'autres écrits ont fait leur apparition, beaucoup moins sympathiques. Racistes et antisémites, pour parler plus clairement. Ces saloperies communautaristes ont vite été effacées par un nouveau coup de rouleau, dans l'urgence. Je crois bien que c'est la première fois que deux procédures d'effacement ont été déclenchées en un temps aussi court.

    Et je regarde ce mur, nu, presque mort.

  • Philodendron

    philodendron.jpgL'un des sujets de l'épreuve de philosophie de la cuvée 2009 du baccalauréat était : « Est-il absurde de désirer l'impossible ? ». Vaste programme... Je serais bien incapable de répondre à cette question à brûle-pourpoint, n'étant pas un expert en ce domaine (je revendique volontiers un côté philo dindon, histoire d'adresser non sans nostalgie un petit clin d'œil à une prolifération végétale du côté du salon de mon enfance...). En revanche, il suffit que j'ouvre les yeux ou les oreilles et que j'observe le monde qui m'entoure pour vérifier la proposition inverse. Il est parfaitement possible en effet de désirer l'absurde tant celui-ci prolifère au quotidien, comme ce bon vieux philodendron.

  • Appel

    Aujourd'hui, je lance un appel, moi aussi... Pour demander qu'on arrête de m'imposer des images insupportables et de me prendre pour une bille. Déjà que je suis de nature publiphobe, voilà que je suis agressé depuis quelques jours par une affiche sur laquelle l'ancien entraîneur de la nageuse Laure Manaudou exhibe fièrement ses pectoraux et ses biceps pour nous vanter les mérites d'un fournisseur d'électricité qui serait, je le cite, « moins chère ». Un slogan dont la chute : « Et pis c'est tout », n'est autre que le gimmick utilisé par les Guignols de l'Info lorsqu'ils mettent en scène ce sportif à la langue bien pendue. Sur la même affiche, finalement, se côtoient le vrai et le faux, en toute complicité, dans une relation commerciale un peu bizarre.

    Voilà qui me semble refléter assez fidèlement le mensonge qui règne de fait la plupart du temps dans le monde de la publicité : on a là un subtil mélange entre le réel (le personnage qui se met en scène) et le virtuel (sa marionnette), pour nous refiler un message un tantinet faux-cul. Ce qu'on vous propose est plus beau, moins cher, pourquoi hésiter ? Sauf qu'une fois lues toutes les restrictions écrites au bas de la page ou de l'affiche, en tout petit et parfaitement illisibles, on comprend que le réel est beaucoup moins séduisant que la fiction et qu'il existe un abîme entre les deux. Un peu comme ces bagnoles dont le modèle visible sur la publicité n'est jamais celui qui correspond au prix affiché en grand et dont l'explication est fournie un peu plus bas, sur un texte commençant en général pas un astérisque.

    Oui, c'est ça, la pub, c'est astérisques et périls !

  • Enchanteur

    J'ai vécu tout récemment une drôle d'expérience... Parce que je voulais m'acheter un appareil que je pensais trouver dans une grande surface de bricolage, je me suis rendu en ce lieu dont je ne percerai malheureusement jamais tous les mystères. Je passe sur l'incroyable farandoles d'objets dont j'ignorais l'existence jusqu'à ce que je les découvre au détour d'une tête de gondole ; aujourd'hui encore, je ne sais pas à quoi ils peuvent servir, même après une observation attentive. Je me rends compte qu'il se fabrique des milliers de tournevis différents (peut-être ne sont-ils pas tous des tournevis, d'ailleurs...), qu'on peut passer une vie entière à comptabiliser les différentes sortes d'ampoules électriques ou de boulons, qu'il y a plus de sortes de papiers peints que de variétés de fromage, que les lavabos sont à eux seuls un monde à part. Tous les rayons du magasin débordent d'ustensiles ou d'outils très menaçants pour l'a-bricoleur que je suis. Terrible ! Pas autant toutefois que les drôles d'individus qui viennent rôder là, en toute connaissance de cause. Tiens, j'en ai même vu un qui promenait une porte sur un caddie. Et voici deux types - des frères probablement - qui exhibent leurs Marcel, leurs bedaines et leurs effluves de transpiration en toute sérénité, la clope sur l'oreille et dans la bouche un accent lorrain à couper au couteau (un truc terrible, vous pouvez m'en croire). On voit des couples aussi : monsieur prend sa femme de haut, qui a osé émettre un avis sur un salon de jardin ; ou le contraire, quand madame qui, d'évidence porte la culotte, est l'experte en travaux manuels et renvoie Mimile dans les cordes au prétexte que ça fait quand même une sacrée somme. Je tourne, je tourne, et je ne trouve rien. Un vendeur, tout de même, face auquel je m'excuse de demander pardon : « Z'auriez pas un schmalglu électrique pour mon jardin ? ». Le brave me conduit vers le rayon idoine où trônent quelques prototypes futuristes hors de prix qui feront double emploi avec le balzingue que j'utilise d'habitude. « Ben merci quand même, m'sieur, z'êtes bien gentil ! ». Dans les rayons, les experts moustachus continuent de s'affairer, ils trouvent leur bonheur. Bon, ben, voilà, je sors du magasin, les mains vides. Je viens d'économiser 300 €...

  • Fils

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    Je travaille chaque soir à mes petits travaux d'écriture, souvent à mon bureau, mais il m'arrive rarement de regarder mes pieds, j'en suis bien conscient. Et là, c'est l'horreur... J'entends parler de réseaux sans fils, de wi-fi, de toutes les entraves filaires dont nous serions libérés, enfin. Tu parles, Charles, car que vois-je au sol ? Une immonde pizza électrique vautrée sur la moquette, garnie d'une forêt de câbles qui me narguent et menacent de se glisser sous mes semelles pour me faire chuter brutalement et me faire basculer par dessus la rambarde de mon escalier joli. Observons le décor...

    Si je considère comme normale la prise électrique de ma lampe de bureau, parce que le soir, il fait nuit assez vite, d'où proviennent donc tous ces mystérieux entrelacs ? Il y a l'alimentation de mon ordinateur : il a beau être portable, blanc, ne jamais quitter inopinément comme la plupart de ces machines et disposer d'une autonomie de quatre heures, il faut bien le nourrir de temps en temps : PRISE DE COURANT ! Mais un ordinateur, c'est aussi un objet multimédia, qu'il faut sonoriser correctement quand on se pique d'aimer la musique : et hop, on lui accouple de jolis haut-parleurs et un caisson translucides : PRISE DE COURANT ! Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais vous avez appris récemment que les sauvegardes sur CD étaient très peu fiables parce que le matériau se dégrade vite. Par conséquent, vous avez acheté un disque dur externe : PRISE DE COURANT ! Et comme vous vous laissez gagner par la paranoïa, vous vous êtes offert un second disque dur, pour sauvegarder les sauvegardes, partant de l'idée que les deux ne vont pas vous lâcher en même temps : PRISE DE COURANT ! Et puis, votre appareil photo numérique, ce petit chéri qui fait des miracles, renferme une jolie petite batterie qui se recharge sur un adaptateur : PRISE DE COURANT ! Quant à votre baladeur, celui sur lequel vous avez copié presque toute votre discothèque et qui consomme aussi peu d'électricité qu'un chameau d'eau, vous lui avez réservé une place pour son boîtier : PRISE DE COURANT ! Et je vous vois venir... Oui, bien sûr, j'ai aussi un téléphone portable : PRISE DE COURANT ! J'en ai même deux parce que pour acheter le nouveau, j'ai conservé le précédent jusqu'à la fin de mon engagement d'un an : PRISE DE COURANT ! Je connais un ami à qui je vais devoir commander une éolienne pour moi tout seul... Et puis faites-moi penser à voter écolo la prochaine fois...

    Bon, je crois que j'ai fait le tour de la question, il me reste maintenant à trouver la recette miracle qui fera que, malgré les précautions infinies prises pour ranger tous ces câbles avec méthode, leur nature perverse les pousse inexorablement à la gestation de nœuds très compliqués avec lesquels vous engagez chaque jour une âpre lutte dont vous savez que vous sortirez vaincu.

  • Métissage

    bozilo.jpgMieux vaut tard que jamais. Certes, certes... Mais dire que j'ai ce disque sous le coude depuis trois mois au moins... Shame on me ! J'en parle seulement aujourd'hui alors qu'il est une petite merveille de brassage culturel qui vous regonfle l'âme et vous ferait croire à nouveau en la nature humaine.

    Bozilo ? Ça vous dit quelque chose ? C'est un trio dans lequel on retrouve ces deux complices de longue date que sont Bojan Z (piano) et Julien Lourau (saxophones), eux qui ont multiplié les expériences communes depuis plus de quinze ans : au sein de Trash Corporation ou du Sonjal Septet d'Henri Texier, mais aussi dans le quartet du premier ou dans le projet Fire & Forget du second, ou, plus simplement, en un duo chamarré et porteur d'horizons géographiques multiples.

    Une rapide évocation familiale : le 8 octobre 2003, Bojan Z et Julien Lourau se produisaient au Vertigo, à Nancy, dans le cadre du Nancy Jazz Pulsations. Voilà un souvenir personnel d'autant plus émouvant que la première partie de leur concert était assurée par un quartet créé par mon propre fils qui n'avait pas encore 19 ans... Fin de la parenthèse.

    Au beau milieu de cette paire BO-LO aguerri vient se glisser un ZI qui n'est pas né de la dernière baguette, soit le troisième larron percussif en la personne de Karim Ziad (connu pour ses collaborations aux travaux d'explorateurs tels que N'Guyen Lê, Cheb Mami ou le regretté Joe Zawinul, excusez du peu). De quoi parachever avec beaucoup d'imagination une entreprise de dynamitage déjà bien amorcée...

    Bozilo, enregistré live en mai 2008 à Coutances et au Triton est une addition de leaders qui prend la forme d'un triumvirat équilibré, l'union de trois musiciens qui nous offrent leurs compositions, dont la plupart sont déjà connues et qui nous invitent à un voyage lyrique et sans frontières, passant par les Balkans, le Maghreb et bien d'autres lieux habités par l'âme de leurs peuples.

    Je vous en confie un petit extrait, juste avant de boucler ma chronique pour Citizen Jazz... C'est magnifique, tout simplement : « Ederlezi » est le chant découvert dans Le Temps des Gitans d'Emir Kusturica, ici arrangé par Bojan Z.

    podcast
    Bozilo Live - JMS 097-2. Un disque qu'on peut acheter ICI, par exemple.

  • Sonate

    Franz_Schubert.jpgAu détour de l'installation de son ordinateur sur lequel je m'échine, une collègue découvre que le système d'exploitation - que je ne nommerai pas, tant il est connu - installe des échantillons sonores et parmi ceux-ci, quelques mesures d'une œuvre de Beethoven. La voilà qui m'explique que cette découverte lui donne envie de réécouter toutes ses symphonies... Bizarrement, ce court dialogue un peu incongru me fait penser à la station des Arcs 1800, à son académie festival qui réunit élèves et enseignants durant deux semaines, chaque été. Et sans vouloir me faire passer pour un habitué des concerts qui sont donnés chaque soir, je me réjouis néanmoins déjà de ces quelques soirées auxquelles nous assisterons bientôt, au début du mois d'août. Allez savoir pourquoi, dès que je pense aux années que nous avons passées depuis douze ans dans cette station nichée au-dessus de Bourg-Saint-Maurice, j'entends instantanément les premières mesures de la Sonate pour Arpeggione et Piano de Franz Schubert. Mes connaissances ne me permettent pas de savoir s'il s'agit d'une œuvre majeure du compositeur autrichien, mais à la première écoute, je me suis senti en harmonie totale avec cette musique. Je crois me rappeler que l'un des interprètes était le violoncelliste Xavier Gagnepain, que j'ai déjà évoqué il y a plusieurs mois. Voici les premières minutes du premier mouvement (Allegro Moderato) de cette sonate, dans une version enregistrée en 1968 par le grandissime Mstislav Rostropovitch au violoncelle et le non moins majeur Benjamin Britten au piano. On peut très facilement se procurer cet enregistrement magnifique, pour une somme modique, ICI par exemple.

    podcast

  • Candide

    jardin_maison_rose.jpgPour une fois, j'aimerais à travers ces quelques lignes vous recommander la lecture d'un autre blog, passionnant, celui de Françoise Rebinguet : dans une note appelée « Une culture de jardin de curé », elle propose une comparaison entre la manière dont elle a construit sa culture personnelle (musicale et littéraire) et celle dont elle et son mari ont fait vivre leur jardin au fil des années, comment ils ont fait preuve d'une patience infinie pour le laisser vivre en liberté à peine contrôlée. C'est intelligent, très sensible et riche en arômes et couleurs. Allez donc y faire un tour, vous ne le regretterez pas.

    On imaginera qu'à la lecture de ce beau texte, j'ai cherché à appliquer cette démarche à ma propre expérience et noté des parallélismes mais aussi quelques différences significatives.

    Oui, tout comme Françoise Rebinguet, ma culture répond assez fidèlement au désordre pas du tout contrôlé de la vie de son jardin de curé, à ses essais plus ou moins fructueux, sa végétation qui prolifère sous les tentatives anarchiques de l'autodidacte "la truffe en l'air" que je suis. Rien n'est construit ni planifié. Jamais, seules les impulsions me guident et les formatages me navrent parce qu'ils s'apparentent à la mort. Tout cela forme un sacré bazar parfois (ce que j'appelle parfois mes litté-ratures) au beau milieu duquel je me démène comme un pauvre diable, angoissé à l'idée de tout ce que je n'aurai pas le temps de connaître ou en pensant que bon nombre de promesses que je me fais intérieurement ne seront jamais tenues (comme, par exemple, relire tous les bouquins de tel ou tel écrivain ou réécouter ces centaines de disques qui s'accumulent, sagement alignés sur leurs rayonnages).

    Mais l'aménagement de notre jardin - qui n'est pas de curé car il n'est pas ceint de quatre murs, encore que la végétation qui le clôt en constitue un bon et naturel substitut - fait l'objet de notre part d'une attention très particulière, en opposition assez forte avec celui de notre blogueuse qui éprouve, elle, un plus fort besoin d'ombre et de prolifération. Vivant en Lorraine, nous avons tout d'abord éclairci cet espace formant un carré de dix mètres de côté, pour y faire rentrer le maximum de lumière : arrachage d'un bouleau pleureur envahissant et ombrageux, domestication d'un rideau de charmilles dont la pousse est désormais contrôlée à une hauteur très raisonnable, redressement d'un sureau qui voulait vivre sa vie dans le jardin du voisin, élagage d'un érable menaçant de devenir gigantesque, installation d'une terrasse naturelle en bois de mélèze, mise en valeur des pierres, coloration impressionniste de l'ensemble au moyen d'une pelouse, de différentes variétés de roses, de framboisiers, de plans de tomates. Un ordonnancement réel, nécessaire, mais sans rigueur excessive, qui contraste assez franchement avec mes quelques connaissances, plus anarchiques que jamais.

    Et ça ne va pas s'arranger...

  • Incohérences

    Nous vivons décidément dans un monde de brutes (oui oui, je sais, ma première phrase est la dernière de la note précédente, c'est fait exprès, chers amis, c'est un petit truc, comme ça, pour décorer mon texte...). Et totalement incohérent. Je prends au hasard deux exemples attrapés au vol de mon quotidien.

    J'entendais hier à la radio la promotion lugubre de je ne sais quel bouquin sanglant chez un éditeur à gros tirage mais pas forcément spécialisé dans la littérature. Une voix censée nous faire peur dit : « La plupart des hommes ignorent à quoi ressemble une femme sans peau ». S'ensuit la glorification d'un criminel, sujet central du livre, et de tous les supplices qu'il inflige à ses victimes, des femmes bien entendu. Jusque là, c'est du commerce banal, racoleur et cynique... Donc, normal. Sauf que cette publicité vient s'insérer au beau milieu d'un débat moralisateur sur les dangers d'Internet pour les enfants. Faux débat, me semble-t-il, car le vrai danger, c'est la violence dans laquelle on plonge quotidiennement nos enfants, bien trop tôt, bien trop vite, une violence amplifiée par la démission de trop de parents. Et une belle démonstration d'hypocrisie de la part de cette radio qui nous rappelle que l'argent n'a pas d'odeur.

    Hier toujours, je vois sur mon chemin, dans la vitrine d'un bureau de tabac, la figure hilare de notre Président sous la une d'un magazine hebdomadaire ultraconservateur : « La raclée des anti-Sarkozy ». Il faut être doué d'une belle dose d'hypocrisie, là encore, pour parvenir à une telle conclusion après les élections européennes. Qu'elles soient une débâcle pour le Parti Socialiste, personne ne peut le nier. Qu'elles soient une belle baffe pour le MoDem, chacun le vérifiera. Qu'elles aient permis aux écologistes de tirer leurs marrons du feu plutôt mieux qu'à l'habitude, c'est vrai aussi, parce que 16 % de 40 % des électeurs, ça nous donne plus de 6 % du total, soit une performance légèrement supérieure à ce que les Verts connaissent actuellement. Mais franchement, ce qui s'est passé dimanche dernier n'est-il pas l'expression d'une défaite pour l'ensemble des partis politiques, quand 6 électeurs sur 10 décident de ne pas se rendre au bureau de vote ? Et comment peut-on exagérer à ce point la réussite des listes issues du pouvoir en place, quand celles-ci ont tout juste rassemblé plus de 10 % du corps électoral ? La Fontaine nous dit que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l'écoute... On peut le vérifier, une fois encore.