Mur
Au mois de janvier 2007, j'avais évoqué sur mon blog un drôle de mur, devant lequel je passe quotidiennement en me rendant au boulot. Graffitis et tags étaient pour moi la source de lectures sans cesse renouvelées. Petit à petit, jour après jour, on pouvait observer la germination des graphies, prendre note de tous les ordres donnés par d'invisibles écrivains autoritaires, se réjouir de temps à autre d'un dessin imaginatif et bariolé, autrement plus séduisant que toutes ces fientes projetées à grands coups de bombes de peintures qu'on appelle tags et qu'une certaine complaisance gauche caviar tente de nous faire passer pour de l'art urbain. Les graphes oui ; les tags, faudrait voir tout de même à ne pas exagérer...
Immanquablement, arrivait le jour où mon mur était plein. Plus un seul centimètre carré pour y inscrire une vérité socio-philosophique. Et zou, les services de la ville y déposaient une bonne couche de laque fraîche et c'était reparti pour un tour. J'avais comparé le mur au Télécran de mon enfance, qu'on secouait en le retournant pour faire disparaître les petits dessins qu'on avait péniblement réussi à produire en tournant deux molettes dont le maniement était particulièrement difficile à contrôler.
Deux ans plus tard, on dirait que les choses ont un peu changé : voici quelques jours seulement, mon mur était remis à blanc (ou plutôt à vert). Comme d'habitude. Mais au lieu des énigmatiques slogans anarcho-libertaires qui faisaient mon plaisir du matin, d'autres écrits ont fait leur apparition, beaucoup moins sympathiques. Racistes et antisémites, pour parler plus clairement. Ces saloperies communautaristes ont vite été effacées par un nouveau coup de rouleau, dans l'urgence. Je crois bien que c'est la première fois que deux procédures d'effacement ont été déclenchées en un temps aussi court.
Et je regarde ce mur, nu, presque mort.
Commentaires
Ce mur ne serait-il pas siuté à la sortie (ou l'entrée) d'un passage sous la voie ferrée débouchant à la fourche du Quai Claude Lelorrain et de la rue de la Ravinelle où MJB perdit un jour son doudou (heureusement retrouvé) ? Comme toi, j'adore les graffitis qui révèlent parfois de véritables artistes et je n'aime pas les tags souvent débiles. J'ai honte également de certains slogans innommables. Et que dire de ceux qui rabaissent la femme plus bas que terre...Mais attention, si à "une certaine complaisainte gauche caviar" tu avais rajouté "bien pensante", on aurait cru entendre des propos d'Eric Zemmour !
@Zia : oui, c'est bien là ! En revanche, j'avais oublié cette histoire de doudou perdu...
Quant à Eric Zemmour, que dire, étant donné que je suis bien incapable de savoir ce qu'il dit je fuis comme la peste les émissions du grand barnum télé dont il est un des piliers... Mais bon... Imaginons qu'il fasse très beau et qu'il dise que le ciel est bleu, je n'irai pas prétendre le contraire non plus.
Bien pensante ? Je ne sais pas trop ce que cela veut dire. En revanche, ce que j'appelle la gauche caviar, c'est toute la gauche de droite qui va à la soupe dès que possible (les exemples sont faciles à trouver), qui a refusé d'aborder depuis des années certains thèmes importants pour ne pas froisser un hypothétique électorat qu'elle a bien du mal à trouver depuis...
"la germination des graphies"... vous devriez écrire, vous... :-)
Et tu pourrais commencer par écrire sur ce mur tout blanc ! :-)
Euh... «la germination des graphies» ne serait-il pas un rien pédant???
Sinon c'est vrai: ta chronique hebdo sur ce mur, MC?