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Vu - Page 8

  • Cassea

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    Allez, c'est la reprise pour moi... Mais je vous épargnerai (rayez les mentions inutiles) : mes phrases longues, mes radotages, mes circonvolutions, mes prises de position façon vieux con, mes coups de coeur pour des artistes qui méritent un détour et un coup de main parce que snobés par la médiocratie médiatique la plupart du temps. Mais pour l'heure, un peu de calme s'impose, celui de ces jours de repos qui sont d'ores et déjà rangés au rayon des souvenirs. Avec pour le magnifier cette photo d'une plage un peu sauvage dans la Baie de Cassis et un enregistrement du bruit des vagues.

    podcast

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  • Magmanoeuvre

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    Au moins cette fois, Christian Vander ne pourra-t-il pas se plaindre de la manière dont les médias ont rendu compte du quarantième anniversaire de Magma. Le groupe aura fait la une de plusieurs magazines renommés (Jazz Magazine, Rock'n'Folk notamment), une kyrielle d'articles, dont une pleine page dans Le Monde, lui auront été consacrés dans la presse tant nationale que régionale. Même BFM TV s'y est collée qui lui a accordé quelques minutes d'antenne, c'est tout dire. J'en passe et des meilleures... Quant aux concerts du groupe, ils se multiplient comme les petits pains, avec une tournée au Japon et plusieurs scènes hexagonales prestigieuses : le Casino de Paris, l'Alhambra, les Francofolies de la Rochelle et le Festival de Jazz de Nice, dont Vander himself est cette année le parrain. Encore un effort et Magma va devenir un groupe à la mode. Et, comme diraient nos amis anglais, icing cherry on the cake, voilà que Philippe Manœuvre, rédacteur en chef de Rock'n'Folk, ci-devant juré de la Nouvelle Star, se met à arborer à l'antenne le T-Shirt de Magma, tout rouge avec la griffe ! On aura tout vu ! Pour avoir été un lecteur très assidu de ce journal dans les années soixante-dix alors qu'il n'en était à l'époque qu'une des plumes, je n'ai d'ailleurs pas le souvenir du moindre article commis par ses soins qui aurait été consacré à traduire sa passion pour le groupe... mais ma mémoire me trahit, probablement. Finalement, pour être certain de ne pas être victime d'un mirage, j'ai même été jusqu'à photographier mon écran. Si on m'avait dit ça un jour...

     

     

  • Inoxydable

    physical_graffiti.jpgDans un tout récent film, l'impayable Jean-Pierre Darroussin interprète le rôle d'un cuisinier poète à ses heures - au grand dam de son patron qui ne cesse de se lamenter sur la longueur du nom des plats du jour, plaignant ses clients qui disposent de peu de temps et n'auront plus le temps de manger une fois qu'ils auront réussi à finir de lire la carte - grand fan de Led Zeppelin. Si j'ai tendance à oublier assez vite les films que je vais voir, je pense que je garderai longtemps en mémoire cette scène où, découvrant l'appartement des parents de sa (très) jeune petite amie, notre héros met la main sur ce chef d'œuvre de la bande à Jimmy Page qu'est l'album Physical Graffiti, avec sa somptueuse pochette aux fenêtres découpées dans le cartonnage ! Et le voilà qui se remémore goulûment quelques uns des titres légendaires du disque : « Kashmir », « Houses ot the Holy », « In my time of dying »... J'avais acheté ce disque, un double trente-trois tours, au moment de sa sortie, en 1975, et vous ne serez peut-être pas étonnés d'apprendre que j'ai agrémenté mes trajets pédestres d'hier au son de cette musique qui a très bien résisté aux assauts du temps. 

  • Enigmatique

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    J'avais écrit voici quelques jours une petite note que je comptais publier aujourd'hui même. J'y évoquais le grand raout du G20 en expliquant que j'avais, moi aussi, mon propre sommet lorsque, séjournant à Paris du côté de la Rue du Bac et de la Rue de Grenelle avec Madame Maître Chronique, il m'arrivait de fréquenter une supérette du même nom (G20) pour y acheter quelques yaourts, histoire d'agrémenter le petit déjeuner pris dans la cuisine commune d'une charmante résidence où nous avons nos quartiers. Manque de chance, Alain Rémond a sévi entre temps dans le magazine Télérama et publié un billet qui part de la même idée. Si j'avais su, j'aurais publié illico ! Me voilà donc à court de texte... et sauvé in extremis par cette drôle de pancarte vue hier après-midi sur une façade, tout près du Parc Sainte-Marie à Nancy. Elle m'interroge sur l'orthographe étrange du mot troupe et me laisse perplexe lorsque je cherche à comprendre ce qui peut se cacher derrière tous ces plaisirs. Je ne sais pas s'il est vraiment raisonnable que ma petite-fille accepte que ses parents continuent de la promener dans un tel quartier...

  • Respiration

    en_campagne.jpgElle s'appelle Aurélie, il s'appelle Julien. Armés d'un micro qu'ils plantent énergiquement sous le nez de villageois d'abord médusés et plutôt mutiques, ils déboulent dans les recoins les plus enfouis de la campagne française dans le but de faire parler les gens. Des gens qu'ils aiment, à n'en pas douter. A force d'empathie, d'humour et de gentillesse, ils parviennent assez vite à briser la glace et à se faufiler dans leurs intérieurs, au sens propre comme au sens figuré. Ce qui nous vaut de vrais beaux moments de télévision, ici sur France 5. Dans une récente émission dont la cible était le petit village de Vassieux en Vercors (qui fut complètement décimé par la barbarie nazie), on pouvait se délecter de l'histoire de cet homme âgé de 84 ans, admiré par sa fille de... 18 ans et qui, après quelques hésitations devant la contemplation de photos jaunies, nous raconte comment sa nounou lui apprit « à devenir un homme » et s'amuse du mot déniaiser que son interlocutrice veut lui faire prononcer. Il y a aussi ce type un peu égaré, vivant sur ses maigres économies, le temps de devenir un musher et de réaliser enfin ses rêves. Ou ce tchécoslovaque - il tient à cette dénomination - qui retrouve dans le Vercors les paysages de son enfance. Et que dire de ces deux frères agriculteurs qui s'interrogent sur leur avenir et savent que le salaire de leurs femmes est, plus qu'un complément, une nécessité vitale ? En campagne, tel est le nom de cette série de dix émissions, mérite vraiment qu'on s'y attarde tant l'attention et l'écoute de ses instigateurs fait souffler un air vraiment rafraîchissant sur un paysage audiovisuel qui sent bien trop souvent le renfermé. On respire vraiment et ça fait du bien.

  • Lumineux

    L'herbe n'est pas toujours plus verte ailleurs. Je me faisais cette réflexion hier, vers 14h03, au moment où je descendais l'escalier qui sépare mon bureau d'une salle de réunion, un étage plus bas. Parvenu à mi-étage, voici le spectacle qui s'est offert à mes yeux :

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    Rien moins qu'un vitrail signé Jacques Gruber - avoir la possibilité de l'admirer chaque jour est un vrai privilège - mais dont le reflet était en outre projeté au mur par un beau soleil printanier (on voit ici que je sais reconnaître à la Lorraine sa faculté d'être soumise aux outrages du beau temps quelques jours par an). Cette peinture éphémère était splendide, j'ai pris le temps de la contempler avant qu'elle ne s'efface.
  • John Remembered

    john mclaughlin,mahavishnu orchestra,shakti

    Je me suis plongé voici quelque temps, c'était au cours de l'automne dernier, dans la discographie très fournie d’un grand monsieur : John McLaughlin, dont la carte de visite, qui s'apparenterait plutôt à un who's who de la musique jouée depuis plus de quarante ans de par le monde, parle d’elle-même. Connu d’abord pour sa participation à l’aventure de Miles Davis - en particulier sur ces albums majeurs que sont In a Silent Way et Bitches Bew - à la fin des années 60, mais aussi à celle du Lifetime du batteur Tony Williams, ce guitariste virtuose a mis sur pieds une formation aujourd’hui presque mythique (en fait, ce qualificatif est idiot, je m'en rends compte, je veux dire par là que ce groupe, en particulier sa première mouture, celles des années 1970 à 1973, continue de me fasciner et que le quintette que McLaughlin avait formé avec Jan Hammer aux claviers, Jerry Goodman au violon, Rick Laird à la basse et Billy Cobham à la batterie semble toujours autant illuminé par la grâce), le Mahavishnu Orchestra, dont l’irradiation maximale (et la nôtre surtout) s’est produite entre les années 1971 et 1976, avant que son fondateur choisisse de s'éloigner d'un gourou un peu envahissant pour se tourner vers d'autres horizons, tout aussi propices à la méditation. Sa grande période créative suivante fut celle de l’ouverture vers la musique indienne : la naissance de Shakti au cours de la seconde moitié des années 70 en est un témoignage vibrant et unique, revivifié bien plus tard sous le nom de Remember Shakti. Une expérience unique que je vous invite très vivement à découvrir. Apprenez à plonger dans ces heures de musique qui semblent jouées en un continuum féerique, dans un étirement rythmique et hypnotique qui en dit long sur les trésors de vie intérieure qui l'habitent, pour mieux nous les offrir, aux antipodes de nos habitudes occidentales qui, elles, semblent courir après un temps frappé au sceau de l'urgence. Avec Shakti, la musique s'installe, elle s'expose en circonvolutions magiques et la confrontation de John McLaughlin avec ses pairs indiens est la source de vrais moments de grâce, où l'âme semble guider les doigts des musiciens. Il faudrait aussi parler de ce guitar trio parfois houleux mais extrêmement lumineux – une virtuosité à six mains qui fut l'objet de pas mal de critiques pas vraiment justifiées et qui nous laissa un disque splendide : Friday Night In San Francisco – avec Al Di Meola et Paco De Lucia, sans oublier l’hommage à John Coltrane que John McLaughlin rendit en 1973 en compagnie d'un Carlos Santana (Love Devotion Surrender) qui venait de publier ce qui reste peut-être son meilleur disque, Caravanserai, puis beaucoup plus tard en 1995 avec After the Rain, ni la belle collection d’albums en compagnie des plus grands (Trilok Gurtu, Elvin Jones, Dennis Chambers, Joey De Francesco, ...). Âgé aujourd’hui de 67 ans, John McLaughlin le Capricorne (voilà ce qui nous relie, en fait, lui et moi) est toujours sur la brèche : en témoigne 4th Dimension, sa formation actuelle où officie Hadrien Féraud, un jeune bassiste français qui fêtera cette année ses 25 ans et Floating Point, le dernier disque du groupe. Homme d’une élégance toute britannique, John McLaughlin m’a en outre fait un jour un très beau cadeau. Remontons un peu le cours du temps et arrêtons le calendrier des souvenirs au lundi 6 juillet 1992… Nous sommes dans les Vosges, plus précisément en la jolie petite ville de Vittel qui organisait en ces temps reculés, chaque été, un festival de guitare (aujourd’hui disparu, faute d’argent, de public et de soutien des collectivités locales... ce qui, à l'heure de la récession mondiale que nous connaissons, paraît nous renvoyer à une époque proche de l'Antiquité, il n'est que de voir les municipalités qui se pressent aujourd'hui pour fermer les robinets à toute dépense risquant de se voir apposer le label culturel, débarrassons-nous vite de tous ces saltimbanques si nous ne voulons pas creuser la dette, creuser la dette, creuser la dette... mais au fait, l'abime ne se trouverait-il pas au tréfonds du cerveau de certains de nos élus ?) où se côtoyaient quelques têtes d’affiches internationales et d’autres, moins en tête et plus locales. On y a vu Carlos Santana, Larry Corryel, Mike Stern… et beaucoup d’autres au rang desquels John McLaughlin et son trio de l’époque (Trilok Gurtu aux percussions, Dominique Di Piazza à la basse). En cette fin d’après-midi, j'arpentais les deux ou trois rues qui forment le centre de la ville (allez vous y promener un jour et promettez-moi de vous livrer à un exercice très instructif : comptez le nombre de salons de coiffure... Vous verrez, vous serez étonnés) et c’est en m'approchant du Palais des Congrès, lieu du Festival, que j’aperçus une silhouette qui m’était très familière : Mister John McLaughlin himself, tout juste sorti de l’exercice obligé de la balance des instruments. Ni une ni deux, je pris mon courage à deux mains – parce que je suis un faux extraverti et un vrai timide – et entrepris de l’aborder pour lui dire, en toute simplicité, combien sa musique avait été importante pour moi. Je me mis à lui parler avec une fièvre enfantine de ce Mahavishnu Orchestra en compagnie duquel j’avais passé beaucoup d’heures de musique. Ah, ce beau groupe sur lequel John McLaughlin régnait, tout habillé de blanc et qui jouait un drôle de rock mâtiné de jazz, urgent, virtuose, cérébral, voire mystique. On lui reprochait de jouer trop vite, de manquer d'âme, de vouloir gagner chaque année la course des 24 Heures du Manche (en particulier dans un magazine spécialisé aujourd'hui dirigé par le comique de service d'une émission de télé-crochet où défilent des créatures très souvent pathétiques, preuve que la roue tourne impitoyablement pour tout le monde, y compris pour ceux qui tentaient de nous faire croire à l'époque qu'ils étaient des êtres révoltés et combatifs). Balivernes, balivernes, on ne critique pas le Mahavishnu par ici : ce groupe brûlait sur scène comme sur disque, on retenait son souffle en écoutant sa musique. Tiens, j’ai même un souvenir très précis : le samedi 6 octobre 1973 (allez savoir pourquoi j’ai retenu cette date, peut-être parce que le même jour, un héros du sport français, le jeune automobiliste François Cevert, venait de se tuer pendant les essais d’un grand prix de Formule 1 de Watkins Glen à l’âge de 29 ans), la télévision (qui comptait trois chaînes exclusivement de service public – certes un peu contrôlé façon Voix de la France – à cette époque, ne l’oublions pas en notre ère de prolifération hertzienne, en voie de mise au pas toutefois) diffusait comme chaque semaine, pendant l’après-midi, un concert de rock dans le cadre d’une émission dont j’ai oublié le nom (Pop 2, peut-être. Oui, c'est ça : même que le présentateur commençait toujours par : « Salut, c'est Pop 2 ! » et vous savez quoi ? Eh bien ce type, c'est l'oncle d'un chanteur qui, lui aussi est membre du jury de cette émission dont je parle un peu plus haut. Notre monde médiatique est bien plus que petit, il est rétréci. Qu'on me rende mes idoles et qu'on expulse ces imposteurs ! Besson, au boulot !). Ce jour-là, j’ai fait connaissance avec le Mahavishnu Orchestra : autour de John McLaughlin, armé d'une somptueuse guitare à double manche et tout de blanc vêtu, officiaient des musiciens dont je ne tardai pas à apprendre qu’ils étaient de grands messieurs de la musique et qui avaient pour nom, je le rappelle au risque de me répéter parce que tel est mon plaisir, Jan Hammer, Billy Cobham, Rick Laird et Jerry Goodman : jazz électrique, musique complexe, d’une intensité stupéfiante. Je découvrais un nouvel univers, moi qui venait de gravir la paisible montagne du Grateful Dead (grâce au concours très particulier de mon gentil Arbre à Disques) et qui m’initiais depuis quelques mois à ce mouvement qu’on appelle le rock progressif (Pink Floyd, Yes, King Crimson, Genesis) ou la musique dite de l’École de Canterbury (Soft Machine, Matching Mole, Caravan, Hatfield & The North, ...). Une heure de concert à tomber de joie, suivie d’une virée en ville, à grands pas comme d'habitude, pour dénicher l’album chez mon disquaire favori. Patatras ! Rien dans les bacs ! Birds of Fire ? Connais pas mon bon monsieur… Impatience et rage, il me le fallait, en plus, pour une fois, j'avais mis de côté assez de sous pour me payer un disque (eh oui, les jeunes : je parle d'un temps où l'on achetait les disques, étonnant, non ?)… ce qui fut fait quelques jours plus tard (le 19, restons précis, je ne me rappelle plus l'heure exacte, vous m'en voyez désolé), à mon grand soulagement… Il est vrai qu’à cette époque, dans une petite ville de la Meuse, si jolie soit-elle et traversée par le fleuve, il fallait beaucoup plus qu’un clic (légal bien sûr) pour se procurer certains trésors… On attendait, parce qu’on ne pouvait pas faire autrement, on questionnait son commerçant, on lui montrait un article paru dans Best ou Rock’n’Folk, parfois notre vendeuse favorite notait la référence sur son cahier et nous promettait d’en parler au représentant lors de sa prochaine visite. Aujourd’hui… clic, clic et clic… et deux jours plus tard, l’objet est glissé dans votre boîte aux lettres (enfin, ça dépend du facteur tout de même : y a les méthodiques qui passent le carton sans dégât, d'autres qui massacrent un peu l'emballage en prenant un air dégagé, d'autres enfin qui renoncent et vous laissent un petit mot vous expliquant qu'ils reviendront demain, toujours en votre absence puisqu'à la même heure. Charge à vous d'aller, le lendemain, récupérer votre bien au bureau de Poste le plus proche. Conclusion : le disque est resté plus longtemps dans les entrepôts de La Poste qu'il n'a mis de temps à voyager, nous vivons une époque moderne). Tant qu’il y aura des objets, bien sûr…

    Nostalgique, moi ? Tu parles… Bon, j’en étais où… Ah oui, ma rencontre avec John McLaughlin, ces petites choses que j’avais envie de lui dire, ma seule façon de le remercier, de lui expliquer combien sa musique avait pu m’aider et continuait d’être présente dans mon quotidien. « Je voulais vous dire que Mahavishnu, c’est un groupe que j’ai écouté pendant tout le reste de mon adolescence, j’ai même révisé mon baccalauréat en écoutant Visions of the Emerald Beyond en 1975, ce disque avec Jean-Luc Ponty au violon qui engage des duels somptueux avec vous avant que les chœurs ne chantent « Let me fulfill life ! ». Je voulais vous dire merci, tout simplement, pour tout ce que vous avez fait ». Tout sourire, d’une simplicité désarmante et dans un français impeccable (on n'est pas marié à une pianiste hexagonale pour rien), John McLaughlin eut alors cette réplique que je n’ai pas oublié : « Mais vous avez toujours l’air d’un adolescent ! ». Venant de lui, svelte et d'allure juvénile, j’ai cru deviner qu’il s’agissait d’une gentillesse, j’avais 34 ans à l’époque (c'est bizarre de me dire ça, encore un peu et j'aurais eu l'âge d'être mon propre fils... C'est idiot ce que je dis ? Oui ? Tant pis), alors j’ai savouré mon plaisir et quelques heures plus tard, pendant le concert de son trio, je n’ai pas pu éviter de repenser à ces quelques mots, avec beaucoup d'émotion. Une légende vivante m’avait adressé la parole sans être entouré de dix gardes du corps, il n’avait même pas paru incommodé par mon intrusion…

    Dès le lendemain, gagné par la même urgence qu’en ce soir du 6 octobre 1973 où je m’étais mis en quête de Birds of Fire, je filai chez mon disquaire pour me procurer Qué Alegria, deuxième disque que le trio venait d’enregistrer. Sans imaginer forcément que de longues années plus tard, je l’aurais toujours en mains, avec le même plaisir et que je penserais à ces instants comme s’ils s’étaient déroulés quelques jours plus tôt.

    Le temps ne compte pas, de toutes façons, et les souvenirs sont souvent nos meilleurs amis.

  • Rayé

     

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    Paris, au mois de février, du côté des jardins du Palais Royal et des colonnes de Buren. Il y a du chantier dans l'air et pour adoucir le paysage aux yeux des badauds, un «emballage» temporaire nous rappelle les rayures noires et blanches et laisse observer l'avancée des travaux à travers des filtres colorés : bleu, vert, jaune, orange et rouge. Pendant que je contemple ce spectacle un peu irréel, un enfant demande à son père : «C'est quoi, ça, papa ?» et s'entend répondre : «C'est rien, c'est nul, c'est moche». Dommage, il y avait pourtant de quoi passer un moment un peu ludique avec le gamin et lui raconter une histoire en couleurs. La grisaille est dans certaines têtes, aussi...

     

  • Augmentation

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    C'est la crise ! Malgré les injonctions de notre petit monarque neuilléen nous suggérant de travailler plus pour gagner plus - sans nous dire toutefois ce qu'il s'agit de gagner - les effets de la crise financière de l'automne dernier se font sentir jusque dans les recoins les plus insoupçonnés de la vie des français. On le voit ici par exemple : l'offre commerciale proposée par cet hôtel breton est alléchante. Oui, sauf que les gérants de cette maison se sont vus dans l'obligation de prendre une subtile décision... Rallonger de trois jours le mois de février pour compenser la perte occasionnée par une promotion qu'ils n'ont peut-être plus les moyens de prendre à leur charge. Étonnant, non ?

    Merci à Madame Maître Chronique qui a débusqué cette perle au gré de son butinage sur la Toile.

  • Rédemption

    gran_torino.jpgUne idée m'a traversé l'esprit en sortant du cinéma où je venais de voir Gran Torino, le nouveau film de et avec Clint Eastwood : et si c'était le dernier ? Il y a l'âge du réalisateur, certes, qui entrera bientôt dans sa quatre-vingtième année - mais pourquoi après tout ne vivrait-il pas centenaire ? - non... mon interrogation trouvait en réalité sa source dans le scénario de ce film magnifique. Car ce Walt Kowalski, ancien de la guerre de Corée, vieux réac raciste habitant Detroit dans un quartier où il semble le seul blanc, qui grogne plus qu'il ne parle, irascible buveur d'une bière qu'il stocke dans une glacière qui ne le quitte pas, odieux avec sa famille pas finaude et son jeune curé, «un puceau suréduqué», auquel il confesse que «jamais il ne se confessera» et qui ne communique vraiment qu'avec sa chienne Daisy, est un personnage qui s'apparente à une synthèse vieillie des héros virils que l'acteur interprétait autrefois. Sauf que... Ayant tiré d'un mauvais pas son jeune voisin asiatique (qu'il appelle délicatement face de citron), on le voit, petit à petit, briser la glace et attendrir son vieux cuir séché devant la solidarité et la gentillesse d'une famille épatante. Il y a un drame qui va se nouer, mais aussi de sacrées scènes, étonnamment drôles, comme les échanges avec le prêtre, les réactions du vieux Walt aux obsèques de sa femme devant l'attitude désinvolte de ses petits-enfants ou sa découverte de la vie de famille de ses voisins «qui ne le regardent pas en face». Finalement, notre héros impitoyable va se libérer de la souffrance qui le hante depuis ses lointaines années de guerre en sortant ses jeunes voisins des griffes sanglantes d'une bande de voyous violents. En payant le prix fort, celui de la rédemption finale. Comme si le réalisateur lui-même nous adressait un ultime salut, la boucle étant bouclée. C'est magistral, tout simplement.

  • Échantillon

    «Comme chez nous», c'est un excellent documentaire réalisé en deux temps (au printemps et à l'automne 2008) par Jean-Thomas Ceccaldi, qui a posé ses caméras dans le décor d'une petite ville de Seine-et-Marne, Coulommiers. Prenant comme sujet d'étude un échantillon de la population supposé représentatif des préoccupations de l'ensemble des français (un notable, un directeur commercial, un chauffeur de poids lourds, une serveuse, une famille en attente de naturalisation, un employé de la SNCF musicien à ses heures, une femme seule vivant dans un grand dénuement...), il nous fait entendre les réactions de son panel face à l'actualité nationale et internationale. On ne s'ennuie pas une seconde et surtout, le traumatisme provoqué par la crise financière de septembre, est parfaitement restitué. Il y a cette femme qui, quelques mois plus tôt, se réjouissait des heures supplémentaires venant considérablement améliorer son quotidien et sur laquelle rôde maintenant l'ombre du chômage ; ou cet assureur qui s'arrache les cheveux à l'idée de devoir expliquer à certains de ses clients que leurs placements leur ont fait perdre beaucoup d'argent. Ce même homme, très impliqué dans la vie associative, qui confie sa myopathie et laisse entendre qu'il commence à éprouver des difficultés à marcher. Résolument optimiste, il se sent tout de même privilégié de n'être pas comme tout le monde et continue de regarder vers l'avant. Comme une allégorie de notre monde qui souffre et doit trouver les moyens de ne pas s'effondrer. Bravo à France 5 d'avoir osé ce «prime time» de haut vol.

  • Trocavino

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    Ce panneau n’aura certainement pas échappé à l’œil aux aguets des parisiens ni même à celui des touristes flânant du côté du Trocadéro. En le découvrant, je me suis aussitôt rappelé cette phrase de l’inénarrable Pierre Dac qui disait, je le cite de mémoire : "Je préfère le vin d’ici à l’au-delà !". Humour à consommer sans modération…

  • Mystère

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    Paul Guillaume était un marchand d'art fort connu au début du XXe siècle, puisqu'il fut un soutien important pour quelques peintres majeurs tels que Modigliani. Vous pouvez voir ici le salon de son appartement parisien. Mais saurez-vous dénicher le détail qui devrait, en toute logique, attirer votre attention et vous donner un indice sur les conditions dans lesquelles cette photo a été prise. N'oubliez aucun détail et soyez perspicaces !

  • Poches

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    Voici le réjouissant spectacle que peut vous faire découvrir une petite incursion du côté des Puces de Saint-Ouen, plus précisément dans une boutique du Marché Dauphine : ce petit écriteau à l’humour bienvenu ne saura en effet échapper à votre vigilance amusée. Il peut nous rappeler aussi, de façon subliminale et ironique, que nous vivons une époque où la connaissance, la curiosité et la réflexion sont autant d’ennemies d’un consumérisme inconséquent… Ayons la force de résister, quitte à nous fatiguer un peu les yeux, car si nos dirigeants semblent sourds aux réalités du monde réel, ne commettons pas l'erreur, de notre côté, de pêcher par excès d'aveuglement.

  • Raisins

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    Le Musée des Beaux-Arts de la ville de Lyon abrite quelques trésors... Tenez, allez faire un petit tour au deuxième étage et régalez-vous des peintures qui couvrent la période allant du quinzième au vingtième siècle. Plein les yeux... Et tout à la fin de votre visite, dans l'ensemble composé par les toiles du legs Jacqueline Delubac (oui, oui, l'actrice, qui avait fort bon goût ma foi), vous ne pourrez rester insensible à cet "Atelier aux raisins", peint en 1942 par Raoul Dufy. Une petite merveille d'équilibre, où l'inventivité du peintre le dispute à la finesse du trait. Vous n'en voyez ici qu'une partie qui devrait vous donner envie de la contempler. Manque justement, en bas, cette coupelle pleine de raisins qui explique le titre de l'oeuvre. A vous de la découvrir en vous rendant sur place !

  • Réveil

    Comme beaucoup de ses confrères et consoeurs, ce présentateur d’un journal télévisé du soir semblait s’ennuyer très fermement en lisant machinalement son prompteur. Crimes, guerres, crise, faits divers sanglants, rien que l’ordinaire des dépêches en provenance de quelques agences de presse, un fatras éditorial à peine réécrit par sa rédaction en chef et en tous points conformes à celui de ses concurrents. Quand vint le moment d’un entretien avec l’écrivain Dominique Fernandez, venu présenter son nouveau bouquin (consacré à son étrange père)… Et là, miracle de la culture ? révélation au public d’une passion ? Notre journaliste s’enflamma, posant de bonnes questions, laissant à son interlocuteur le temps de lui répondre (une habitude peu courante) et nous donnant envie, de l’autre côté de l’écran, de découvrir ce livre. Il avait lu le bouquin à n’en point douter et semblait enfin être lui-même, comme réveillé par la joie de partager une lecture avec nous.

  • Contrastes

    J’ai passé en début de semaine une petite demi-heure, confortablement installé dans un large fauteuil de cuir au beau milieu du hall de l’hôtel Méridien, du côté de la place de l’Etoile. Observation. Il y a beaucoup d’hommes qui ont l’air très riches, souvent laids, bedonnants, assez âgés et accompagnés de femmes beaucoup plus jeunes qui tiennent à montrer qu’elles s’exhibent aux côtés d’un monsieur avec un gros portefeuille. Parfois, les visages de ces dames n’expriment rien, on dirait que la peau de leur visage est comme trop tendue. Ces hommes et ces femmes sont plutôt blancs, même si l’on croise aussi des familles originaires du Moyen-Orient, nombreuses en femmes et enfants. Quelques chinois également. Au beau milieu de ces grappes humaines qui vont et viennent, avec ou sans ordinateur portable à la main, des hommes d’entretien passent de façon continue un énigmatique balai, dès qu’un client a marché sur un sol qui doit rester immaculé et brillant. Ils sont tous noirs et silencieux. Du côté du bar, serveurs et serveuses se faufilent prestement entre les tables pour servir des consommations hors de prix à des clients qui ne les regardent même pas. Peu de temps avant un concert au jazz club, un chef de rang m’explique comment je dois prendre des photos et ne pas prendre le risque d’attraper dans mon viseur une personne qui ne le souhaiterait pas.

  • Flamboyant

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    Je vous laissais admirer il y a moins d’un mois la beauté des couleurs éphémères qui font qu’un soleil levant est à nul autre pareil. Aujourd’hui, mon paysage matinal met en scène des nuances plus chaudes : le ciel s’est paré de rose et là bas, à l’est, il semble même prendre feu, au risque d’embraser les branches encore nues des arbres. La cathédrale Notre Dame de Bonne Nouvelle, loin d’être indifférente à ce spectacle, est ici un contrepoint contemplatif.
  • Mercantile

    J’ai pris le temps de regarder, voici une semaine, un reportage consacré aux entreprises spécialisées dans le soutien scolaire, en d’autres termes des officines mercantiles qui engrangent sans complexe des bénéfices sans faire la démonstration ni de leur capacité à mettre en œuvre une pédagogie adaptée à leurs publics ni d’une grande transparence dans le recrutement de leurs enseignants. Quant aux résultats, ils ne sont pas divulgués, top secret mesdames et messieurs. Et pour cause, il y a souvent tromperie sur la marchandise, si l’on veut bien m’autoriser cette expression.  Dans ce petit monde qui prospère sur le terreau fertile des angoisses parentales, on n’est pas très regardant en matière d’embauche et l’on s’aperçoit qu’un ancien commercial issu de la grande distribution se transforme aisément en agent recruteur de professeurs selon des méthodes très… approximatives ! Pire encore, de jeunes étudiants, 19 ou 20 ans, tous frais émoulus de je ne sais quelle école de commerce hors de prix, se voient chargés de cette tâche (je ne citerai pas le nom de leur employeur) quand bien même ils n’ont encore exercé aucune activité professionnelle et surtout pas dans le domaine de l’enseignement. Le monde à l’envers…

  • Protecteur

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    Comme si le temps s’était arrêté… Quarante ans après sa naissance, Magma est annoncé à Nancy pour un concert anniversaire et les premières affiches ont fleuri sur les vitrines. La griffe et la typographie sont restées telles qu’elles étaient dès le premier jour. Quant à l’énergie vitale du groupe, portée à bout de baguettes par son créateur Christian Vander, elle est intacte, à n’en pas douter. Au pied de la magnifique Porte de la Craffe, érigée au quatorzième siècle, l’histoire de France semble lancer un clin d’œil tutélaire à l’histoire de la musique.

    Merci à Mad Jazz Boy pour sa photographie.