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  • LED - The Ocean

    LED, The Ocean, Led Zeppelin, Citizen JazzBelle démonstration de la vitalité de la scène jazz suédoise ! Mais LED nous permet surtout de découvrir un batteur arrangeur qui n’hésite pas, comme beaucoup d’autres musiciens désormais, à instiller dans sa musique - d’essence jazz - la part de rock qu’elle mérite. Ou plutôt, si on l’en croit, pour avoir grandi avec une oreille jazz et une oreille rock il estime avoir « bouclé la boucle » avecThe Ocean, un album qu’il publie aujourd’hui sur le label indépendant Kopasetic Productions dans une formation dont on comprendra très vite pourquoi il a choisi de la baptiser ainsi.

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  • Coltrane à Düsseldorf

    coltrane_dusseldorf.jpgOn croit toujours qu’on en a terminé – depuis tout ce temps passé à accumuler des galettes, à classer les enregistrements par session, parfois aussi à écouter un peu de musique - et qu’enfin, le rangement des disques estampillés John Coltrane connaîtra enfin la stabilité que la limitation physique du rayonnage finira bien de toutes façons par lui imposer. La liste des disques est longue, très longue, la pêche très souvent miraculeuse, le feu d’artifice à peine entaché par quelques incongruités mises sur le marché par d’obscurs labels plus soucieux de faire fructifier à bon compte d’inaudibles enregistrements captés avec les moyens du bord sur le dos courbé de la cohorte des collectionneurs – dont j’ai bien peur de faire partie – que de valoriser vraiment le génie du saxophoniste.

    Eh bien non ! La lutte est décidément inégale… Car voilà qu’un label germanique appelé Jazzline nous livre en pâture une petite quarantaine de minutes (bien) enregistrées le 28 mars 1960 dans les studios de la WDR à Düsseldorf.

    Avant d’aller plus loin, il faut situer le contexte assez particulier de cet enregistrement pas comme les autres : huit jours auparavant, le 20 mars très précisément, Coltrane était en train de chahuter bien malgré lui le public venu écouter le quintet de Miles Davis ; sa dernière tournée avec l’étincelante formation du trompettiste et un accueil pour le moins… contrasté ! Il faut dire que le saxophoniste avait laissé libre cours à son imagination la plus iconoclaste, n’hésitant pas à zébrer ses interventions d’harmoniques certainement déroutantes pour une partie de l’audience. Coltrane était déjà sur une autre planète.

    Je vous propose d’écouter son chorus sur « All Of You » lors de ce concert désormais mythique : vous pourrez vous faire une petite idée de ce qu’était le Coltrane en ce début d’année 1960. Loin d’être simplement le sideman accompli qu’on peut retrouver tout au long de la seconde moitié des années 50, Coltrane avait déjà marqué de son empreinte le monde du jazz, en particulier depuis qu’il avait signé pour le label Atlantic et enregistré quelques pépites ayant pour nom Giant Steps ou Coltrane Jazz. On le retrouve ici dans toute la force d’un jeu inspiré par une quête qui ne cessera de le hanter durant les sept années qui suivront, jusqu’au souffle ultime. Un sacré moment de musique à travers lequel on peut certes percevoir une hostilité manifestée par certains spectateurs mais aussi l’enthousiasme de bien d’autres !

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    Deux jours plus tard, les musiciens seront à Stockholm, puis à Copenhague le 24. Plus tard, ils rallieront Francfort, Zurich et Scheveningen. Mais en ce 28 mars, point de Miles Davis (ne me demandez pas de vous expliquer son absence, je n’en connais pas la raison). Voilà donc notre Coltrane promu au rang de leader temporaire d’un quatuor formé par ailleurs de Paul Chambers (contrebasse), Wynton Kelly (piano) et Jimmy Cobb (batterie). Une formation avec laquelle il avait d’ailleurs enregistré Coltrane Jazz. Cet enregistrement ne serait qu’un de plus parmi beaucoup d’autres dans une collection déjà impressionnante si les quatre musiciens n’avaient pas été rejoints aux studios de la WDR par un duo majeur formé de Stan Getz (saxophone) et Oscar Peterson (piano). Comme dirait l’autre, c’est de la bombe ! Le quartet devenu sextet nous livre un magnifique « Medley » où sont incorporés les thèmes de « Yesterday », « Autumn Leaves », « What’s New » et « Moonlight In Vermont » avant de conclure par « Rifftide ». Un moment rare, plus de quinze minutes de musique enchantée et l’idée qu’une page de l’histoire du jazz s’est écrite là, dans la sérénité du talent de ces musiciens hors normes ; et même si les styles de Coltrane et Getz sont très différents, leur opposition est fraternelle, généreuse et baignée d’une lumière dont les rayons continuent de briller plus de cinquante après.

    Ce Coltrane - 1960 Düsseldorf est un petit bonheur. Vous me croirez si vous voulez, mais je lui ai tout de suite trouvé sa place dans ma discothèque.

  • Respect, monsieur Paul !

    Paul-Motian.jpgC’est toujours la même histoire : on a beau savoir que nos héros finiront par quitter ce monde un jour ou l’autre, on a beau savoir qu’un petit coin du Paradis - celui des artistes aux yeux brillant de milliers d’étoiles - leur est réservé et conférera à leur art cette part d’éternité qu’ils ont tant méritée… quand vient le moment du départ, votre cœur saigne et vous n’y pouvez rien. Une lumière s’éteint et plonge votre quotidien dans une pénible pénombre que seuls les témoignages sonores gravés parviennent à éclairer un peu. Et à chaque fois vous enragez de constater que trop d’humains malfaisants se vautrent et s’exhibent dans une insolente longévité qui rend encore plus insupportable l’absence de vos magiciens.

    Hier, j’ai appris la disparition de Paul Motian, à l’âge de 80 ans. Sacré personnage, dont la biographie bien ficelée sur Wikipedia nous rappelle à quel point le batteur aura été au cœur de magnifiques batailles, et jusqu’au bout parce que je ne manquerai pas de souligner ici que, tout récemment encore, je recevais un album entêtant, de ceux qui vous bousculent dans votre douce routine quotidienne, dont il était l’un des magnifiques acteurs !

    Quelques repères pour bien comprendre qu’un très grand monsieur est parti : je ne peux d’abord  ignorer que Motian avait décliné l’offre que lui avait faite un certain… John Coltrane de devenir son second batteur, ce qui peut donner une première idée de son talent. Durant cinq ans, à partir de la fin des années 50, il sera membre du trio de Bill Evans ; quelque temps plus tard, on le trouvera aux côtés de Paul Bley, puis dans un autre trio, celui de Keith Jarrett ; Motian sera également de l’aventure du Liberation Music Orchestra de Charlie Haden. Mais aussi de ce disque mythique que fut Escalator Over The Hill, sous la direction de Carla Bley. La suite est tout aussi pavée de belles attentions (je dis bien : attentions) : c’est à partir du début des années 70 qu’on pourra le voir enregistrer sous son nom, en particulier pour le compte du label ECM et multiplier les collaborations prestigieuses : Bill Frisell, Joe Lovano, Lee Konitz, Dewey Redman, Henri Texier, Chris Potter… J’arrête là cette liste que vous compléterez vous-même.

    Quant au style, d’autres que moi en parleraient beaucoup mieux mais chacun s’accordera à dire qu’il était d’abord un mélodiste plutôt qu’un frappeur. Un musicien subtil, un homme de climats où la finesse le disputait à l’invention.

    Difficile d’opérer un choix dans sa discographie, il y a de quoi se nourrir un bon paquet d’heures, vous pouvez piocher aussi bien dans ses collaborations avec Keith Jarrett que Bill Evans, fouiner dans les productions de son trio avec Bill Frisell et Joe Lovano ou bien prêter une oreille à son Electric Bebop Band (tiens, écoutez donc Garden Of Eden en 2006, par exemple)…

    Ma petite histoire personnelle me relie, très indirectement je le reconnais, au parcours musical de Paul Motian et plus précisément à deux disques auxquels il a contribué. Ce fut d’abord en 1997 lorsqu’Henri Texier réunit une véritable dream team, le temps d’un album enchanté qui s’appelait Respect. Pensez-donc : autour du contrebassiste, Steve Swallow (basse électrique), Bob Brookmeyer (trombone), Lee Konitz (saxophone alto) et Paul Motian, bien sûr. Une belle brochette d’artistes majeurs, du bonheur en condensé d’une heure. Intemporel et indémodable. C’est d’ailleurs à cette époque que j’ai fait la connaissance d’Henri Texier, du côté de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, et je me souviens que nous avions évoqué ce disque si particulier. Je ne pourrai pas l’oublier. Et ce n’est pas un hasard si, comme mû par un réflexe, en souvenir de ces instants privilégiés, c’est à lui que j’ai voulu annoncer sans attendre le décès de Paul Motian.

    Et puis, voici quelques mois, j’ai reçu un disque assez déroutant, fouineur et audacieux, qu’on découvre au fil des écoutes : Consort In Motion est un petit ovni lancé dans la stratosphère du jazz par un jeune tromboniste Suisse, Samuel Blaser, qui s’aventure à un palimpseste hardi de la musique de Monteverdi. Ce musicien, du haut de sa trentaine conquérante, bénéficie pour l’occasion du coup de main déterminant de celui qui allait bientôt souffler ses 80 bougies (le disque a été enregistré fin décembre 2010), monsieur Paul Motian. Mes pensées sont aussi allées vers Samuel, qui savait et savourait le privilège d'une telle expérience.

    Jusqu’au bout, le batteur aura donc été sur la brèche : oui, ce musicien était resté – qu’on me pardonne ce néologisme – créactif parce que la musique circulait avec la même vigueur dans ses veines et se déversait avec un égal bonheur sur nos passions. Elle s’écoule aujourd’hui en larmes irisées, mêlant la tristesse d’une vie qui s’envole et la joie de savoir que l’artiste est encore avec nous pour longtemps.

    Merci, monsieur Paul. Respect !

  • Hé, Manu, tu descends ?

    Quand le pianiste Emmanuel Borghi sort du bois…

    Il y a comme ça des journées qui font du bien. Parce qu’on en a besoin, non, vous ne trouvez pas ? L’avenir est gris très sombre, plombé, et beaucoup d’entre nos concitoyens ressentent violemment les effets du piège qui se referme sur nous, selon une logique implacable dont j’aurais du mal à connaître la raison profonde – la cupidité ? la veulerie ? la stupidité ? la connerie humaine ? – mais qui m’a souvent valu de me faire passer pour un hurluberlu dès lors que j’essayais – c’était il y a bien longtemps, à l’aube des années 80 - d’en comprendre la mécanique et que je n’hésitais pas à employer le mot de dictature pour qualifier le régime sous lequel nous vivions et la folie financière qui se répandait comme la peste (une épidémie dont on pourrait approximativement calculer l’âge, qui avoisine la quarantaine). Attention ! Je ne suis pas naïf au point de croire que tout était mieux avant – je laisse cette illusion à d’autres rêveurs enfantins – mais, comment dire ? Je n’ai pas attendu 2008 pour savoir que nous étions mal barrés et que les capitaines à bord auraient mérité d’être balancés à la mer depuis belle lurette, et sans bouée de sauvetage s’il vous plaît. Nous avons atteint aujourd’hui une sorte de premier sommet sur lequel sont perchés aujourd’hui une poignée d’irresponsables bouffis qui nous expliquent maintenant qu’il va falloir que nous sautions dans le vide si nous souhaitons nous en tirer… Messieurs, sautez les premiers, je vous suis…

    Bref, assez de pessimisme… hier donc, mon salon était baigné d’une lumière d’automne absolument irrésistible : de celles qui vous conduisent inéluctablement à vous prélasser dans le fauteuil où vous vous effondrerez en compagnie d’un livre (tiens, un bon vieux Dashiell Hammett, Le Faucon Maltais par exemple) ou d’un disque (50 Words For Snow, le nouveau Kate Bush dont je parlerai bientôt). Un confort éminemment petit bourgeois, j’en conviens volontiers, mais moment privilégié parce que vecteur du nécessaire oubli passager des brutalités extérieures.

    emmanuel borghi,peter gabriel,don't give up,citizen jazzC’est hier également que le pianiste Emmanuel Borghi a partagé sur un réseau social un premier extrait du disque qu’il publiera au début de l’année 2012.

    Alors ça, mes amis, c’est une excellente nouvelle ! Je ne vais pas vous réécrire l’histoire de ce musicien trop rare mais je pourrai la résumer en vous expliquant qu’après une vingtaine d’années passées au service de la musique de Christian Vander, Manu a tourné la page en 2008, embarquant avec lui femme et beau-frère (Himiko et Antoine Paganotti). Depuis, le sieur Borghi nous a donné de ses nouvelles, ne serait-ce qu’en étant partie prenante d’une réjouissante expérience, SLuG, dont j’avais évoqué le premier disque dans les colonnes de Citizen Jazz. On savait aussi qu’un second bébé limace était en gestation, enregistré dans d’excellentes conditions du côté de Radio France. Un disque qui devrait voir le jour assez vite. Miam miam !

    Voici quelque temps déjà, Manu m’avait confié par ailleurs qu’il travaillait sur un disque en solo et en trio. De quoi nous faire saliver, nous qui n’avions jusqu’à présent qu’à nous mettre sous la dent ses Anecdotes parues en 1996 (je crois qu’on peut encore se les procurer chez Musea, allez-y, c’est un chouette disque !). Une éternité en quelque sorte… Je n'oublie pas cependant qu'entre temps, Manu a participé au groupe One Shot, dont la musique crypto-crimso-zeuhl avait de quoi vous bousculer par sa noirceur méthodiquement dosée.

    Et c’est hier qu’il a choisi de livrer à nos oreilles attentives sa reprise de « Don’t Give Up », une magnifique chanson de Peter Gabriel qu’on avait pu découvrir en 1986 sur l’album So et pour lequel le chanteur s’était adjoint les services d'une certaine… Kate Bush, encore elle ! World is so small.

    C’est mon jour de bonté, alors je vous propose une double écoute. D’abord celle de la version originale :

    Et comme je souhaite ne reculer devant aucun sacrifice, je vous en livre les paroles, dont on s’apercevra vite qu’elles pourraient faire écho aux souffrances humaines de nos temps troubles… Il faut toujours comprendre les textes des chansons, c'est un vieux principe intangible, même lorsque ces dernières font, plus tard, l’objet de reprises instrumentales.

    « In this proud land we grew up strong
    We were wanted all along
    I was taught to fight, taught to win
    I never thought I could failed
    No fight left or so it seems
    I am a man whose dreams have all deserted
    I've changed my face, I've changed my name
    But no-one wants you when you lose
    Don't give up
    'cause you have friends
    Don't give up
    You're not beaten yet
    Don't give up
    I know you can make it good
    Though I saw it all around
    Never thought that I could be affected
    Thought that we'd be last to go
    It is so strange the way things turn
    Drove the night toward my home
    The place that I was born, on the lakeside
    As daylight broke, I saw the earth
    The trees had burned down to the ground
    Don't give up
    You still have us
    Don't give up
    We don't need much of anything
    Don't give up
    'cause somewhere there's a place
    Where we belong
    Rest your head
    You worry too much
    It's going to be alright
    When times get rough
    You can fall back on us
    Don't give up
    Please don't give up
    Got to walk out of here
    I can't take any more
    Going to stand on that bridge
    Keep my eyes down below
    Whatever may come
    And whatever may go
    That river's flowing
    That river's flowing
    Moved on to another town
    Tried hard to settle down
    For every job, so many men,
    So many men no-one needs
    Don't give up
    'cause you have friends
    Don't give up
    You're not the only one
    Don't give up
    No reason to be ashamed
    Don't give up
    You still have us
    Don't give up now
    We're proud of who you are
    Don't give up
    You know it's never been easy
    Don't give up
    'cause I believe there's a place
    There's a place where we belong. »

    Voilà, vous avez la matière première bien en tête ; je vous propose maintenant d’écouter les premières minutes de la reprise (la cover comme disent les anglois) d'Emmanuel Borghi et ses complices.

    podcast

    Emmanuel Borghi : piano ; Antoine Paganotti : batterie ; Blaise Chevallier : contrebasse.

    Lumineux, tout simplement. Je n’ai pas envie d’ajouter le moindre commentaire superflu. Voilà qui nous rend impatients d’écouter tout l’album, qu'on pourra se faire glisser sereinement entre les tympans dans quelques semaines, vers le mois de février 2012.

    Et merci à Manu de m’avoir confié la source à partir de laquelle j’ai pu partager cette musique sur mon blog.

  • Nancy Jazz Pulsations Acte II

    nancy jazz pulsations, nancy jazz pulsations jazzDans ce deuxième épisode, on voit se côtoyer des musiciens escortés d’une légende qui peut soit engendrer la déception (Billy Cobham), soit élever la musique vers des sphères méditatives (Charles Lloyd), alors que d’autres vont faire parler leur lumière propre (Stéphane Belmondo, Manuel Rocheman, Mulatu Astatke). D’autres enfin paraissent un peu désuets (China Moses), voire totalement incongrus (Raphael Gualazzi). Mais en définitive, dix jours de de bonnes vibrations à haute dose.

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  • Pulsations visuelles

    Nancy Jazz Pulsations, Jacky Joannès, citizen jazzPour une fois, laissons nos yeux et rien qu'eux partir en promenade rétrospective du côté des scènes automnales de l'édition 2011 de Nancy Jazz Pulsations. L'ami Jacky Joannès a faufilé ses objectifs au plus près de la musique vivante pour nous proposer une petite sélection sous la forme d'une diaporama d'une bonne quarantaine de photographies. Citizen Jazz lui a bien volontiers ouvert ses portes, et c'est un ravissement, même si l'on ne connaît pas sur le bout des doigts la biographie de chacun des artistes qui sont mis en scène. Il suffit de regarder et d'imaginer... ou de se souvenir !

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  • Jannick aimé

    jannick top, troc, citizen jazzJ’ai réalisé lundi matin par téléphone l’interview d’un musicien décidément pas comme les autres et pour lequel j’ai une grande admiration, quelles qu’en soient les apparentes contradictions. Si vous ne connaissez pas son nom, peut-être que la photographie de cette note vous fera penser que sa silhouette ne vous est pas totalement inconnue. Cherchez bien… Vous n’êtes pas au fait de l’histoire de Magma ou de la Musique des Sphères ? Aucune importance car je serais surpris si vous ne l’aviez jamais aperçu aux côtés de chanteurs comme… Michel Berger, France Gall, Johnny Halliday ou, tout récemment, Jacques Dutronc. Une drôle de schizophrénie artistique sur laquelle j’ai pu échanger avec lui, et obtenir des réponses très intéressantes, voire émouvantes.

    Je veux parler de monsieur Jannick Top.

    Cet entretien, lié à la parution du second disque de Troc, un groupe dont il fait partie et qui avait été formé en 1971 par le batteur André Ceccarelli, fera l’objet d’une parution prochaine dans Citizen Jazz, en lien avec la chronique de l’album. Il s’agit vraiment d’un petit événement parce que Troc 2011 est en fait le second disque de cette formation, dont l’existence très éphémère avait pris fin en 1972. Notamment parce que Top, bassiste surpuissant, avait été repéré par un certain Christian Vander, le Kobaïen fou qui s’était empressé de le débaucher pour l’embarquer sur sa drôle de planète dont la pureté n’a jamais été sans laisser dans son sillage un petit parfum d’ambiguïté. Une collaboration qui durera environ deux ans, avant une nouvelle tentative d’association en 1976 (Vandertop) et pour finir, la séparation. Puis une exploration par Top, certes moins créative mais probablement plus rémunératrice, d’autres univers dans le monde de la variété.

    Sauf que le virus des musiques stratosphériques n’était pas éradiqué : on se souvient de La Musique des Sphères, et dans les années 90 d’un trio plutôt intéressant, STS ; puis un disque remarqué avec le trompettiste Eric Le Lann en 2006 et, dès l’année suivante, une sacrée Infernal Machina où Jannick Top remettait les pendules à l’heure et voulait par là signifier l’importance de sa contribution à l’histoire de Magma (selon moi, les mouvements VII à XI sont probablement l’une des plus belles séquences enregistrées par le groupe ; mais ce n'est que ma modeste opinion et je vais encore me faire honnir par les gardiens du Temple... Pas grave, j'ai l'habitude : même pas peur !). Car s’il prétend avoir voulu rendre hommage à Christian Vander avec sa machine infernale, il n’aura échappé à personne qu’en creux de cette musique sombre, ou plutôt en relief, se dessine très clairement tout ce que le groupe lui devait à l’époque. J’ai mis des années à comprendre pourquoi Köhntarkösz était mon disque préféré de Magma (bien loin devant tous les autres). J’avais certes remarqué qu’il ne ressemblait en rien aux autres, et surtout pas à ceux de la martiale trilogie Theusz Hamtaahk qui me continue de me gêner un peu aux entournures (cette fois, je suis banni à jamais...), mais il m’a longtemps échappé à quel point l’âme de Top souffle sur cette musique. Ecoutez le final de l’album, vous saurez de quoi je parle.

    Dans l’interview, Jannick Top explique qu’il a toujours ressenti le besoin de ne pas se cantonner à un seul projet, qu’il lui faut évoluer dans le changement. On est content, cependant, de constater qu’il a retrouvé ses vieux copains et qu’il a déployé avec eux une énergie très saine pour nous offrir une musique imprégnée de rock, de jazz, de soul et de funk. Le disque respire le plaisir de jouer ensemble. Un vrai cocktail vitaminé ! Surtout que Troc nous revient presque dans sa formation d’origine : autour de Ceccarelli et Top, voici à nouveau Claude Engel à la guitare et Alex Ligertwood au chant. Seul le pianiste Henri Giordano n’est pas de la fête mais son remplaçant est un certain Eric Legnini, à lui-seul une assurance groove.

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    Top est au top, dans ses compositions revient souvent le mot spirit et ça me plaît bien !

  • Elliott Murphy

    elliott_murphy.jpgMais que vient donc faire un disque d’Elliott Murphy, le plus français des songwriters américains, héritier tout à la fois de Bob Dylan, Bruce Springsteen ou encore Lou Reed, dans les chroniques de Citizen Jazz ? Pas du jazz, nous dira-t-on ! Non, en effet, pas du jazz : juste un disque brillant, tendu comme un arc, à sa manière un disque parfait où s’entrecroisent avec beaucoup de fluidité ballades teintées de blues et rock’n’roll endiablés. Et une étonnante faculté d’enchaîner hits potentiels et classiques instantanés. Prêtez donc, pour vous en convaincre, une oreille à « Gone, Gone, Gone », « Train Kept A Rolling », « Rain Rain Rain », « Rock’n Roll ’N Rock’n Roll » ou encore au très dylanien « Poison’n Grace » qui déroule les paysages d’une Amérique cinématographique avec un fort pouvoir de séduction.

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    Et une petite vidéo, pour la route !

  • Nancy Jazz Pulsations Acte I

    cj_henri_texier.jpgNJP 2011, c’est fini ! Au-delà d’un bilan qui atteste de la vitalité du festival malgré des nuances qu’on doit apporter (si la fréquentation globale, tous lieux et concerts confondus, est en progression, le cru 2011 aura été moins faste au Chapiteau de la Pépinière que son prédécesseur dont on s’aperçoit a posteriori qu’il était exceptionnel), Nancy Jazz Pulsations demeure pour Nancy et la région Lorraine un événement automnal de premier plan.

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  • The sound of silence

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    J'étais récemment dans le TGV qui me conduisait de Paris à Nancy. Un train facétieux qui a pris la voie buissonnière et accompli le trajet en plus de cinq heures au lieu des 90 minutes annoncées... Plutôt que de ronchonner et me rallier à une cause sans objet (comment peut-on imputer à la SNCF le choix d’une voie ferrée comme terrain de suicide ?), j'ai entrepris la rédaction d'une chronique à destination de mon blog ou de Citizen Jazz.

    Seul hic : le disque que j’avais décidé d’évoquer ne m’a pas vraiment transporté. Non qu'il soit mauvais, mais simplement parce qu'il m’a laissé sur le bord de sa route. Je n’ai pas réussi à monter dans l’embarcation. C’est ainsi : comme tout être humain, je revendique le droit à une sensibilité singulière qui ne peut tout absorber et s’extasier à l’infini. Même si je crois avoir montré ici une certaine ouverture d’oreille.

    Une fois mon texte terminé, j'ai longuement pesé le pour et le contre, avant de me rendre à l'évidence : je n'aime pas armer ma plume d'une lame trop tranchante. S'il peut m'arriver ici ou là d'émettre une opinion négative (comme je l'ai fait voici peu de temps après un concert catastrophique proposé par Nancy Jazz Pulsations), c'est en général pour mieux souligner d’autres éléments qui, eux, m'ont enthousiasmé. Mais la chronique négative n'est pas ma tasse de thé ; je lui préfère le silence. Libre à d'autres de s'exprimer s'ils le souhaitent : de mon côté je préfère mobiliser mes énergies positives.

    Alors voilà : je garderai ce texte pour moi. Inutile de peiner ou de blesser, je n'en ai pas envie.

  • Jubilation

    troc-2011.jpgLe monde est gris. Tout cela ne date pas d’hier, mais l’actualité nous le rappelle minute par minute en nous infligeant le spectacle d’un système qui s’effondre, victime de sa propre logique auto-destructrice. Alors il n’est pas mauvais, parfois, de faire un peu le vide et de se concentrer sur quelques plaisirs simples. De petits bonheurs à partager.

    J’ai entre les mains deux disques réjouissants dont je vais écrire les chroniques pour Citizen Jazz durant le week-end. Cette perspective, à la fois ludique et studieuse, sera un antidote très efficace (mais temporaire, je le sais bien) à la morosité anxiogène du quotidien.

    Et comme dirait l’autre, c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes ! Je vous en donne la preuve sans attendre…

    Il y a d’abord les suédois de Led, cinq soufflants pétulants et un batteur arrangeur que je découvre (Peter Danemo) qui revisitent avec The Ocean le répertoire de Led Zeppelin : tonique, ludique, une des très belles surprises de cette rentrée.

    Et puis, que dire des papys (ils me pardonneront ce qualificatif amical) de Troc sinon qu’ils nous font un énorme plaisir à redonner vie à ce groupe vitaminé qui allie funk et jazz-rock et dont le premier (et unique album jusque-là*) fêtera ses 40 ans l’année prochaine. André Ceccarelli, Alex Ligertwood, Jannick Top et Claude Engel se sont retrouvés avec un plaisir énorme qui déborde de chaque note jouée et le renfort d’un jeunot appelé Eric Legnini (le pianiste belge remplace Henri Giordano dont la santé ne lui permettait pas de repartir à l’aventure). Voilà une galette qui fait un bien fou tant elle est l’expression radieuse d’un collectif dont les membres n’ont rien à prouver mais qui ont toujours faim de musique, c’est évident.

    Allez-y, prêtez leur une oreille, je suis certain que vous ne le regretterez pas.

    * Disque publié à l’époque sur le label CY Records et malheureusement introuvable aujourd’hui. Je lance ici un appel à une âme charitable parmi vous, qui aurait la gentillesse de me permettre de l’écouter !

  • Tu danses ?

    tu danses, christian mariotto, philippe canovas, jean-marc baccarini, bernica octetSi vous connaissez Nancy, vous serez forcément passés du côté de la Place Saint Epvre, qui fait face à la Basilique du même nom, au cœur de la ville vieille. En répétant vos visites à ce lieu où les terrasses des bars ont fleuri au fur et à mesure que l’on en chassait péniblement les automobilistes, vous ne tarderez pas à débusquer un ou plusieurs spécimens d’une variété d’êtres humains bien particuliers : les musiciens. Cachez-vous derrière un poteau et observez attentivement : ici, un Jean-Michel Albertucci (pianiste, voire contrebassiste), parfois coiffé d’un bonnet péruvien, sirote un café allongé en griffonnant des notes sur un bout de papier ; là, juste à côté, on peut aussi croiser le chemin d’un Sylvain Courtney (guitariste) dont on devine qu’une mélodie (une future composition ?) trotte dans la tête. Avec un peu de patience, vous ne tarderez pas à identifier d’autres congénères.

    Tiens, par exemple, la semaine dernière, je me suis retrouvé nez à nez avec un quart du Bernica Octet. En toute logique, vous avez compris que je faisais face à deux musiciens  (Octet / 4 = 2) : Pierre Boespflug (pianiste) et Christian Mariotto (batterie). Un petit temps de bavardage, quelques minutes d’échanges et l’évocation d’un trio appelé Tu Danses ? Mariotto en est l’un des membres avec le saxophoniste Jean-Marc Baccarini et le guitariste Philippe Canovas. Quelques jours plus tard, je retrouve dans ma boîte aux lettres une enveloppe avec les deux CD publiés par Tu Danses ? qui ressemble fort à une invitation à découvrir sa musique. Excellente idée car la première écoute s’est avérée très séduisante. J’aurais pour l’instant un peu de mal à traduire mes impressions (considérez-moi comme un moteur diesel de l’écriture) mais j’ai ressenti un vrai plaisir en me trouvant ainsi confronté à un univers empreint de liberté mélodique et de rebondissements permanents. Il y a quelque chose de très tonique et stimulant chez ce Trio, qui me donne envie d’y retourner au plus vite.

    Il faut aussi que j’aille faire un petit tour très vite du côté de mes collègues citoyens pour vérifier si Autres Directions, le deuxième album (enregistré en septembre 2010 et publié au printemps 2011) a fait l’objet d’une chronique sur notre site préféré.

    A l’heure du foisonnement des échanges sur les réseaux sociaux et de l’observation critique de leur virtualité, il y a du bon dans une telle rencontre « pour de vrai ». Comme une petite dose d’oxygène qui vous ramène à la respiration de l’essentiel.

  • Sans limites

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    Allez hop, un bon vieux virage à 180 degrés ! Après le prairie rock de l'attachant Indio Saravanja ; après le southern rock du regretté Duane Allman, je vous emmène pour un petit tour chez un jeune tromboniste Hélvète dont on parle de plus en plus et qui semble n'avoir pas froid à la coulisse...

    Attention toutefois : je préfère annoncer ici qu'avec Samuel Blaser, nous ne sommes pas forcément en terrain balisé et qu'il faut accepter d'être un peu dérangé dans son confort auditif si l'on veut participer aux joutes exploratoires qu'il nous propose. De façon un peu simpliste, on le range dans la catégorie des musiciens dits d'avant-garde. Mais ces étiquettes sont irritantes parce que toujours réductrices. Et traduisent très mal la jubilation qu'on peut éprouver à s'embarquer sur un terrain parfois escarpé mais ô combien fertile !

    C'est le doux prix à payer : celui de l'inconnu et de cette incertitude roborative sans laquelle une création ne serait qu'une répétition. À certains moments, on veut reconnaître, à d'autres on cherche à connaître. Et pour ne rien vous cacher, ce n'est qu'après trois voire quatre écoutes attentives que ce disque a fini par me dévoiler ses atours. Parce que la musique - comme toute forme d'art - est aussi une affaire d'initiation. Au prétexte que je ne parle pas le Japonais, devrais-je en conclure qu'un quotidien de Tokyo ne dit rien d'intéressant ? J'aurais plutôt tendance à opter pour un apprentissage de la langue...

    Samuel Blaser est un musicien actif. Pour ma part, j'avais pu noter la singularité du tromboniste lorsqu'il avait rejoint le Quartet de Bruno Tocanne et ses 4 New Dreams. Plus récemment, son Consort In Motion écrivait un palimpseste audacieux de la musique de Monteverdi, dans un projet auquel était associé le batteur Paul Motian, toujours avide de nouvelles expériences du haut de ses 80 ans.

    Avec Boundless le bien nommé - une traduction possible serait sans limites - Samuel Blaser met en lumière à la fois ses qualités d'improvisateur et de fédérateur. Il faut dire qu'en faisant appel au guitariste Marc Ducret, il trouve un partenaire dont le moins qu'on puisse dire est que le bonhomme a du répondant ! Deux animateurs inventeurs, deux agitateurs artificiers toujours à l'affût, sans cesse prêts à rebondir sur l'idée de l'autre, à la creuser, la décortiquer et la maintenir en vie coûte que coûte. Je profite de la publication de ce disque pour rappeler à quel point Ducret est une personnalité essentielle de la scène actuelle : pour vous en convaincre, refaites un petit tour du côté de son trop éphémère Sens de la Marche ou de ses récents Tower, volumes 1 et 2. Sacré personnage qui va même ici glisser quelques motifs que ne renierait pas un Robert Fripp.

    Le disque est structuré autour d'une suite en quatre parties enregistrées live : à peine le thème rapidement esquissé que la musique s'envole pour une stimulante conversation à quatre voix libres et complices. Quatre parce qu'aux côtés de Blaser et Ducret officient le contrebassiste Banz Oester et le batteur Gerald Cleaver. Ces deux-là sont partie prenante de la fête et ne laisseraient pour rien au monde le débat se dérouler sans eux. Le terme de conversation n'est pas écrit par hasard : il me semble traduire assez fidèlement l'esprit qui règne sur ce disque. Les idées fusent, chacun les reprenant à son compte dans une cause collective : au final, le motif dessiné est réjouissant, imprévisible, foutraque et stimulant.

    Je ne m'y connais pas assez en trombone pour formuler un avis circonstancié sur le jeu de Samuel Blaser. Tout au plus puis-je souligner sa vivacité et ses qualités exploratoires de l'instrument. Ainsi que sa faculté - très appréciable au demeurant - de retrait dès lors qu'il s'agit de permettre aux trois autres de dérouler le fil de leur histoire. Oui, Samuel Blaser a aussi l'intelligence de savoir ne pas jouer pour mieux écouter et rebondir.

    Publié sur le label Suisse Hat Hut, Boundless est séduisant par l'addition de petits trésors d'invention qu'il aligne devant nous, sans complexe et dans un désir d'aller voir ailleurs si nous y sommes.

    Et nous y sommes bien en effet, tout ragaillardis par cette bonne friction que le Quartet nous a accordée. Quant à savoir si Boundless relève de l'avant-garde, de l'après-garde ou de je ne sais quoi, j'aurais tendance à dire que je m'en moque comme de l'an 40. L'essentiel est là, dans la profusion des énergies et le désir de regarder devant soi.

    Sans limites, vous dis-je !

  • Free Bird

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    Voici quarante ans et trois jours précisément que disparaissait Duane Allman, tué dans un accident de moto. Il n’avait même pas vingt-cinq ans et derrière lui déjà de belles pages tournées dans le grand bouquin de l’histoire du rock américain. On devrait plutôt parler de southern rock en ce qui le concerne, lui qui au crépuscule des années 60 avait créé le groupe The Allman Brothers avec son frère Gregg. Une histoire bien courte, beaucoup trop courte, comme on peut le deviner, et une poignée d’albums imbibés d’une forte dose d’un blues rock fiévreux hanté par la guitare de Duane Allman – et particulièrement sa slide guitar. Deux albums urgents et brefs enregistrés en studio (The Allman Brothers (1969) et Idlewith South (1970) ainsi qu’un somptueux Live At Fillmore East (1971) témoignent de l’ébullition de la fratrie Allman.

    Mais Duane, sans son frère, participera au printemps 1970 à une autre aventure à laquelle le conviera Eric Clapton, celle de Derek & The Dominos. Ce groupe laissera en héritage ce que l’on peut considérer aujourd’hui comme l’un des must have de l’histoire du rock, le mythique double album Layla And Other Assorted Love Songs. Disque parfait, presque intemporel dont le titre « Layla » confine au sublime. Les deux guitaristes rivalisent de brillance et de vibration, atteignant là un sommet dont on ne se lassera jamais.

    Tout récemment, Eric Clapton a publié un enregistrement live avec le trompettiste Wynton Marsalis. Leur reprise de « Layla » ressemble à s’y méprendre à un naufrage qui nous fait regarder avec regret, tout là haut, vers le ciel étoilé des musiciens qui sont partis trop vite. Il est parfois coupable de s’acharner à faire vivre ce qui est passé du monde des vivants à celui de l’éternité.