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  • Nancy Jazz Pulsations 2015

    NJP, c'est fini ! Près de deux semaines très chargées en concerts, beaucoup de monde, des moments forts, d'autres moins... Telle est la vie d'un festival. J'ai pu non pas couvrir intégralement l'édition 2015 pour Citizen Jazz mais consacrer à cette manifestation automnale neuf soirées bien remplies dont j'ai essayé de rendre compte à ma façon. Pas question de tout voir (pour mémoire, il y a eu au total 181 concerts) ni d'être partout à la fois. Mes pérégrinations se sont limitées à trois salles : le Chapiteau de la Pépinière, la Salle Poirel et le Théâtre de la Manufacture.

    En suivant CE LIEN, vous pourrez lire ou relire mes élucubrations publiées au fil des jours...

  • #NJP2014, échos des pulsations / 2

    Le Chapiteau de la Pépinière a fait peau neuve : une nouvelle bâche, plus de places debout aussi (au point que les premiers rangs des gradins finissent par être loin de la scène). Ce premier samedi du festival est l’occasion d’une immersion dans l’univers du blues, qui constitue depuis de longues années une tradition du festival. En 2014, c’est une soirée « 3 au lieu de 4 », en raison de l’incident cardiaque dont a été victime Darick Campbell pendant le vol qui le conduisait en France. Pas de Cambell Brothers donc... et forcément, un timing trop serré pour trouver des remplaçants au groupe.

    Le public est venu très nombreux, certain de trouver ce qu’il était venu chercher. Il n’est pas question de surprise, mais plutôt d’une célébration à caractère patrimonial ; le blues est entré dans l’histoire, il mérite bien son temps fort et NJP ne l’oublie pas.

    Lurrie Bell est un chantre du Chicago Blues, qui est né de l’exode rural lors de la Grande Dépression vers les villes industrialisées au premier rang desquelles Chicago. D’un point de vue formel, il s’est traduit par l’introduction d’instruments comme la guitare électrique, la basse et la batterie au couple traditionnel constitué par la guitare acoustique et l’harmonica. Chez Lurrie Bell, on est dans le plus grand classicisme à cet égard : l’heure de concert est marquée par la forte présence de l’harmoniciste Russell Green, qui vient parfois voler la vedette au leader qui, de son côté, vit son histoire avec une intensité communicative. Le son saturé de l’harmonica, associé à un volume sonore trop élevé et au jeu étonnant d’un batteur plutôt à côté de la plaque, ont un peu gâché la fête proposée par un musicien sincère et généreux. Ces réserves mises à part, Lurrie Bell a tout de même largement mérité sa place en cette soirée festive.

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    Lurrie Bell

    Lurrie Bell (guitare, chant), Russell Green (harmonica), Melvin Smith (basse), Willie Hayes (batterie).
    Disque associé : Blues In My Soul (Delmark, 2013)

    Avec sous le bras le répertoire de son bel album My World Is Gone, Otis Taylor avait de quoi magnétiser le public. Et comme prévu, le colosse du Colorado, personnalité très singulière (cet adepte du banjo a été antiquaire, enseignant, entraîneur cycliste...), dénonciateur des injustices sociales et raciales, musicien charismatique défenseur du peuple amérindien et de la tribu Nakota, a rencontré un franc succès suivi d’un rappel mais... comment dire ? Il faut avoir l’honnêteté d’analyser le concert avec un minimum de lucidité : on ne s’y retrouvait pas dans cette musique, si belle dans sa conception originelle, mais ici totalement défigurée par un groupe où dominaient deux insupportables violonistes (capables du massacre en règle de « Amazing Grace »), dont les instruments électrifiés étaient un supplice pour les oreilles, et ce malgré les contorsions à visée sensuelle de l’une d’entre eux, Anne Harris. Tout comme le furent les solos désincarnés et d’une absolue vacuité de chacun des protagonistes d’un soir. Absence de cerise sur ce gâteau un peu indigeste, Otis Taylor est venu sans son banjo, pourtant son compagnon fétiche, le multi-instrumentiste se cantonnant à une guitare électrique pas toujours bienvenue. Dommage ! Mais on ne peut être au meilleur chaque soir et je m’autorise un conseil : écoutez My World Is Gone, c’est un très beau disque.

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    Otis Taylor

    Otis Taylor (guitare, chant), Taylor Scott (guitare), Todd Edmunds (basse), Josh Kelly (batterie), Anne Harris & xxx (violon électrique).
    Disque associé : My World Is Gone (Telarc, 2013)

    Je vous épargne la titraille éculée façon « Son nom est Personne », « Du blues comme Personne » ou « Tout le monde aime Personne ». Parce que Paul Personne, adepte d’un blues rock efficace depuis une quarantaine d’années, musicien chanteur fidèle à ses convictions, celles des origines de sa carrière (dont le déclencheur serait, selon ses dires, l’album de John Mayall Bluesbreakers with Eric Clapton – on peut comprendre la force d’une telle stimulation, tant ce disque fait partie du patrimoine du blues anglo-saxon) mérite un peu mieux que ces facilités convenues. L’Argenteuillais porte bien ses 65 printemps et c’est entouré d’une jeune garde normande (dont les deux frères Anthony et Nicolas Bellanger à la guitare et à la basse) qu’il est venu jouer sa musique tirée au cordeau, émaillée de joutes de guitares à l’unisson qui doivent beaucoup à des groupes tels que Wishbone Ash ou The Allman Brothers Band (j’ai même cru entendre le solo de Dicky Betts sur « Jessica » de l’album Brothers & Sisters... mais ce n’était qu’une impression fugitive). Un set sans faute, dans l’esprit de son récent et réussi Puzzle 14, qui a démontré s’il en était besoin qu’on peut associer avec beaucoup de naturel la langue française avec une musique d’essence américaine. Surtout, jamais Paul Personne ne tombe dans le piège de la mièvrerie si caractéristique de tant de chanteurs de variétés : il est avant tout un homme du blues et du rock qui défend sans faillir sa cause de toujours. Avant le début du concert, on savait ce qu’allait jouer Paul Personne : il a répondu exactement aux attentes du public avec un grand professionnalisme, à défaut d’une originalité qu’il n’a jamais revendiquée. Efficace, honnête et enthousiaste : c’est un bilan dont beaucoup aimeraient se targuer. Et les deux rappels étaient bien mérités.

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    Paul Personne

    Paul Personne (guitare, chant), Anthony Bellanger (guitare), Nicolas Bellanger (basse), Brice Allanic (batterie).
    Disque associé : Puzzle 14 (Verycords, 2014)

    Post-scriptum

    Une double question de ma part :

    - quelle est la justification d’un volume sonore aussi élevé tout au long de la soirée ? Si la qualité de l’acoustique du chapiteau est à l’évidence meilleure qu’auparavant, ce qu’il faut souligner, l’excès de décibels, du début à la fin de la soirée, finit par gâcher une partie de la fête...

    - certains spectateurs semblent avoir oublié qu’il est interdit de fumer dans les lieux publics, comme l’est le Chapiteau de la Pépinière. Les responsables de la sécurité auraient-ils oublié leur machine à claques ?

  • #NJP2014, échos des pulsations / 1

    Première incursion hier soir dans la nouvelle édition de Nancy Jazz Pulsations. Un double concert dans la belle Salle Poirel. Deux formations, deux ambiances bien différentes...

    On commence avec le monde un peu mystérieux du pianiste Craig Taborn et son trio (au sein duquel on ne peut que remarquer l’excellent Gerald Cleaver, d’une justesse et d’une musicalité exceptionnelles). S’appuyant sur le répertoire de l’album Chants, les trois musiciens vont se lancer dans une exploration de l’intime, en sollicitant des influences multiples qui dépassent de très loin le cadre du jazz. Musique souvent hypnotique, volontiers minimaliste voire répétitive, elle est aussi le cadre d’une recherche de trois personnalités qui vont, petit à petit, laisser leurs routes se rejoindre en un final de toute beauté. Il y a beaucoup d’exigence et d’intériorisation dans une telle démarche et on ne peut que souligner la volonté de Craig Taborn de ne pas propager ad libitum la conception d’un jazz trop étriqué dans son exposition thème / chorus / thème. Son caractère cérébral, pour ne pas dire intellectuel, n’est pas de nature à soulever le public, mais plutôt à le questionner. Un pari risqué mais un moment assez fascinant. 

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    Craig Taborn Trio
    Craig Taborn (piano), Thomas Morgan (contrebasse), Gerald Cleaver (batterie).
    Disque associé: Chants (ECM, 2013)

    Autant la première partie du concert offrait au public le spectacle parfois distant d’une quête introspective, autant le quartet mené par le guitariste Sylvain Luc et le saxophoniste transalpin Stefano Di Battista ne cache pas son caractère extraverti. Il s’agit pour les deux virtuoses de célébrer leur amour du cinéma éternel et des compositeurs de film que sont Ennio Morricone, Nino Rota, Michel Legrand ou encore Anton Karas. Ils alternent, tout comme sur leur récent album Giù La Testa (en français « Baisse la Tête », du film Il était une fois la révolution), ballades acoustiques charmeuses et thèmes marqués au fer d’un jazz funk électrique. On pouvait craindre une course de vitesse ou, dans les instants plus calmes, une tentation crooneuse : même si le traitement de certaines compositions penche parfois du côté du trop joli, le quatuor parvient à déjouer le piège de la démonstration technique, principalement grâce à Sylvain Luc, capable de faire craquer le vernis d’une musique consensuelle à grands coups de canifs électriques et de riffs dissonants. Stefano Di Battista opte comme à son habitude pour une posture très professionnelle et c’est au saxophone alto, sur les thèmes les plus rapides, qu’il délivre le meilleur de son jeu. Et surtout, en appui de ce duo musclé, il faut souligner la présence roborative du jeune prodige au physique poupin Pierre-François Dufour (lui aussi virtuose, de formation classique et bardé de nombreux prix depuis son très jeune âge au point qu’il peut afficher une carte de visite impressionnante), qui assurera une grande partie du spectacle en évoluant à la batterie comme au violoncelle, en toute décontraction. Il aura été, en quelque sorte, l'instant fraîcheur de ce concert très goûté par un public, conquis d'avance et venu nombreux.

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    Stefano Di Battista & Sylvain Luc 4tet

    Stefano Di Battista (saxophones alto et soprano), Sylvain Luc (guitares), Daniele Sorrentino (basse et contrebasse), Pierre-François Dufour (batterie, violoncelle)

    Disque associé : Giù la Testa (Just Looking Productions, 2014)

  • Echos des pulsations

    njp, nancy jazz pulsations, citizen jazzVoilà un peu plus d’une semaine que les feux de l’édition 2013 de Nancy Jazz Pulsations se sont éteints. Avec une fréquentation de 100000 spectateurs, toutes manifestations comprises et un total de 29000 entrées payantes, NJP affiche un bilan correct qui est aussi celui de ses 40 ans, fêtés sous le signe de la Nouvelle-Orléans, berceau du jazz.

    Tiens, ce paragraphe ressemble un peu à un communiqué officiel. En fait, c’était juste pour dire que Nancy et sa région ont réussi à bien vibrer au rythme de ces pulsations qui ne sont pas que jazz, loin s’en faut, au prix parfois d’écarts stylistiques très douloureux. Mais l’idée est aussi que le plus grand nombre de spectateurs puisse trouver de quoi puiser dans une offre diversifiée, n’est-ce pas ? Soyons honnêtes toutefois, il arrive que les errements, ici ou là, de la programmation, vous contraignent à subir bien malgré vous de drôles de choses dont on se demande ce qu’elles peuvent bien venir faire là... La palme en revient à la soirée du 14 octobre au Chapiteau de la Pépinière, hétéroclite et frustrante pour tout le monde.

    N’empêche : pouvoir se dire qu’en une dizaine de jours, on a pu assister à une dizaine d’excellents concerts, voire de très grands moments, c’est quand même le plus beau compliment qu’on puisse faire aux organisateurs. Après coup, on n’a plus du tout envie de s’irriter contre une savonnette façon Micky Green ou les prestations insipides de Django à la Créole ou de Térez Montcalm, ni même de se souvenir d’une sonorisation parfois insupportable au Chapiteau de la Pépinière. Non, c’est le meilleur qui reste et c’est très bien ainsi.

    N’ayant pas le don d’ubiquité, il m’a été impossible d’assister aux quelque 212 concerts qui ont été proposés du 9 au 19 octobre dernier. J’ai beau disposer d’un corps gracile dont la souplesse légendaire est de renommée mondiale, j’ai beau avoir appris à survoler les salles habillé de ma mythique cape bleu marine moulante à la vitesse de l’éclair, j’ai beau bénéficier de la capacité d’écouter attentivement un disque tout en lisant Proust à l’envers en braille pendant que je mitonne une quiche lorraine et que de ma main libre je rédige une chronique pour Citizen Jazz en pensant à la prochaine note de mon blog... eh bien, je le confesse, je me suis vu contraint de choisir, de faire un tri, de me résoudre à déserter une salle dont j’aurais volontiers poussé les portes si j’avais eu le talent de me dédoubler. Tiens, un seul exemple, celui du jeudi 17 octobre : l’Opéra fait salle comble pour accueillir Avishai Cohen et sa formation avec cordes ; en même temps, un des combos les plus captivants de la scène hexagonale, l’Imperial Quartet, vient perturber le Théâtre de la Manufacture en poussant en première ligne deux saxophonistes baroudeurs, juste avant que la même salle ne soit électrisée par les fulgurances du grand Nguyên Lê et ses Songs of Freedom. Je n’ai pas réfléchi très longtemps toutefois : perturbation et électricité, ces deux ingrédients étaient faits pour moi. Il n’empêche... l’alternative, c’est pas malin ! [Notez au passage la citation]

    En cet automne 2013, avec la complicité de mon ami photographe Jacky Joannès et de ma rédac’ chef Hélène Collon, je me suis livré pour la première fois à un exercice duquel j’aurai beaucoup appris (vous vous en fichez, mais pas moi) : écrire chaque matin, entre 7 heures et 8 heures, un compte rendu de la soirée de la veille, afin qu’il soit publié dans les meilleurs délais sur Citizen Jazz, imposant parfois à mon pote aux images de déposer ses clichés en pleine nuit dans ma messagerie électronique. Encore vibrant (ou pas) de ce que je venais d’écouter, je me suis efforcé de traduire au mieux ce que j’avais pu ressentir. Alors je vous propose de revenir – si ça vous dit, bien sûr – sur ces heures de musique souvent enthousiasmantes, parfois ennuyeuses, mais toujours à considérer comme le témoignage d’une action forte menée dans une région pas vraiment gâtée depuis des années. C’est aussi, d’une certaine manière, une façon pour moi d’adresser un clin d’œil à Nancy, dont j’aime plus que tout railler la météorologie souvent peu conviviale mais qui, après tout, est une ville où il est assez aisé de passer de très bon moments, bien qu’elle ne soit pas assez géographiquement éloignée à mon goût des vulgarités moranesques... Chacun sa croix ! 

    Voici donc mes Echos des Pulsations, chroniques de NJP 2013

    NB : une contrainte personnelle ne m’a pas permis d’assister au concert de Joshua Redman le mercredi 9 octobre à la salle Poirel. C’est mon grand regret de l’année, avivé par les témoignages enthousiastes de ceux qui ont eu la chance d’être présents ce soir-là.

    Jeudi 10 octobre, salle Poirel

    Bernica Octet / Moutin Factory 5tet

    Vendredi 11 octobre, salle Poirel

    Stéphane Kerecki Sound Architects / Vincent PeiraniTrio invite Michel Portal

    Samedi 12 octobre, salle Poirel

    Térez Montcalm / Kellylee Evans

    Dimanche 13 octobre, Chapiteau de la Pépinière

    Pépinière en fête / Treme Brass Band

    Lundi 14 octobre, Chapiteau de la Pépinière

    Dirty Dozen Brass Band / Bertrand Belin / Micky Green

    Mardi 15 octobre, Chapiteau de la Pépinière

    José James / Christian Scott / Kenny Garrett

    Mercredi 16 octobre, Théâtre de la Manufacture

    Django à la Créole / So Purple

    Jeudi 17 octobre, Théâtre de la Manufacture

    Imperial Quartet / Nguyên Lê Songs Of Freedom

    Vendredi 18 octobre, Théâtre de la Manufacture

    Rémi Panossian Trio / Aldo Romano New Blood

    Samedi 19 octobre, Chapiteau de la Pépinière

    Alex Hepburn / Ibrahim Maalouf / Galactic

  • Nancy Jazz Pulsations 2012

    cj_njp_2012.jpgLa 39e édition du festival aura été, selon Patrick Kader son directeur, plutôt réussie, malgré une météo hostile qui a fortement contrarié la tenue de « Pépinière en fête », soumise à de multiples annulations en raison de la pluie. Un malheureux dimanche après-midi entier ouvert au public dans le parc du même nom, celui-là même qui abrite le légendaire Chapiteau. Malgré, aussi, un creux de fréquentation au début de la deuxième semaine. Problème d’ordre économique ? De programmation ? Difficile de répondre, il faudra analyser plus finement le phénomène dans les semaines à venir, mais les organisateurs de NJP ont le sourire en évoquant les 40 ans que le festival fêtera en 2013, du 9 au 19 octobre, avec pour fil rouge la Nouvelle-Orléans. A cette occasion, cette manifestation « qui se veut populaire mais pas populiste » devra probablement recevoir un soutien plus fort des collectivités locales, pour pouvoir accueillir de belles têtes d’affiche mais aussi pour aller dans le sens d’une modération des tarifs.

    Lire la suite de cet article sur Citizen Jazz...

  • Monsieur Xavier !

    L'un des meilleurs antidotes à la puanteur du monde qui nous entoure, au comportement nauséabond et à la veulerie de ceux qui s'en disent les acteurs essentiels, est peut-être de se tourner vers des personnes desquelles émane un fort rayonnement, une lumière bienfaisante. Ils vous laissent espérer que tout n'est peut-être pas perdu... et vous irradient !

    Il est vrai aussi que la rupture née de la fin de mon travail d'écriture pour l'exposition « Portraits Croisés » n'est pas sans conséquence sur mon propre fonctionnement... Je me sens comme en état d'apesanteur, un peu prostré, à la recherche d'un prochain projet vers lequel je pourrai me tourner pour y engloutir mes forces. The exhibition blues, peut-être... C'est ainsi... Pendant que d'autres nous recommandent de travailler plus pour que, eux et leurs alliés de la finance paresseuse, gagnent plus, je lis dans les temps à venir, plus que jamais, la nécessité de dessiner les contours d'une vie moins utilitaire, plus orientée vers l'irrationnel, au centre de laquelle se trouve, bien sûr, la musique (mais pas seulement).

    Tenter de résister à la tentation consumériste, concéder à la pression quotidienne le minimum d'une dépense souvent peu utile, marquer le pas et réfléchir. Rester lucide. Défier les nuisibles d'un grand bras d'honneur salutaire... Ne pas leur concéder le moindre neurone disponible...

    Revenons donc à une action totalement bénévole, dédiée à la musique et n'ayant pour seul objectif que la propagation vers le plus grand nombre des bienfaits d'une passion partagée par deux amis. « Portraits Croisés » mettra assez largement en scène une soirée retentissante dans l'histoire de Nancy Jazz Pulsations : celle du 11 octobre 1975, qui vit réunis sous le Chapiteau de la Pépinière des noms prestigieux : pensez donc, Dizzy Gillespie, Oscar Peterson, Milt Jackson, Joe Pass et des meilleurs... Une dizaine de monstres sacrés, un « all stars » réuni sous la houlette d'un imprésario fantasque et amateur de bonne chère, Norman Granz. Cette mise en scène sera par ailleurs illustrée d'une manière surprenante, qu'il m'est impossible de révéler pour l'instant, mais dont je suis certain qu'elle devrait étonner celles et ceux qui viendront faire un petit tour du côté de la Médiathèque de Laxou entre le 6 et le 23 octobre. Je précise ici que ce coup de projecteur braqué sur l'édition 1975 de NJP ne constitue qu'une sorte d'enclave, nichée au milieu d'une cinquantaine de portraits individuels mettant en scène des musiciens s'étant produits sur les différentes scènes du festival depuis ses débuts, en 1973.

    Je dois donc peaufiner cet événement dans l'événement en rédigeant un ultime texte de présentation d'une soirée haute en couleurs dont le contenu m'aura été largement inspiré par ma rencontre avec un grand monsieur, Xavier Brocker. Cet septuagénaire éternel adolescent est une figure historique du festival, puisqu'il en fut le premier directeur artistique (en 1973 puis en 1975), à une époque où l'organisation d'une telle manifestation revêtait un caractère beaucoup plus artisanal et d'où l'improvisation n'était pas exclue, qu'à notre époque qui voit la mise en place d'une véritable machinerie et l'implication d'un grand nombre de personnes et de partenaires issus du monde économique.

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    Xavier Brocker © Maître Chronique - Septembre 2010

    Dans l'intimité bruyante d'un bar du centre ville, j'ai ouvert mon magnétophone et laissé ce grand bonhomme me raconter avec une inénarrable faconde et une grande fraîcheur ses aventures plutôt cocasses et les difficultés rencontrées quand il s'est agi pour lui de mettre tout ce petit monde face au public pour interpréter un numéro de musique bien rôdé, jusqu'aux enchaînements de chorus parfaitement huilés par de nombreuses heures de scène. Dix musiciens « professionnels » jusqu'au bout des instruments, attendant l'arrivée de leur imprésario, et refusant de se produire tant que ce dernier, avec lequel et personne d'autre ils avaient signé un contrat d'engagement, ne leur aurait pas donné le top départ. Pas de chance, Norman Granz avait choisi ce soir-là de s'installer à l'une des meilleures tables de l'époque, jusqu'à en oublier l'heure fatidique. Il fallut le débusquer, lui faire comprendre qu'il ne pouvait rester là et que le spectacle devait commencer. Pas commode, le type s’exécuta mais compromit par les mauvaises relations qui s'installèrent alors la soirée du jeudi suivant, dont les têtes d'affiche s'appelaient Count Basie et Ella Fitzgerald. Excusez du peu... Toute cette histoire aurait pu finir en procès si la Ville de Nancy, impliquée dans le financement du festival, n'avait pas eu la bonne idée d'en rester là, tant le risque d'une mauvaise surprise financière était élevé, n'oubliant pas que les Américains, procéduriers et implacables en affaires, avaient mis toutes leurs chances de leur côté.

    J'entends la voix de Xavier Brocker me raconter cette histoire ! Et poursuivre sur d'autres aventures, celles du saxophoniste Archie Shepp, qui, après avoir revendu le billet d'avion fourni par NJP afin d'en acheter un second lui permettant un petit crochet par... Rome ! avait confondu cette année-là Nancy et Massy-Palaiseau ! Et s'apercevant de sa méprise, demandant au chauffeur de taxi de le conduire au plus vite, lui et ses musiciens, soit deux voitures, de la région parisienne jusqu'en Lorraine, aux frais du festival bien entendu. Je revois mon interlocuteur me laisser deviner à quel point lui-même se sentit ce soir-là très mal, à la seule idée de présenter une facture exorbitante à l'organisation de Nancy Jazz Pulsations. « Une annus horribilis ! »... et le risque pour lui d'être complètement discrédité vis-à-vis de ses petits camarades...

    Trente-cinq ans plus tard, Xavier Brocker vit toujours la musique avec la même passion, il ne résiste que très difficilement au plaisir d'une « causerie » où il aura toujours des milliers de petites histoires essentielles à nous raconter, à chaque fois il voudra illustrer son propos par une série d'écoutes à vocation pédagogique. Dans un vrai souffle, celui de l'enthousiasme et d'une jeunesse intacte.

    Je lui dédie bien volontiers mon travail en cours, tout en sachant que je ne suis probablement pas digne de son talent ni même de la force qui l'habite toujours. J'aimerais seulement être animé de la même fraîcheur d'âme que lui, ce serait déjà beaucoup...

  • Rétrospectif

    njp35Ans.jpgOn pourrait s'imaginer qu'avec la tenue de ce blog light et quotidien, j'ai passé aux oubliettes l'idée de m'adonner à mon vice favori : l'écriture de textes longs, aux phrases alambiquées, par lequel j'essaie de m'opposer dans la limite des mes modestes moyens aux pratiques courantes de notre époque qui nous refusent l'essentiel, à savoir la possibilité de prendre notre temps. Eh bien non ! Certes, les productions sur www.maitrechronique.com sont moins nombreuses, mais un nouveau texte est dans les fourneaux et sera disponible sous peu. On y parlera musique et plus particulièrement d'un pianiste que j'admire depuis longtemps maintenant. De plus, il m'arrive aussi d'écrire ailleurs et ce n'est pas sans plaisir que je me permets de vous rediriger vers Citizen Jazz, ce "e-zine" à la rédaction duquel je contribue aussi souvent que je le peux. Ma dernière production est consacrée au festival Nancy Jazz Pulsations, événement musical automnal de la ville de Nancy, qui s'est terminé il y a un plus d'une semaine.

    Lire l'article de Citizen Jazz

  • Fini

    dave_liebman.jpgLe rideau est tombé samedi soir sur le Festival Nancy Jazz Pulsations, qui fêtait en 2008 son trente-cinquième anniversaire. Avant de penser à un bilan un peu plus approfondi, c’est le moment de se remémorer quelques temps forts de la grosse dizaine de soirées auxquelles j’ai pu assister : la fougue prometteuse de jeunes musiciens, tels que les pianistes Tigran Hamasyan ou Yaron Herman ; les flamboyances du Mega Octet d'Andy Emler ; la vibration, entre Bartok et Coltrane, de la Neffesh Music de ce grand monsieur qu’est Yochk’O Seffer ; la grâce qui semble habiter la musique de Dee Dee Bridgewater depuis qu’elle a choisi de conjuguer le jazz et ses origines maliennes ; l’éternelle jeunesse de John Mayall qui, à 75 ans, joue le blues avec l’énergie des premières heures ; l’énorme concert du saxophoniste Dave Liebman (notre photo) qui a littéralement soulevé le Jazz Club de la MJC Pichon, plein comme un œuf d’un public chaviré de bonheur.

  • Brillant

    yaron_herman.jpgEtrange réflexion d'un spectateur voisin lors du récent concert du trio de Yaron Herman à la Salle Poirel, dans le cadre du festival Nancy Jazz Pulsations : "Il ne se passe rien...". Visiblement venu là à l'instigation de sa compagne beaucoup plus enthousiaste, le jeune homme n'est pas entré dans l'univers tour à tour introspectif et explosif du pianiste pourtant riche de mille beautés. Dommage pour lui, parce qu'à 27 ans, Yaron Herman - entré en musique en un temps record après qu'un accident l'ait empêché de devenir basketteur professionnel - se présente comme l'une des figures les plus passionnantes du jazz contemporain. Et l'on peut-être sûr qu'avec lui, il se passera quelque chose et pour se faire une idée de son talent, quelle meilleure introduction que son récent album A Time For Everything ?