Ange - Emile Jacotey Résurrection
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Émile Jacotey Résurrection est né d’une idée simple : en ce monde déshumanisé et plus brutal que jamais, la parole du vieil Émile n’en est que plus actuelle. Voici donc tout le disque entièrement réenregistré par la formation actuelle, soit les dix compositions originelles, auxquelles viennent s’agglomérer, sans distorsion de forme ni de fond, quatre autres dont une Suite pileuse pour pinceau et pubis inspirée par L’Origine du Monde de Gustave Courbet. Cette actualisation est aussi l’occasion d’entendre de nouveaux extraits de l’interview du vieux bonhomme et les paroles de « sa bouche sucrée de légendes » ; cerise sur le gâteau, le travail de mise au jour est présenté dans un beau livre disque incluant un livret de 28 pages. Un objet, digne du propos.
Il faut bien le dire : les réserves qu’on pouvait émettre a priori à l’idée d’une telle démarche sont très vite balayées par l’enthousiasme qui irrigue le disque, du début à la fin. Et c’est avec un grand plaisir qu’on retrouve « Bêle bêle petite chèvre », « Sur la trace des fées », « Jour après jour », « Le nain de Stanislas » ou la longue suite en quatre mouvements « Ego & Deus », sans oublier l’émouvante « Ode à Émile » qui clôt le disque, tout comme en 1975. Les poils se dressent sur les bras... Le son est ample comme au bon vieux temps, Christian Descamps n’a rien perdu de la rage au ventre qu’on lui connaît depuis toujours, et les nouveaux arrangements ont même gagné en nervosité ; ça et là, ils tournent leur regard vers des horizons plus lointains, comme le Maghreb (« Le marchand de planètes ») ou l’Inde (« Jour après jour »).
On saura gré aux musiciens d’Ange d’avoir réussi arrêter le temps et à tendre un fil invisible, mais d’une grande résistance, entre les deux vies de cet Émile Jacotey si attachant, dont les souvenirs nous vont droit au cœur et continuent de nous émouvoir avec la même force. Récemment, Christian Descamps confiait qu’Ange pourrait exister sans lui : on veut bien le croire, mais qu’il nous permette de penser qu’il est plus que jamais l’âme de ce groupe qui continue de nous communiquer son frisson si particulier.
Tristan Descamps (claviers, chant, chœurs), Hassan Hajdi (guitares, chœurs), Thierry Sidhoum (basses, chant, chœurs), Ben Cazzulini (batterie, percussions), Christian Descamps (chant, guitares, accordéon et claviers divers).
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