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  • Et vinrent quatre mecs d’outre musique

    C’est l’histoire d’une belle rencontre entre l’auteur compositeur Marcel Kanche et une formation magnétique aux confins du jazz et du rock, l’i.overdrive Trio.  Au cœur de leur travail de fusion, un certain Léo Ferré...

    kanche_ioverdrive.jpgJe vous dois pour commencer deux confidences : jusqu’à une époque très récente, je n’avais jamais entendu parler de Marcel Kanche. Inutile de me jeter vos reliquats de tomates à la figure, c’est ainsi, l’omniscience n’est pas ce qui me caractérise et je sais revendiquer mon inculture. Néanmoins, en bon petit soldat de la toile, je me suis penché sur sa question lorsqu’un beau matin, j’ai appris qu’il engageait une collaboration avec un groupe qui, lui, m’était tout sauf inconnu. Et là, j’ai su qu’après des études aux Beaux-Arts, notre homme avait navigué dans les eaux plus ou moins troubles et néanmoins expérimentales du rock, du punk et du jazz, et qu’on l’avait retrouvé quelque temps plus tard en collaboration avec Matthieu Chédid ou Vanessa Paradis. Il me faut également avoir l’honnêteté de préciser que si je connais, comme tout un chacun, Léo Ferré, il serait exagéré de ma part de prétendre que je pourrais vous en parler durant des heures. Bien sûr, « Jolie Môme », « C’est extra », ses hommages à Beaudelaire, Verlaine ou Rimbaud ; bien sûr, le vieux lion rugissant et anarchiste, toute crinière au vent. Mais allez savoir pourquoi, quand j’entends le nom de Léo Ferré, une image me revient : celle d’un numéro de la revue Best (en 1973, me semble-t-il) qui avait mis au tableau d’honneur de ses chroniques de disques un album appelé Il n’y a rien plus rien. Un texte enthousiaste, une pochette magnifique et... près de quarante ans plus tard, je n’ai pas encore écouté l’album. Promis, je vais me pencher sur cette affaire, il n’est jamais trop tard.

    L’i.overdrive trio, en revanche, m’a attrapé par la manche voici quatre ans lorsque Philippe Gordiani (guitare), Rémi Gaudillat (trompette) et Bruno Tocanne (batterie) ont rendu un vibrant Hommage à Syd Barrett, membre fondateur et principal compositeur du premier album de Pink Floyd, vite englouti dans le tourbillon de sa folie schizophrène. Un hommage à ce point réussi que le trio parvenait à accomplir une belle performance en s’affranchissant complètement de l’esthétique du groupe tout en préservant son univers mélodique et aussi son mystère. Le nom du trio, rappelons-le, est inspiré de « Interstellar Overdrive », une longue et urgente composition extraite de The Piper At The Gates Of Dawn, premier album du Floyd. 

    Depuis 2008, j’ai eu, par ailleurs, l’occasion de me plonger plus avant dans le travail mené par Bruno Tocanne. Ses disques s’empilent tranquillement chez moi, je ne suis pas loin de les posséder tous ; j’ai même installé chez moi un rayonnage que j’appelle ma Tocannothèque ; j’ai pu, aussi, rencontrer le musicien un beau soir du côté du Château de Montmelas Saint Sorlain et me rendre compte qu’il faisait partie de ceux dont on sait que jamais ils ne trahiront la confiance que vous pouvez placer en eux. Une amitié est née entre nous, et c’est très bien ainsi. Très prochainement, j’évoquerai In A Suggestive Way, son tout nouveau disque (à la réalisation duquel j’ai apporté un très modeste soutien matériel) qui est une petite merveille de sensibilité libertaire et intime.

    Revenons plutôt à Et vint un mec d’outre saison, un disque dont le titre est emprunté à l’épilogue de L’Opéra du Pauvre composé par Léo Ferré. Ce qui frappe d’emblée à son écoute, c’est l’idée d’une brûlure : Marcel Kanche dit plus qu’il ne chante, effleurant la plupart du temps les mélodies originelles (comme par exemple sur la reprise de « C’est extra »). On le sent comme pris à la gorge, livrant de manière abrasive et hantée la poésie du grand Léo. Il y parvient d’autant mieux que l’environnement musical instillé par l’i.overdrive, une fois de plus, maintient l’équilibre entre l’identité de la source (ici la poésie douloureuse de Ferré) et la sienne propre. Jamais envahissante, jouant comme sur son premier disque la carte de l’épure dans une formule plutôt rare : trompette, guitare et batterie, la tension maintenue par le trio apporte ce je ne sais quoi d’hypnose et de puissance qui forment un très bel écrin aux mots déclamés par Marcel Kanche. Ni jazz, ni rock, un peu les deux, un peu autre chose. Une certaine idée de l’outre musique, en quelque sorte, avec cette combinaison d’électricité des cordes (impeccable Philippe Gordiani, qui n’hésite pas à tisser une toile sonore ou marteler des imprécations rythmiques dans lesquelles plane l’ombre d’un certain Robert Fripp, qui n’est jamais loin, souvenons-nous de son magnifique « From KC To Gawa » sur le bouleversant disque du Libre(s)Ensemble, KC signifiant, vous l’avez compris, King Crimson) et d’appels lancés par la trompette de Rémi Gaudillat, jamais à court d’envolées qui ressemblent à des hymnes. Tocanne, lui, sait ce qu’il a à faire : en musicien toujours à l’écoute et en éveil, il délivre son jeu dont les nuances évoquent une autre idée, celle de l’impressionnisme. On n’est pas disciple de Paul Motian pour rien, même lorsque le propos exige, ici ou là, de frapper (en témoigne un violent et court « Le chien », moins de deux minutes et un beau coup de poing). J'aimerais aussi souligner la beauté formelle du son de sa batterie, toute en humble élégance... Un modèle du genre.

    L’histoire nous dit que Léo Ferré aimait Pink Floyd ; elle nous raconte aussi que Marcel Kanche fut séduit par l’i.overdrive Trio lors de la publication de son premier disque ; elle est encore plus belle quand on sait que Marie et Mathieu Ferré ont offert à Marcel Kanche, après une rencontre quelque part en Toscane, « Le chemin d’enfer », un somptueux titre inédit de Léo, qu’on peut découvrir sur Et vint un mec d’outre saison. Le disque nous raconte tout cela, comme dans un seul souffle, sans possibilité de repos pour celui qui veut s’y plonger. C’est un cadeau précieux, qui maintient vive la flamme d’un poète singulier, mais sans jamais sombrer dans une quelconque nostalgie ni dans le piège de la fossilisation hagiographique. Ces « chansons » sans âge sont comme torréfiées par un quatuor inspiré qui nous administre un bel exemple d’appropriation exempte de tout risque de trahison.

    Alors « Ni Dieu ni maître » ? Peut-être... mais on dirait bien que la passion aura été un guide fort stimulant pour mener à bien l’aventure d’un disque qui ne ressemble qu’à lui-même et dont les stances captivent du début à la fin.

    Une question me vient, tout à coup : après Syd Barrett et Léo Ferré, à qui le tour ? Ce ne sont pas les idées qui manquent... A bon entendeur !

  • Philippe Canovas - Thanks

    philippe canovas, thanks, citizen jazzCe disque du guitariste Philippe Canovas mérite vraiment qu’on s’y arrête. On ne le trouvera pas sous forme de CD, signe des temps, malheureusement. Mais le guitariste a trouvé refuge sur un e-label appelé Cordes et Âmes, qui assure le téléchargement non seulement de sa musique en haute qualité audio (au format FLAC, au même prix que le mp3), mais aussi du livret. Une production également disponible sur la plupart des plateformes de téléchargement.

    Cette confession musicale est à savourer sans modération, car l’expression de Philippe Canovas, d’une élégante discrétion, n’en est pas moins porteuse de beaucoup d’imaginaire.

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  • Emmanuel Borghi Trio - Keys, Strings and Brushes

    ebt_ksb.jpgLes temps sont durs. Comment un tel disque a-t-il pu, à ce jour, ne trouver d’autre canal de diffusion que celui des plateformes de téléchargement, et n’exister que de façon virtuelle sur le label Off alors que sa musique, bien réelle, est chargée d’une aussi profonde inspiration ? Une publication presque confidentielle qui laisse un goût amer, celui d’une forme d’injustice par le silence qu’il s’agit ici de réparer autant que faire se peut.

    Comme une nouvelle page qui se tournerait enfin, celle d’un accomplissement tant artistique qu’humain, Keys, Strings And Brushes est une célébration pacifiée de la musique qui habite Emmanuel Borghi depuis toujours...

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  • Nancy Jazz Pulsations 2012

    cj_njp_2012.jpgLa 39e édition du festival aura été, selon Patrick Kader son directeur, plutôt réussie, malgré une météo hostile qui a fortement contrarié la tenue de « Pépinière en fête », soumise à de multiples annulations en raison de la pluie. Un malheureux dimanche après-midi entier ouvert au public dans le parc du même nom, celui-là même qui abrite le légendaire Chapiteau. Malgré, aussi, un creux de fréquentation au début de la deuxième semaine. Problème d’ordre économique ? De programmation ? Difficile de répondre, il faudra analyser plus finement le phénomène dans les semaines à venir, mais les organisateurs de NJP ont le sourire en évoquant les 40 ans que le festival fêtera en 2013, du 9 au 19 octobre, avec pour fil rouge la Nouvelle-Orléans. A cette occasion, cette manifestation « qui se veut populaire mais pas populiste » devra probablement recevoir un soutien plus fort des collectivités locales, pour pouvoir accueillir de belles têtes d’affiche mais aussi pour aller dans le sens d’une modération des tarifs.

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  • King Crimson (Aymeric Leroy)

    alkc.jpgAprès Pink Floyd, plongée dans l’œuvre d’un groupe paradoxal et Rock progressif, King Crimson est le troisième livre écrit par Aymeric Leroy pour le compte de l’éditeur marseillais Le Mot et le Reste. On peut faire confiance à l’auteur pour nous proposer une approche captivante de ce groupe anglais dont l’identité progressive a été incarnée durant plus de quarante ans (de 1969 à 2003, pour la discographie) par la personnalité plutôt austère de son leader Robert Fripp ; mais une identité également forgée par une volonté de renouvellement fonctionnant par cycles, avec notamment pour conséquence de fréquents changements de personnel.

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