Unité
Paris, dans une sorte de self service sans âme du hall de la Gare de l'Est. Arrivé un peu en avance, je bois une bouteille d'eau minérale en attendant mon TGV. Je suis assis sur une chaise haute parmi quelques bipèdes qui, comme moi, tentent de tuer leur temps sans en avoir l'air. Après m'être échiné en vain à me raccorder à un réseau wi-fi public, j'observe du coin de l'œil un type qui vient nous demander de lui prêter un téléphone portable, le temps de passer un rapide coup de fil. Les candidats sont peu nombreux et après une courte hésitation, ma voisine de comptoir lui tend timidement son appareil. Elle saisit elle-même le numéro que le type lui dicte, puis lui confie le précieux objet. On devine toutefois à son regard interrogatif qu'elle n'est pas certaine des intentions du bonhomme. Quelques secondes plus tard, celui-ci lui rend naturellement le téléphone et commence à psalmodier une comptabilité geignarde de toutes les demandes sans succès qu'il a dû effectuer avant que quelqu'un accepte de lui rendre service. Il se plaint du manque de solidarité de ses contemporains et nous explique ensuite, preuves en main, qu'il ne réussit plus à faire fonctionner une carte téléphonique malgré 50 unités restantes. Une carte payée 14 € désormais inutilisable. Pourquoi est-il si bavard ? Je lui explique que, très probablement, il a dû la mettre en contact avec un objet qui l'aura démagnétisée. Bref, un début de conversation s'engage, mais qu'il est étrange ce sentiment de malaise qui nous gagne tous à l'idée de l'avoir unanimement soupçonné de nous jouer une vilaine entourloupe.
Commentaires
Je me serais aussi méfiée... pourtant je ne devrais pas.
A l'époque où je n'avais pas de téléphone portable, il m'est arrivé d'en emprunter un dans cette même Gare de l'Est pour prévenir d'un retard de train et je n'ai eu aucun mal à trouver quelqu'un pour m'en prêter un. Comme quoi, je dois inspirer confiance. Mais faut-il se fier aux apparences ?