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Rock Progressif

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Ah... ça sent la nostalgie, c'est bien ce que vous pensez, n'est-ce pas ? On pourrait le croire en effet au terme « rock progressif » qui fleure bon les seventies... En réalité, ces quelques lignes sont nées spontanément d'une actualité réjouissante : celle de la publication à la fin du mois d'avril aux Editions Le Mot et le Reste d'un excellent bouquin éponyme sous la plume d'un jeunot - né en 1973, Aymeric Leroy n'était même pas une idée dans l'esprit de ses parents lorsque King Crimson posa en 1969 la pierre fondatrice d'un mouvement musical foisonnant avec la publication de In The Court Of The Crimson King - qui s'est fait connaître tant par sa contribution au magazine Big Bang que par son expertise sans équivalent pour tout ce qui concerne l'École de Canterbury, née dans le sillage du groupe Soft Machine. Au point qu'il lui a consacré un site Internet particulièrement précieux nommé Calyx. Aymeric Leroy est par ailleurs l'auteur, chez le même éditeur, d'un excellent bouquin sur Pink Floyd.

La définition du rock progressif n'est pas aussi simple qu'il pourrait y paraître au premier abord. Aymeric Leroy multiplie les arguments, réfute certaines thèses et n'oublie pas de souligner l'influence de certains artistes qui, sans qu'on puisse leur apposer l'étiquette du rock progressif, ont néanmoins contribué à l'évolution du rock vers, je cite l'auteur : « une émancipation du carcan couplet / refrain excessivement limitatif de la pop, s'exprimant en premier lieu dans un rééquilibrage des rôles entre voix et instruments au bénéfice des seconds ». Ces artisans d'un « proto-prog » se nomment Beatles, Cream, Jimi Hendrix, Procol Harum, Moody Blues ou bien encore The Who.

Et plutôt que de se livrer à un fastidieux passage en revue exhaustif de toute la production discographique composant l'univers du rock progressif, Aymeric Leroy choisit une présentation chronologique découpée en grandes époques - une quinzaine depuis la fin des années 60 jusqu'à nos jours - assorties parfois de quelques incursions vers des pays non anglophones comme l'Allemagne, la France, l'Italie ou l'Espagne.

Avec un tel angle d'attaque, on mesure beaucoup plus aisément le rôle respectif de chacun des grands acteurs de cette saga, une épopée souvent raillée par les tenants d'un rock pur et dur ou certains intégristes d'un jazz confisqué, confits dans une désagréable condescendance - un comble pour cette musique tellement empreinte de liberté et d'invention. Sans nier pour autant le fait que, bien que faisant depuis quelques années l'objet d'un revival, le rock progressif appartient tout de même pour l'essentiel au passé, même si ses grands noms continuent de résonner fort dans l'esprit de beaucoup de gens : King Crimson, Yes, Genesis, Emerson Lake & Palmer pour citer quatre têtes d'affiches - présentes d'ailleurs en première page de couverture - parmi un casting particulièrement fourni.

Et encore... ce passé rejoint parfois le présent, s'y mêle, les époques se croisent et donnent naissance à d'autres expressions souvent très heureuses : en témoigne le dernier disque de Pierrick Pédron, Omry, qui doit beaucoup à l'amour que le saxophoniste porte aux grands noms du rock progressif, comme Pink Floyd.

A titre personnel, c'est avec un vrai bonheur que je parcours ces quelque 450 pages denses et érudites, mais constamment passionnantes. D'une certaine façon, ce Rock Progressif est le bouquin que j'appelais de mes vœux depuis longtemps et je sais gré à Aymeric Leroy d'avoir comblé un vide et su fixer par l'écrit une aventure que je considère comme constitutive de mon propre parcours de mélomane boulimique. Et, j'en suis certain, je ne serai pas le seul dans ce cas.

Cerise sur la gâteau, la connaissance encyclopédique d'Aymeric Leroy sur ce sujet est servie par une écriture de qualité : son style soutenu, élégant et dépourvu de toute boursouflure, constitue un écrin particulièrement adapté à l'univers du rock progressif dans ce qu'il a de plus inventif.

Un seul conseil de ma part : si vous êtes amoureux du rock progressif, vous ne pourrez échapper à ce livre qui vous ravira ; si vous avez un intérêt pour l'histoire de la musique au XXe siècle, vous seriez coupables de l'ignorer.

Commentaires

  • Alors, là, tu me tentes.... Un tel bouquin existe ? J'aurais été incapable de donner une définition du rock progressif même si je me doute de ce qu'il est. Merci et bon week end.

  • je l'ai acheté cette semaine... bien sûr... je le lirai sous peu !

  • Oh oh.. je ne savais pas qu'il existait ce livre. Mais je le veux !

    J'ai moi même constitué une grande partie de mon (in)culture musicale grâce à ce genre sans savoir qu'il en était un. Un peu comme un monsieur Jourdain de la musique. Maintenant, vu avec le recul, je ne renie pas ces moments et même parfois j'exhume un album et me plonge dedans avec délectation pour en réécouter les arrangements et la créativité dont ils débordaient.

    Allez zou, à la librairie !!!

  • J’avoue être très partagé sur cet ouvrage. Précisons d’abord qu’il s’adresse davantage à l’amateur déjà averti plutôt qu’au béotien voulant découvrir ce genre musical. Pour ce dernier à la recherche de nouvelles expériences musicales, on lui préférera L’Histoire mondiale du rock progressif de Didier Gonzalez, fourre-tout qui apparaît bien amateur en comparaison du travail structuré d’Aymeric mais qui a le mérite de présenter pléthore de groupes et de perles rares du progressif.
    J’aimerais d’abord louer le travail d’Aymeric Leroy. Son livre est très bien écrit et nous plonge avec bonheur dans l’analyse du contexte socio-culturel qui a permis l’éclosion du rock progressif. Son œuvre ne se limite pas à un récit historique mais n’hésite pas à analyser en profondeur des œuvres marquantes comme l’ont été Close to the Edge, Foxtrot , In the court of Crimson King ou Thick as a Brick... Autre point positif, mais totalement subjectif, j’admets avoir une étonnante convergence de vue sur des œuvres majeures comme le Yes Album, Foxtrot ou Selling England by the pounds partageant les mêmes enthousiasmes et les mêmes critiques que l’auteur.

    Alors que reprocher à ce livre ? Avoir fait l’historique de ce courant musical est passionnant mais, selon moi, s’accorde mal avec la volonté d’analyser en même temps la qualité des œuvres. Leroy n’a pas su choisir entre un récit froid et dépassionné et la volonté de porter un regard artistique et critique. Et c’est là que le bas blesse car le corollaire de cette démarche bâtarde est que dans l’esprit de l’auteur, seules les œuvres ayant rencontré le succès du grand public ou de la critique ont le droit d’exister et d’avoir une analyse digne de ce nom. Ce qui marche encore très bien pour la scène anglaise (les groupes majeurs ayant généralement connu le succès) ne marche plus du tout quand on aborde les scènes « secondaires. »
    Aymeric Leroy aurait pu se contenter de chroniquer les formations ayant connu ne serait-ce qu’un succès d’estime, ce qu’il fait d’ailleurs plutôt bien avec Le Orme, PFM, Banco et Area. Malheureusement il veut se montrer œcuménique et assassine d’une formule lapidaire d’authentiques chefs d’œuvres. Les œuvres magistrales de Latte et Miele (Passio Secundum Mattheum, Papillon) ne sont pas citées et le groupe dont les œuvres datent pourtant de 1972 et 1973 est ravalé au rang d’un vulgaire groupe de protoprog, et littéralement assassiné par la formule « univers sonore et stylistique très daté, voire antédiluvien »(sic)
    Des œuvres majuscules comme l’album éponyme de Maxophone ou Celeste ne sont guère mieux traités. Des chefs d’œuvres comme ceux d’Alusa Fallax, Delirium, Jumbo, Real Accademia di Mucica, Pierrot Lunaire, Nuova Idea, Semiramis ont eu la chance d’être oubliés….(ou uniquement cités comme groupe ayant été produit par un label.)
    Ma lecture s’est pour l’instant arrêtée à la fin du chapitre sur la scène italienne. Mais je peux déjà imaginer le sort qui sera fait à nombre de groupes scandinaves, allemands, américains….
    Analyser le progressif à l’aune de l’importance historique des groupes boursoufle la place prise par des groupes artistiquement mineurs comme ELP (Aymeric Leroy reconnaît lui-même qu’il n’y a pas grand-chose à sauver de l’œuvre du trio) et occulte malheureusement des joyaux comme Papillon de Latte e Miele. Comment être impressionné par l’introduction de Tarkus et rester insensible à celle de Papillon, comment louer la virtuosité artistique d’Emerson et rester aveugle à celle de bons nombres de maîtres du genre italien ? Time of Change de The Trip, groupe italien à peine mentionné, n’est-elle pas une œuvre beaucoup plus aboutie que celles d’ELP ?

    En synthèse le livre reste très intéressant pour l’analyse de la scène anglaise et sur le contexte socio-culturel qui a permis la naissance de cette musique passionnante. Cependant le livre permettant de découvrir les œuvres majeures du genre, en gommant toutes considérations de contexte géographique ou temporel, reste à écrire.

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