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  • Mémoires

    La ville de Nancy se dotera prochainement d'un Centre des Mémoires, regroupant les archives départementales, trop à l'étroit désormais dans leur site actuel, ainsi qu'un espace culturel pouvant accueillir des expositions, des animations et d'autres formes de diffusion de témoignages historiques. Cerise sur la gâteau, un parc public arboré lui sera associé, ajoutant à la ville une nouvelle zone de vie qui manquait probablement à sa partie nord : voilà une excellente nouvelle pour les habitants du quartier - dont je suis - qui voient d'un bon oeil cette implantation future d'une activité utile, porteuse des richesses de notre mémoire collective.

    En visitant le site de l'ancienne école normale - à l'abandon depuis une vingtaine d'années et livrée à l'imagination des squatteurs - qui fera l'objet d'une requalification pour donner naissance à ce projet dont l'aboutissement nécessitera plusieurs années, j'ai pu observer comme un raccourci de notre société en contemplant les façades des bâtiments et en me glissant à l'intérieur de quelques salles ouvertes à tous les vents.

    J'ai vu, j'ai même admiré, de véritables œuvres d'art projetées à la bombe à peinture sur des murs en décomposition. Acharnement de quelques uns à ne pas se résigner à la médiocrité. Malgré l'âpreté du quotidien, ces peintres anonymes créent le beau, sans espoir de reconnaissance toutefois. Sans même se dire qu'en d'autres circonstances, un émir ou un milliardaire russe pourrait débourser 100 millions de dollars pour confisquer leur travail et faire un pari financier en spéculant sur la valeur relative d'une toile ou d'une sculpture. Dehors, dans l'humidité poisseuse de l'hiver lorrain et les émulsions verdâtres d'un salpêtre omniprésent, ou dans des salles encombrées de détritus et de gravats, ces peintures s'offrent, avant leur prochaine disparition. Art éphémère et désespéré où l'imagination est reine.

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    Mais j'ai vu aussi, ou plutôt j'ai lu, ici et là comme autant d'invectives cyniques, la revendication d'une inculture, affichée non sans une certaine fierté, qui m'en a rappelé une autre, celle qui se répand jusque dans les sphères les plus proches des cercles décisionnaires. Et qui regarde vers le bas, animée d'un mépris qui ne laisse guère de place à quelque forme de dialogue que ce soit.

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  • Mur

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    Au mois de janvier 2007, j'avais évoqué sur mon blog un drôle de mur, devant lequel je passe quotidiennement en me rendant au boulot. Graffitis et tags étaient pour moi la source de lectures sans cesse renouvelées. Petit à petit, jour après jour, on pouvait observer la germination des graphies, prendre note de tous les ordres donnés par d'invisibles écrivains autoritaires, se réjouir de temps à autre d'un dessin imaginatif et bariolé, autrement plus séduisant que toutes ces fientes projetées à grands coups de bombes de peintures qu'on appelle tags et qu'une certaine complaisance gauche caviar tente de nous faire passer pour de l'art urbain. Les graphes oui ; les tags, faudrait voir tout de même à ne pas exagérer...

    telecran.jpgImmanquablement, arrivait le jour où mon mur était plein. Plus un seul centimètre carré pour y inscrire une vérité socio-philosophique. Et zou, les services de la ville y déposaient une bonne couche de laque fraîche et c'était reparti pour un tour. J'avais comparé le mur au Télécran de mon enfance, qu'on secouait en le retournant pour faire disparaître les petits dessins qu'on avait péniblement réussi à produire en tournant deux molettes dont le maniement était particulièrement difficile à contrôler.

    Deux ans plus tard, on dirait que les choses ont un peu changé : voici quelques jours seulement, mon mur était remis à blanc (ou plutôt à vert). Comme d'habitude. Mais au lieu des énigmatiques slogans anarcho-libertaires qui faisaient mon plaisir du matin, d'autres écrits ont fait leur apparition, beaucoup moins sympathiques. Racistes et antisémites, pour parler plus clairement. Ces saloperies communautaristes ont vite été effacées par un nouveau coup de rouleau, dans l'urgence. Je crois bien que c'est la première fois que deux procédures d'effacement ont été déclenchées en un temps aussi court.

    Et je regarde ce mur, nu, presque mort.