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Pour la route

pablo cueco, pour la route, qupé éditions, , parisPour une fois, je ne vous parlerai pas de musique. Même si l’auteur de Pour la route est aussi un magnifique percussionniste, joueur de zarb plus précisément. Le Corrézien Pablo Cueco, puisqu’il s’agit de lui, est aussi une très belle plume. Peut-être vous rappelez-vous qu’il n’y a pas si longtemps, le 16 mai, je l’avais évoqué ici-même dans mon Carnet de Notes à la faveur de la parution d’un album de toute beauté : Quiet Men, emmené par le clarinettiste Denis Colin.

Cette fois, Pablo Cueco prend le temps de poser son instrument pour devenir le chroniqueur d’un monde à part, celui des bars tabacs parisiens, à partir d’un centre nerveux du côté du troisième arrondissement et de la Rue Vieille du Temple. Je vous rassure tout de suite : rien à voir avec des brèves de comptoirs et autres paroles définitives notées au fil du temps avant compilation brute de décoffrage. Pablo Cueco fait ici un véritable travail d’écrivain, sur la base d’observations multiples et de réflexions à portée socio-poétique. Parfois ancrées dans la brûlure de l’actualité comme au lendemain des attentats du 13 novembre 2015.

La Perle, Le Bougnat, Le Saint-Gervais, Chez Nénesse, Le Tizi, Le Baromètre, Le Poitou, La Petite Chaise, Le Progrès, Chez Nini, La Renaissance. Autant de voyages que de noms. Et des incursions aussi vers d’autres arrondissements : 7e, 10e, 11e ou 17e… sans oublier toutes les destinations que ces bars peuvent suggérer à notre imagination.

Pablo Cueco dresse des mini portraits (quatorze au total), raconte la vie des lieux avec une infinie tendresse. Il n’y a chez lui aucune commisération, pas la moindre tentation de moquerie. Ses lignes regorgent d’amour pour ces univers singuliers et ces êtres qui, souvent, apprivoisent la solitude verre en main. Il ne manque jamais une occasion de souligner leur élégance, même lorsque le pas est hésitant. Mention particulière pour Moi chien du comptoir et sa pirouette finale pleine d’humour. Oui, vous avez bien lu : un chien de comptoir, à ne surtout pas confondre avec un chien de salle. À travers ces mille histoires du quotidien, l’auteur fait aussi œuvre d’historien en décrivant l’évolution des bars qu’il fréquente assidûment. Avec une pointe de nostalgie pour le temps qui passe et s’enfuit.

On ressort de la lecture de Pour la route avec l’envie irrépressible de se fondre au milieu des habitués, pour les écouter, comprendre ce qui les fait tenir debout malgré l’adversité. Voilà un livre généreux qu’on lit et relit. Un vrai livre de chevet, qui bénéficie du concours du photographe Milomir Kovacevic, parisien depuis plus de 20 ans et qui a appris à saisir des scènes de vie et de rue du côté de Saravejo. Et comme un bonheur ne vient jamais seul, le Messin Rocco y est allé de ses dessins.

À lire sans modération, avec ou sans alcool !

Pour la route – Qupé éditions, 2019 – 120 p., 15€.

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