Arcs-en-ciel
Je dois lutter à tout prix contre une tentation nostalgique qui, à défaut d'un contrôle conscient de ma part, pourrait vite m'arracher à la nécessité de lutter, jour après jour, pour construire un lendemain qui me verra debout. Facile à dire...
Voici en quelques lignes l'exemple d'une digression nostalgique qui vient malicieusement polluer mon quotidien. J'emploie cet adverbe à dessein parce qu'il faut bien l'avouer, ces échappées vers un passé lointain et idéalisé ne sont pas désagréables. C'est tout le contraire : elles s'apparentent à un douillet refuge qu'on gagne volontiers lorsque la grisaille du quotidien pointe sur vous un doigt menaçant et vous paralyse.
J'écoutais ce matin un disque d'un saxophoniste anglais ayant posé ses valises du côté de New York voici une bonne dizaine d'années, Will Vinson. J'en profite pour dire ici que je consacrerai prochainement un peu de mon temps pour évoquer ce talentueux saxophoniste dans un article destiné à Citizen Jazz, avec très probablement une interview à la clé.
Avant de quitter la maison, j'ai jeté un petit coup d'oeil à la pochette de l'un de ses disques, Promises, publié en 2008 (j'en profite tout de même pour dire que son nouveau CD live, The World (Through My Shoes), vient de voir le jour...) et je n'ai pu m'interdire de tracer une grande ligne droite entre ce que j'avais sous les yeux :
et un autre disque, le lumineux Europe '72 du Grateful Dead (eh oui, encore ce groupe qui n'a pas fini de me hanter...) qui m'avait tellement fait rêver lorsque j'étais adolescent et grâce auquel j'avais fini par élaborer un subtil stratagème pour acquérir dans les meilleures conditions de... discrétion ce triple album qui, à l'échelle de mon budget d'adolescent, valait une petite fortune. A l'occasion, allez faire un petit tour par ici, car je raconte cette drôle d'histoire que j'ai d'ores et déjà sélectionnée, dans une version légèrement remaniée, pour un projet de bouquin qui traîne quelque part dans un coin de mon cerveau... et qui verra le jour !
On voit bien que ces deux visuels ne sont pas totalement étrangers l'un à l'autre. Il y a l'arc-en-ciel qui semble ouvrir une vaste porte vers un univers un peu irréel, celui de la création, très probablement. Et le fond blanc, pour mieux en souligner les couleurs. Et forcément, Promises appelle automatiquement en mon for intérieur la vision intérieure de Europe '72. Impossible d'échapper à ce rappel !
J'ai donc marché pour me rendre au travail en écoutant Promises, les délicats entrelacs du saxophone de Will Vinson et de la guitare de Lage Lund. Avec, bien nichés dans un des tiroirs de mon armoire aux souvenirs, les arpèges cristallins d'une autre guitare, celle de Jerry Garcia dans « China Cat Sunflower » ou « Tennessee Jed » sur la scène du Lyceum de Londres ou de l'Olympia de Paris.