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sarah murcia

  • Sarah Murcia ou la musique en observation

    Sarah_Murcia_Eyeballing.jpgSarah Murcia se livre un peu plus encore avec Eyeballing, un disque très personnel dont on comprend vite qu’il survole la production commune, après qu’on aura renoncé à toute tentative de classification. Car cette musicienne n’est décidément pas une artiste comme les autres. C’est vrai qu’on la connaît sous des facettes multiples qui attestent une curiosité très largement au-dessus de la moyenne : elle est contrebassiste, mais aussi pianiste, compositrice, productrice et chanteuse. Sarah Murcia est avant tout une musicienne libre, capable d’œuvrer aussi bien dans le domaine du jazz que de la pop et du rock, avec des incursions dans la musique orientale. Elle fait partie des artistes qu’on qualifiera d’inclassables – un vrai compliment en notre époque de standardisation – et nul besoin d’être grand clerc pour reconnaître que son talent est immense. Pour rattacher sa personnalité singulière au titre de son nouvel album, on pourrait dire qu’en éveil constant, Sarah Murcia garde les yeux grands ouverts…

    Ses récents faits d’armes illustrent une diversité qui définissent son appétit de musique. On peut la trouver en effet au sein du septet de Sylvain Cathala ou du quartet de Louis Sclavis et notamment sur l’album Characters On A Wall. Rodolphe Burger ou Magic Malik font partie de ceux qu’elle a côtoyés ou continue de côtoyer. Sarah Murcia est également impliquée dans plusieurs projets aux contours atypiques : Caroline (avec des compagnons de route tels que Gilles Coronado, Olivier Py, Fred Poulet et Franck Vaillant) ; des duos dont l’un avec Noël Akchoté, mais aussi Beau Catcheur (avec Fred Poulet) et Habka (avec Kamilya Jubran) ; et pour finir (provisoirement) Never Mind The Future, une formation qui reprend rien moins que le répertoire des Sex Pistols – il faut oser, tout de même ! – et dont la composition recoupe en partie celle de Caroline (Py, Coronado, Vaillant), augmentée toutefois de Benoît Delbecq et de Mark Tomkins. Ne pas oublier non plus Pearls Of Swines (Fred Galiay, Gilles Coronado et Franck Vaillant) ni le fait que la contrebassiste se produit en solo. Une belle carte de visite, en somme, dont l’écriture est en cours, comme on le supposera volontiers.

    Eyeballing – dont la traduction n’est pas simple parce qu’elle est à tiroirs : à vue d’œil, observer ou exorbité par exemple – est une incursion supplémentaire vers un univers décalé et incertain qui n’appartient qu’à cette tête chercheuse. Sur ce disque, Sarah Murcia joue de la contrebasse bien sûr, mais elle y chante également, principalement en anglais sur des textes de Vic Moan, un auteur compositeur américain issu des scènes rock, jazz, punk ou ska qu’elle a régulièrement invité au sein de Caroline. On trouve aussi un texte en français au titre taquin signé Denis Scheubel : « Volonté avec un nuage de lait ». Et parce que les bons amis sont ceux vers lesquels on se tourne naturellement, Sarah Murcia s’est entourée pour l’occasion de deux musiciens de Never Mind The Future (ainsi que de Caroline pour l’un d’entre eux) : l’excellent Benoît Delbecq au piano et aux percussions électroniques et le non moins excellent Olivier Py aux saxophones. Symbole d’ouverture ou de diversification, appelez ça comme vous le souhaitez, François Thuillier vient souffler les notes d’un tuba qui fait ici office de basse autant que d’instrument soliste. Au bout du compte, voilà un disque au tempo souvent arythmique dont le frémissement aux couleurs pop est imprimé par les percussions électroniques de Benoît Delbecq. La forme est plutôt minimaliste, avec des chansons aux arrangements souvent épurés. Et ce qui séduit dès la première écoute, c’est la juxtaposition des sonorités électroniques et du son, bien naturel celui-là, du tuba ou du saxophone. Ce contraste fonctionne à merveille pour dessiner une musique qui vous trotte vite dans la tête. Il y a en outre ce petit quelque chose, un peu distant, un peu inaccessible, qui rend Sarah Murcia particulièrement attachante lorsqu’elle chante. Surtout, on refuse de la croire lorsqu’elle nous dit : « J’veux pas chanter, on m’a forcé à le faire / Moi c’que j’aime, sur les disques, c’est me taire / Et boire de l’alcool avec mes amis ».

    Taratata, madame Murcia : vous buviez ? J’en suis fort aise. Eh bien chantez maintenant !

    Musiciens :Sarah Murcia (contrebasse, chant, synthétiseur basse, piano), Benoît Delbecq (piano, percussions, claviers, électronique), Olivier Py (saxophones ténor et soprano), François Thuillier (tuba).

    Titres : The Caretaker / Monkey / Come Back Later / Inefficient / Volonté avec un nuage de lait / Small / Eyeballing / So Nice / Minimum

    Label : dStream

  • Matricule AYLCD-149

    sarah murcia,never mind the future,sex pistols,never mind the bollocks,ayler recordsCette petite chronique pourrait vite ressembler à un foutoir si je n’y prenais garde. Parce que j’aimerais aujourd’hui dire deux ou trois mots au sujet de Never Mind The Future, disque enregistré par la contrebassiste Sarah Murcia, dûment entourée de son groupe Caroline augmenté de deux unités pour l’occasion, soit une belle brochette de musiciens iconoclastes pour une relecture assez inattendue de Never Mind The Bollocks, l’unique album des Sex Pistols dont la parution en 1977 avait quelque peu fait chavirer certaines âmes sensibles du côté de la perfide Albion.

    Mais parler d’un tel disque, c’est aussi rappeler l’existence de ce valeureux label qu’est Ayler Records, dont j’ai déjà souligné tant la qualité du travail fourni par Stéphane Berland qui veille sur sa destinée avec un soin amoureux, que la diversité des couleurs d’une écurie qui peut, en quelques mois et trois références successives portant les numéros 147, 148 et 149, vous entraîner dans la nuit un peu glacée de l’Abbaye de Noirlac avec le Quatuor Machaut, histoire de vous donner à entendre une version pour quatre saxophones de la Messe de Notre Dame, chef d’œuvre du XIVe siècle signé Guillaume de Machaut, avant de vous entraîner du côté du Triton, aux Lilas, pour affronter la brûlure du guitariste Marc Ducret, dont le trio formé avec Bruno Chevillon et Eric Echampard se voit renforcé de trois soufflants ébouriffants que sont Fabrice Martinez (trompette), Christophe Monniot (saxophones) et Samuel Blaser (trombone) à l’occasion d’un Metatonal chauffé à blanc sur la pochette duquel les exégètes de la cause du rock progressif n’auront pas manqué de repérer un drôle de renard immortel à neuf queues déguisé en femme leur rappelant la pochette d’un vieux disque de Genesis, pendant que les amoureux de Bob Dylan comprendront vite qu’avec « 64 », composition célébrant l’année où Marc Ducret à découvert les titres de Mister Zimmerman, ils pourront retrouver, joyeusement intriqués dans un corps à corps sensuel, deux thèmes de leur héros, « The Times They Are A Changin’ » et « Wigwam ». Mine de rien, soit dit en passant, vous venez de lire une phrase comptant à elle-seule 1502 signes. Je vous en félicite...

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