J’ai réalisé lundi matin par téléphone l’interview d’un musicien décidément pas comme les autres et pour lequel j’ai une grande admiration, quelles qu’en soient les apparentes contradictions. Si vous ne connaissez pas son nom, peut-être que la photographie de cette note vous fera penser que sa silhouette ne vous est pas totalement inconnue. Cherchez bien… Vous n’êtes pas au fait de l’histoire de Magma ou de la Musique des Sphères ? Aucune importance car je serais surpris si vous ne l’aviez jamais aperçu aux côtés de chanteurs comme… Michel Berger, France Gall, Johnny Halliday ou, tout récemment, Jacques Dutronc. Une drôle de schizophrénie artistique sur laquelle j’ai pu échanger avec lui, et obtenir des réponses très intéressantes, voire émouvantes.
Je veux parler de monsieur Jannick Top.
Cet entretien, lié à la parution du second disque de Troc, un groupe dont il fait partie et qui avait été formé en 1971 par le batteur André Ceccarelli, fera l’objet d’une parution prochaine dans Citizen Jazz, en lien avec la chronique de l’album. Il s’agit vraiment d’un petit événement parce que Troc 2011 est en fait le second disque de cette formation, dont l’existence très éphémère avait pris fin en 1972. Notamment parce que Top, bassiste surpuissant, avait été repéré par un certain Christian Vander, le Kobaïen fou qui s’était empressé de le débaucher pour l’embarquer sur sa drôle de planète dont la pureté n’a jamais été sans laisser dans son sillage un petit parfum d’ambiguïté. Une collaboration qui durera environ deux ans, avant une nouvelle tentative d’association en 1976 (Vandertop) et pour finir, la séparation. Puis une exploration par Top, certes moins créative mais probablement plus rémunératrice, d’autres univers dans le monde de la variété.
Sauf que le virus des musiques stratosphériques n’était pas éradiqué : on se souvient de La Musique des Sphères, et dans les années 90 d’un trio plutôt intéressant, STS ; puis un disque remarqué avec le trompettiste Eric Le Lann en 2006 et, dès l’année suivante, une sacrée Infernal Machina où Jannick Top remettait les pendules à l’heure et voulait par là signifier l’importance de sa contribution à l’histoire de Magma (selon moi, les mouvements VII à XI sont probablement l’une des plus belles séquences enregistrées par le groupe ; mais ce n'est que ma modeste opinion et je vais encore me faire honnir par les gardiens du Temple... Pas grave, j'ai l'habitude : même pas peur !). Car s’il prétend avoir voulu rendre hommage à Christian Vander avec sa machine infernale, il n’aura échappé à personne qu’en creux de cette musique sombre, ou plutôt en relief, se dessine très clairement tout ce que le groupe lui devait à l’époque. J’ai mis des années à comprendre pourquoi Köhntarkösz était mon disque préféré de Magma (bien loin devant tous les autres). J’avais certes remarqué qu’il ne ressemblait en rien aux autres, et surtout pas à ceux de la martiale trilogie Theusz Hamtaahk qui me continue de me gêner un peu aux entournures (cette fois, je suis banni à jamais...), mais il m’a longtemps échappé à quel point l’âme de Top souffle sur cette musique. Ecoutez le final de l’album, vous saurez de quoi je parle.
Dans l’interview, Jannick Top explique qu’il a toujours ressenti le besoin de ne pas se cantonner à un seul projet, qu’il lui faut évoluer dans le changement. On est content, cependant, de constater qu’il a retrouvé ses vieux copains et qu’il a déployé avec eux une énergie très saine pour nous offrir une musique imprégnée de rock, de jazz, de soul et de funk. Le disque respire le plaisir de jouer ensemble. Un vrai cocktail vitaminé ! Surtout que Troc nous revient presque dans sa formation d’origine : autour de Ceccarelli et Top, voici à nouveau Claude Engel à la guitare et Alex Ligertwood au chant. Seul le pianiste Henri Giordano n’est pas de la fête mais son remplaçant est un certain Eric Legnini, à lui-seul une assurance groove.
Top est au top, dans ses compositions revient souvent le mot spirit et ça me plaît bien !