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hypernuit

  • Hypernuit

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    Voilà près de quatre ans maintenant – c’était au mois de mars 2007 – que j’ai découvert Bertrand Belin, alors qu’il venait de publier La Perdue, son second album. Vous pouvez vous reporter à la petite note que j’avais écrite à l’époque pour comprendre ce qui m’avait séduit chez ce chanteur atypique, l’un des rares sur la scène actuelle de la chanson dite française à posséder cette capacité d’installer d’emblée un univers immédiatement identifiable, résolument énigmatique et aux antipodes d’un insupportable carcan, celui du couplet / refrain rimailleur mou du genou tout le monde tape dans ses mains.

    Bertrand Belin a récemment ajouté une nouvelle étape au périple musical qui est le sien en publiant un troisième disque étrangement intitulé Hypernuit. On y retrouve cette alternance de pénombre et de lumière, ces climats brumeux orchestrés en une musique volontairement réduite à son état minimal – guitare, basse légère, batterie plus suggérée que frappée, ici ou là quelques arrangements de cordes – où les paroles souvent elliptiques laissent deviner les émotions ou les paysages plus qu’elles n’affirment. Bertrand Belin invente des textes dans une langue qui ne sent pas l’effort de l’écriture et semble au contraire déposer spontanément les mots au plus près des impressions qu’ils veulent nous transmettre. Dans une récente interview, il confiait que « les textes n'ont pas été écrits, ne sont pas passés par le papier pour ne pas organiser la phrase selon des concepts graphiques. J'ai souvent mis le casque sur les oreilles et chanté directement, sans écrire. Les textes sont nés au sein même de la musique. » La voix grave de Bertrand Belin, qui danse sur le fil ténu d’un équilibre entre chant et talk over, est empreinte tout à la fois de gravité et de fragilité. Elle parle au creux de l’oreille, confie des secrets qu’on recueille avec la certitude qu’ils nous sont destinés.

    Il est peu probable que cette Hypernuit permette à son auteur de sortir d’une certaine confidentialité qui est la marque de Bertrand Belin, malgré l’accueil en général très enthousiaste de son travail et la reconnaissance de ses pairs. Parce que celui-ci, excellent guitariste et arrangeur de surcroît, ne choisit pas avec ce nouveau disque la facilité d’une chanson tape à l’œil et s’éloigne définitivement d’une appartenance au clan si peu imaginatif de la variété. Bien au contraire, Hypernuit s’apparente à la poursuite d’une quête, plutôt austère et feutrée, qui nous conduit avec lui dans un monde qui s’accommode mal des fureurs du quotidien. On se plaît à respirer à pleins poumons cette musique comme une bulle d'air existentielle et poétique.